Durant la trêve des confiseurs, nous proposons à lecteurs de relire nos articles essentiels parus depuis la dernière rentrée de septembre. Ce nouvel article de la série a été initialement publié le 16 septembre 2022.
Entendant tirer profit des difficultés rencontrées par les assureurs de référence de la branche – pour rappel : Klesia et Malakoff Humanis – afin de faire appliquer l’accord du 28 juin, la concurrence se positionne sur le marché, par le moyen d’offres différemment calibrées.
Après un flottement, la mobilisation tous azimuts
Cet été, l’enjeu de la couverture frais de santé des HCR a mobilisé bien des assureurs de terrain. Au départ, comme en témoigne un agent général d’une ville moyenne de province, la survenue de cet enjeu au cœur des préoccupations assurantielles s’est opérée dans un certain état de flottement. “Durant la première quinzaine d’août, j’ai commencé à recevoir des coups de fil de patrons de restaurants et de bistrots, des connaissances personnelles, qui me demandaient si je n’avais pas un produit santé à leur proposer” relate-t-il, poursuivant : “je ne comprenais pas très bien ce qu’il se passait, puisque je considérais ce marché comme n’étant pas vraiment accessible, du fait du niveau très bas de la cotisation au contrat de branche”. Il a fallu quelques jours à notre interlocuteur pour comprendre les raisons de ces sollicitations.
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Une fois passée cette période de flottement, décrite par d’autres sources, il s’est agi de proposer rapidement des solutions concrètes aux employeurs du secteur. “Je gérais quelques dossiers santé HCR, une petite dizaine, qui étaient évidemment placés auprès du régime de branche, qui était jusqu’alors très intéressant” explique un courtier de proximité, qui fait ensuite état de la manière dont il a fait évoluer la couverture de ses clients : “si je passais ces entreprises à 47 euros par mois [le nouveau montant de la cotisation au régime conventionnel, ndlr] je les perdais probablement. J’ai donc sorti tout mon portefeuille du régime de branche et j’ai échangé avec mes clients pour les placer sur d’autres offres”. Les retours du terrain tendent à indiquer que cette attitude a été celle de nombreux courtiers.
La proposition fracassante de Colonna
Alors que le milieu de la distribution commerciale de l’assurance s’échinait à trouver des solutions de remplacement pour la couverture de frais de santé des entreprises des HCR, la proposition fracassante, à 30 euros par mois, formulée par Colonna – le gestionnaire du régime conventionnel, en train de se faire déloger de cette place par la branche et ses assureurs partenaires – en lien avec la Mutuelle Générale, a largement perturbé les calculs des uns et des autres. Les agents généraux et les commerciaux des sociétés d’assurance ne pouvaient que constater, en le déplorant, que l’accès au marché risquait fort de se refermer aussi vite qu’il s’était ouvert. “L’offre Colonna a beaucoup tourné dans le secteur et, forcément, il était difficile de ne pas se positionner en fonction d’elle” résume l’agent général cité précédemment.
Pour les courtiers, l’équation était un peu plus simple à résoudre. “J’ai présenté à mes clients HCR les différentes possibilités qui s’offraient à eux. L’offre Colonna en faisait bien entendu partie” glisse un courtier parisien spécialisé dans la protection sociale. Il affirme toutefois avoir mis ses clients en garde du fait que cette offre risquait fort de s’avérer “déficitaire” et qu’une “correction du tarif” était envisageable “assez rapidement”. A l’appui de cette mise en garde, on relèvera que, sur sa page internet dédiée, Colonna annonce désormais une offre tarifée à 32 euros. “La moitié de mon portefeuille HCR a quand même fait le choix de l’offre Colonna, en m’expliquant qu’il serait toujours temps de changer d’offre par la suite” confie ce courtier.
Un marché HCR qui demeure ouvert
Ce propos implique, certes, que tout l’autre moitié du portefeuille santé HCR de notre interlocuteur n’a pas été placée chez Colonna. Il précise volontiers la manière dont il a procédé en l’occurrence : “Préférant éviter de devoir à nouveau s’occuper de leur mutuelle dans les mois qui viennent, mes autres clients ont opté pour d’autres produits, tarifés autour de 35-36 euros, notamment le contrat Axa”. Ces dernières semaines, des solutions comparables à celle d’Axa sont d’ailleurs promues pour la couverture santé des HCR, comme celle du courtier Satec, déjà implanté dans la branche, offre présentée à 36 euros. “Les clients ne sont pas fermés à l’idée de payer un peu plus pour intégrer un contrat équilibré” tranche le courtier parisien.
De fait, les agents généraux et les commerciaux des sociétés d’assurance n’ont pas déposé les armes devant l’offre de Colonna. L’agent général déjà cité le confirme en ces termes : “Ce que nous proposons est un peu plus cher mais le tarif s’inscrit dans la durée. Et puis il y a la relation de proximité qui joue, c’est important pour le service”. En remettant profondément en cause les équilibres de la couverture santé des HCR, les problèmes et le reparamétrage du régime conventionnel ont largement ouvert le marché à des acteurs et offres qui peinaient jusqu’à présent à le pénétrer.
Dans une telle configuration, on s’interrogera en revanche sur l’avenir de la mutualisation frais de santé des HCR. Plus précisément, on surveillera, dans les prochains mois, le comportement de son périmètre.