La Cour des comptes vient de publier son rapport dédié à la certification des comptes du régime général de la Sécurité sociale. Dans le document, la Cour dresse constate plusieurs anomalies, dont certaines sont liées à la crise née en 2020.
Le rapport (accessible en intégralité ici) s’inscrit dans le prolongement de celui qui était publié en 2021. En effet, pour la 2e année de suite, la Cour refuse de certifier les comptes de l’activité recouvrement de la Sécurité sociale. Si les comptes des 5 branches de la Sécurité sociale sont, eux, bien certifiés, la Cour émet plusieurs réserves importantes.
Le point noir : la Cour des comptes doute de la fiabilité des comptes de l’exercice 2021
Dans son rapport, la Cour remarque que la façon dont la Sécurité sociale détermine le solde du régime général n’est pas fiable. Selon elle, “les traitements retenus pour comptabiliser les produits de cotisations et de contributions sociales des travailleurs indépendants conduisent à ne pas donner une image fidèle du déficit en 2021“. Effectivement, le déficit s’établirait à 22,8 Md€ (hors fonds de solidarité vieillesse) en 2021, contre 36,2 Md€ en 2020, selon les chiffres transmis par la Sécurité sociale.
Toutefois, la Cour rappelle que les comptes de l’activité de recouvrement n’ont pas pu être certifiés pour l’année 2020. Ce facteur couplé aux autres réserves formulées l’année dernière pousse nécessairement à une grande prudence s’agissant du déficit constaté. Or, la Cour constate que la Sécurité sociale n’a pas suivi ses recommandations et n’a pas corrigé ses bilans. Ainsi, le déficit du régime général s’établirait plutôt à 27,8 Md€ en 2021 contre 31,2 Md€ en 2020.
Le rapport reproche clairement à la Sécurité sociale d’embellir sa situation : son déficit ne se serait réduit que de 3,4 Md€ en un an, au lieu des 13,4 Md€ annoncés.
Les grandes réserves formulées en parallèle de la certification des comptes des 5 branches de la Sécurité sociale
Si la Cour des comptes refuse de certifier les comptes de l’activité recouvrement pour la 2e année de suite et constate le manque de fiabilité des données fournies par la Sécurité sociale, elle n’en certifie pas moins les comptes des 5 branches. L’année 2021 était ainsi la première année d’existence de la branche autonomie. La Cour alerte sur l’insuffisance du contrôle effectué par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Cette dernière n’est pas assez structurée pour mener à bien les missions qui lui sont confiées. La Cour met directement en cause la capacité de la CNSA à exercer ses missions, ce qui ne donne pas vraiment confiance dans la bonne gestion de la nouvelle branche autonomie.
Le rapport indique également que les branches de la Sécurité sociale fonctionnent toujours en mode “crise” s’agissant des recouvrements. Les procédures automatisées de recouvrement amiable et forcé sont toujours suspendues. Les activités de contrôle de l’assiette déclarée des prélèvements sociaux sont toujours en retrait de leur niveau d’avant-crise. De plus la Cour note que les mécanismes permettant de maîtriser les risques financiers, s’ils sont mis en œuvre, ne sont pas assez efficaces. La quasi-totalité des indicateurs de risque financier résiduel sont en hausse en 2021.
Outre ces constats plutôt négatifs, la Cour des comptes reconnaît que des progrès sont réalisés du côté de l’informatique. Si les nouveaux outils structurants continuent à être déployés, sans effet immédiat, des améliorations sont attendues à l’avenir.
La Cour des comptes admet que la crise impose une adaptation temporaire. Mais elle constate que les organismes de Sécurité sociale ne remplissent pas assez leur diligence en matière de transmission des éléments justificatifs des comptes. Le rapport détaille donc plusieurs axes prioritaires d’amélioration : faire disparaître les incertitudes liées aux enregistrements et estimation comptables ; réduire les risques liés à la production de prestations et prélèvements sociaux ; améliorer les contrôles et améliorer la fiabilité des indicateurs de risque résiduel ; évaluer moins tardivement les incidences comptables. Ces demandes n’ont malheureusement aucun effet contraignant et il y a peu de chance pour que les comptes de la Sécurité sociale 2022 aient corrigé les anomalies ainsi mises en exergue.