Modernisation du dialogue social : la fin attendue des discussions

Le dernier round de négociations sur la modernisation du dialogue social touche à sa fin. Les partenaires sociaux sont réunis depuis hier, jeudi 15 janvier 2015, pour tenter de conclure les discussions par un accord. Ce processus aurait déjà dû aboutir : en effet les réunions ne devaient initialement durer que jusqu’au 19 décembre 2014. Mais faute d’entente entre les syndicats patronaux et de salariés, une nouvelle rencontre avait été fixée pour les 15 et 16 janvier 2015. La conclusion d’un accord, même à minima, est cruciale. Cependant les enjeux sont tels que certains syndicats ont des difficultés à faire des compromis pourtant nécessaires. 

 

Pourquoi est-il crucial qu’un accord soit conclu ? 

La signature d’un accord par les partenaires sociaux aura le statut d’Accord National Interprofessionnel pour l’année 2015. Initialement, les dispositions contenues dans l’accord devaient être transférées dans le projet de loi Macron pour la “croissance et l’activité” qui est en ce moment examiné par une commission spéciale à l’Assemblée nationale. Mais, en raison du retard pris par les négociations, et surtout à cause du refus de bon nombre de députés PS de voter la loi Macron si des mesures controversées étaient intégrées au texte, l’accord issu des négociations relatives à la modernisation du dialogue social fera bien l’objet d’une loi autonome. 

Si aucun accord n’est trouvé à la fin des discussions, une loi relative aux seuils sociaux et à la représentation du personnel sera tout de même déposée. C’est bien pour cela que les syndicats doivent tout mettre en œuvre pour signer un texte. Pour les participants aux négociations, mieux veut avoir la maîtrise du contenu, même imparfait, appelé à faire l’objet d’une loi, que devenir spectateur de l’écriture d’une loi qui les impactera directement. 

Pas sûr, pourtant, qu’une solution soit trouvée dans les temps, les négociations pourraient même s’étendre jusqu’au samedi matin. 

 

Les objectifs visés 

Les mesures visant à moderniser le dialogue social portent notamment sur deux points stratégiques 

controversés : 

– la création d’un Conseil d’entreprise dans les entreprises de plus de 11 salariés réunissant les actuels Comité d’entreprise (CE) et Comité d’hygiène de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et les délégués du personnel d’abord. Le patronat propose toutefois que le CHSCT devienne optionnel dans le Conseil d’entreprise des entreprises de 50 à 300 salariés, puis obligatoire au-delà. Cette création permettrait une simplification et une réduction des procédures. Cela aurait, d’après les rédacteurs du texte, un impact bénéfique sur l’effectivité du dialogue social qui se concentrerait plus sur la réalité et la pratique que sur les différentes formalités légales à accomplir. 

– la représentation des salariés dans les entreprises, dont les TPE (Très petites entreprises de moins de 11 salariés) ensuite, cette nouveauté permettrait d’étendre la culture du dialogue social interne à toutes les entreprises françaises. 

Ces deux sujets sont les principaux objets de discordes au sein du patronat mais également au sein des syndicats de salariés. 

Au-delà de ces points, la question de l’automatisation de la représentativité à partir de certains seuils a été débattue. Un accord sur des seuils sociaux plus souples devrait en théorie être trouvé. 

La finalité reste la simplification du dialogue social pour que son organisation soit moins chronophage, moins coûteuse, plus efficace et surtout, moins contraignante pour les entreprises. 

 

Des discensions palpables au sein des syndicats 

Les différences d’opinions qui règnent entre les syndicats de patrons et de salariés ont largement été commentées, ces oppositions sont aussi constatées au sein même ce certains syndicats

Elles portent en premier lieu sur la présence syndicale dans les entreprises de moins de 50 salariés. La CGPME y est fermement opposée alors que le MEDEF souhaiterait que dès 11 salariés, les entreprises disposent d’une représentation des salariés. Cela permettrait pourtant d’étendre l’effectivité du dialogue au sein des entreprises. Mais les opposants à cette propositions redoutent, à juste titre, de nouvelles normes contraignantes liées au élections et surtout des cotisations supplémentaires. 

Vient ensuite le Conseil d’entreprise qui fait l’objet de certaines réticences de la part des syndicats de salariés. Ceux-ci aimeraient que le délégué syndical reste l’acteur principal dans la négociation et la conclusion des accords d’entreprise et craignent que le Conseil d’entreprise, dont les fonctions seront très larges, ne prenne l’avantage dans ce domaine. Le patronat a tenu à rassurer les syndicats de salariés en proposant que les délégués syndicaux puissent s’inviter ou être élus au Conseil d’entreprise et rappelle qu’ils demeurent les “seuls habilités à négocier et conclure les accords d’entreprise“.  

La représentation au sein des TPE enfin. La CGPME semble irrémédiablement sourde à toute modification dans ce domaine. Au MEDEF des différences d’opinion naissent également, notamment avec l’UIMM qui est plutôt favorable à une évolution fasse aux fédération du bâtiment ou de la propreté qui demeurent hostiles. Le texte proposé hier, jeudi 15 janvier 2015 par le patronat, présente la possibilité d’une représentation en TPE décidée par accord de branche, à défaut celle-ci aurait lieu dans les commissions régionales. Il ne faut pas oublier que la représentation en TPE n’est pas forcément synonyme d’élection. La piste du mandatement est aussi envisageable, le salarié mandaté par un syndicat n’est pas un délégué syndical mais dispose d’un statut qui lui permet de discuter et de signer les accords d’entreprise. L’adoption de la mesure serait une véritable prise de position et un signal fort envoyé au gouvernement concernant une éventuelle inversion de la hiérarchie des normes

 

Malgré des oppositions marquées et en apparence inamovibles, un compromis devra bien être trouvé. Si ce n’est pas le cas, les partenaires sociaux seront démunis face à la loi qui sera prochainement proposée. Reste à savoir qui cédera en premier et surtout dans quels domaines. 

Y aura-t-il une représentation en TPE en échange d’une plus grande souplesse des seuils sociaux dans les plus grandes entreprises ? 

Si une représentation en TPE est créée, quelle forme prendra-t-elle ? 

Le Conseil d’entreprise sera-t-il créé sans heurts en garantissant le contenu du rôle du délégué syndical ? 

Ces questions trouveront rapidement une réponse, à condition que les négociations débouchent sur un accord au plus tard dans la nuit de vendredi à samedi. En dépit des doutes exprimés, il est peu probable qu’aucun accord ne soit trouvé, les partenaires sociaux n’auraient rien à y gagner. 

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