Sécurité sociale : la Cour des Comptes acte le rallongement de la CADES

Sécurité sociale

En plein – et chaotique – examen parlementaire du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, la Cour des Comptes a publié hier un rapport sur la “situation financière de la Sécurité sociale”.

protection sociale, financement

Objectivant, sans surprise, une situation financière très dégradée pour la Sécurité sociale, la Cour des Comptes semble acter le rallongement inévitable de la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES).

De “fortes incertitudes” sur le PLFSS 2026

Dans son rapport, la rue Cambon rappelle d’abord le niveau abyssal du déficit de la Sécurité sociale pour l’année en cours. “Le déficit des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale (Robss) et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) atteindrait 23 Md€ en 2025 selon les données du PLFSS pour 2026” rapporte-t-elle, mettant ce chiffre en perspective : “en hausse de 7,7 Md€ par rapport à 2024 : […] le déficit de la sécurité sociale aura ainsi doublé [en deux ans]”. Dans l’état actuel de la règlementation, il se serait encore aggravé l’an prochain, à près de 29 milliards d’euros. Ayant décidé de prendre quelques mesures afin d’écoper un peu un navire en plein chavirage, l’exécutif a prévu, dans le cadre du PLFSS 2026, “un effort de 11 Md€, composé de 9 Md€ d’économies en dépenses et de 2 Md€ de mesures nettes en recettes”. Il entend ainsi ramener le déficit à 17,5 milliards.

Hélas, outre le fait que, soit dit en passant, ce niveau de déficit prévisionnel demeure considérable, la Cour des Comptes pointe du doigt les fragilités du projet de budget social proposé par le gouvernement : “La construction du PLFSS pour 2026 est marquée par de fortes incertitudes”. D’abord parce que, comme l’a affirmé le haut conseil des finances publiques (HCFP) dans son avis d’octobre dernier, le scenario macro-économique au fondement du PLFSS est “volontariste”. En outre, parce que si “l’effort en dépenses est important”, il est rendu incertain par le fait qu’il est “concentré sur un nombre limité de mesures à fort rendement” – mesures qui pourraient être remises en cause au cours de l’examen parlementaire du texte. Enfin, rajoutera-t-on, l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) développé par le PLFSS 2026, à 1,6 %, pose clairement question.

La CADES au secours de la Sécurité sociale

Très complexe à court terme, la situation n’apparaît, il faut bien le dire, pas meilleure à moyen et long termes. Aux termes du PLFSS 2026, “à partir de 2027, le déficit ne se redresse pas et reste proche de 17 Md€ chaque année” relève la rue Cambon, qui en conclut : “Sous ces hypothèses, la perspective est donc d’un cumul permanent des déficits sociaux, avec une dette sociale supplémentaire de près de 110 Md€ en 2029”. La Cour des Comptes juge que cette “trajectoire des déficits” est “non soutenable”. Elle l’est indiscutablement en tant que telle. Surtout, le financement de ces déficits s’accumulant sous forme de dette n’est pas assuré, dans la mesure où elle n’est pas endossée par la CADES, dont la dernière mobilisation a pris fin sur la reprise de la dette sociale issue de la crise sanitaire, mais par l’ACOSS, qui atteint ses plafonds d’endettement et qui n’a pas pour objet d’endosser de dette sociale. De fait, insiste une nouvelle la Cour, la Sécurité sociale encourt un “risque sérieux de liquidité dans les années qui viennent”.

Partant de ces différents éléments, la rue Cambon esquisse une voie pour une pérennisation de l’action de la Sécurité sociale. Selon elle, une mobilisation de la CADES, par son rallongement, apparaît opportune : “Pour sortir de cette impasse et assurer la pérennité du financement de la sécurité sociale, une reprise de dette sociale par la Cades, allongeant la durée de vie de cet établissement au-delà de 2033, serait nécessaire, ce que seule permettrait une loi organique”. Comme nous l’avons déjà évoqué à plusieurs reprises dans nos colonnes, une telle issue semble inévitable. Afin, toutefois, de ne pas donner le sentiment qu’elle accepte de signer un chèque moral en blanc au bénéfice des décideurs politico-administratifs de l’Etat, la Cour précise que cette mobilisation de la CADES suppose, au préalable, la “définition d’une trajectoire pluriannuelle crédible de retour vers l’équilibre des comptes sociaux”. Quelques doutes peuvent, certes, être formulés s’agissant de l’éventualité d’une telle définition.

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