Sur la santé au travail, une nouvelle Bérézina paritaire

Vendredi dernier, les “partenaires sociaux” – que l’on va finir par ne plus nommer ainsi – se sont réunis afin de s’entendre sur une réforme de la santé au travail.

 

Alors qu’entre la fin du printemps et le début de l’été, ils avaient revendiqué un rôle central dans l’élaboration de cette réforme, ils viennent de faire preuve de leur incapacité totale à se mettre d’accord à ce sujet, laissant les coudées franches au gouvernement pour agir. 

Un rappel nécessaire

Il y a à peine un mois, les partenaires sociaux faisaient parvenir à Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, une missive commune destinée à réaffirmer qu’ils n’entendaient pas être dépossédés de la réforme de la santé au travail, comme ils avaient pu l’être de celle de l’assurance chômage. 

Dans cette lettre, intitulée “rétablissement d’une relation de confiance”, ils demandaient en effet des précisions quant à la manière dont le gouvernement entendait mener la réforme de la santé au travail. D’autre part, les partenaires sociaux demandaient, d’une seule voix, à ce que “le temps de la réflexion partagée [fût] véritablement respecté”.  

Un échec paritaire total

Dans cette configuration, tous les commentateurs de l’actualité sociale française s’attendaient bien évidemment à ce que les partenaires sociaux fussent particulièrement mobilisés afin de démontrer qu’ils étaient capables de mener à bien leurs discussions sur la santé au travail. Hélas, réunis vendredi dernier, c’est de dispositions fort différentes dont ils ont fait preuve. 

Le fond de leur désaccord peut être ainsi résumé : le patronat finançant la médecine du travail, il entend continuer à conserver le contrôle des flux financiers de la médecine du travail, ainsi que celui de l’organisation générale du dispositif. Cette option étant inenvisageable du point de vue des négociateurs salariaux, le dialogue paritaire a été rompu en moins d’une demi-journée de “négociations”. 

L’étatisation de la santé au travail

Face à une telle Bérézina paritaire, il apparaît inévitable que la réforme de la santé au travail soit désormais tout à fait reprise en main par l’Etat. La partie gouvernementale est d’autant plus belle à jouer que cette fois-ci, contrairement à ce qui avait être observé dans le cas de la réforme de l’assurance chômage, les partenaires sociaux n’ont eu besoin d’aucune aide extérieure pour construire leur échec. 

Concrètement, comme l’évoquent les Echos, il se pourrait que l’étatisation de la santé au travail se fît – conformément à l’une des recommandations du rapport Lecocq – par la création d’une agence nationale rassemblant les organismes existants dans ce domaine et coordonnant des agences régionales, qui elles-mêmes chapeauteraient les quelque 240 services de santé au travail interentreprises (SSTI) présents sur le territoire national. Un tel système permettrait, certes, au patronat de sauver les apparences puisqu’il continuerait, officiellement, à contrôler les SSTI. 

Le paritarisme sans objet

Ce nouvel échec paritaire, spectaculaire, sur la réforme de la santé au travail pose la question des perspectives du paritarisme “à la française”. Attaqués de toutes parts par l’exécutif mais indiscutablement incapables de jouer leur propre partition – chacun des deux camps patronal et salarial préférant, tour à tour et selon ce qu’il estime être ses intérêts, jouer le jeu de l’Etat plutôt que celui du camp adverse – les partenaires sociaux semblent avoir acté la disparition du paritarisme national et interprofessionnel tel qu’on le connaît en France depuis plus d’un demi-siècle. Dans la mesure où il ne faut pas s’attendre à ce que le pouvoir macroniste sauve cette forme de régulation des rapports sociaux, il y a fort à craindre qu’elle disparaisse à court terme. 

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