Cette tribune provient du site du syndicat CFDT.
Laurent Berger signe, au nom de la CFDT, une tribune avec ses partenaires du collectif Les Places de la République, pour interpeller les candidats sur la démocratie, l’engagement citoyen.
Les crises économique, sociale, environnementale et démocratique mettent en péril notre pacte républicain. Nous appelons les candidats à préciser l’action publique qu’ils entendent mener.
Nous l’affirmons : l’ampleur et la durée des crises auxquelles est confronté notre pays risquent de remettre en cause notre modèle social et sociétal. La crise économique et sociale n’est pas terminée. Partout, elle continue de frapper violemment les citoyens et leurs territoires.
La crise environnementale s’amplifie. Chacun de nous peut malheureusement en mesurer les conséquences dramatiques qu’elle a déjà sur notre vie quotidienne. La crise démocratique s’aggrave. Elle est certainement la plus dangereuse car la plus insidieuse. Elle nourrit la défiance vis-à-vis d’un monde politique quelquefois déconnecté de la société réelle, parfois peu exemplaire et fragilise la cohésion sociale.
« Le pire n’est jamais impossible »
Chaque jour, les impacts conjugués de ces trois crises renforcent le sentiment de déclin, favorisent la peur et le rejet de « l’autre », exacerbent la tentation du repli sur soi et nourrissent la montée des populismes. Petit à petit, elles mettent à mal notre pacte républicain. C’est pourquoi, à quelques semaines de deux élections majeures pour notre pays, nous tirons la sonnette d’alarme. Car le pire n’est jamais impossible.
Nous, membres du collectif des Places de la République, représentants d’associations notamment environnementales, de solidarité, d’aide aux migrants, d’éducation populaire, de mutuelles et de syndicats étudiants ou de salariés, nous sommes fortement interpellés par ces évolutions brutales.
Il y a un an, nous avions publié une première tribune dans laquelle nous nous interrogions sur les raisons de fractures politiques et sociales de notre société qui contrastent avec l’engagement solidaire toujours aussi vivant de nos adhérents et militants. Chaque jour, ils donnent l’image d’une France qui prend à bras-le-corps les problèmes de son temps, qui sait s’unir et s’organiser et par là-même donner du sens à notre société, parce qu’elle sait conjuguer sur le terrain des valeurs et des pratiques de créativité, de sobriété, de justice et de fraternité.
Mais cette France qui réfléchit, cette France qui s’engage, cette France qui agit est aujourd’hui trop méconnue, voire menacée. Elle est menacée par l’effacement du sens et du projet commun au profit du repli identitaire. Elle est menacée par la survalorisation de la séquence électorale et du mandat politique qui en résulte. Elle est menacée par la tentation de certain(e)s de se passer du dialogue avec ses militants, représentants de la société civile, quand ils n’agissent pas directement pour l’affaiblir.
« Museler la société civile n’est pas acceptable »
C’est pour cela que nous, organisations des Places de la République, avons décidé d’interpeller solennellement les candidats à l’élection présidentielle sur les risques qui pèsent sur notre modèle de démocratie. Nous leur posons trois questions sur l’action publique qu’ils entendent mener :
Le renoncement à un projet national commun n’est pas possible pour nous. Il serait destructeur du lien civique et de la solidarité et laisserait le champ libre à tous ceux qui promeuvent une identité nationale sectaire et régressive. Que proposez-vous pour reconnaître l’engagement solidaire des citoyens et lui faire toute la place qu’il mérite ?
La démocratie ne doit pas être mise entre parenthèses en-dehors des élections. Au contraire, elle doit permettre de continuer et de démultiplier, au-delà du vote, la participation des citoyens. Que proposez-vous pour garantir une démocratie qui ne se réduise pas à une séquence électorale et qui permette une véritable inclusion des citoyens de toute origine, et plus particulièrement des jeunes ?
Toute tentative pour ignorer, contourner ou museler la société civile n’est pas acceptable parce qu’elle tue la participation des citoyens. Il n’y a pas de démocratie vivante sans société civile reconnue et respectée, qui porte, comme les politiques, une expression de la volonté générale. Que proposez-vous pour consolider son rôle démocratique et pour favoriser l’engagement des citoyens ?
Nous voulons continuer à construire ensemble une société plus résiliente, qui prépare la transition vers des modes de vie plus durables : une société plus juste et plus solidaire, où personne n’est laissé au bord du chemin. Mais pour cela, la démocratie et la solidarité de demain sont à réinventer : réinventons-les ensemble.
Claire Hedon, présidente d’ATD Quart Monde France ;Laurent Berger, premier secrétaire de la CFDT ; Philippe Louis, président de la CFTC ; Jimmy Losfeld, président de la FAGE ; Louis Gallois, président de la Fédération des acteurs de la solidarité ; Nicolas Hulot, président de la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme (FNH) ; Denez L’Hostis, président de France nature environnement (FNE) ; Pierre Henry, France Terre d’Asile ; Philippe Jahshan, président du Mouvement associatif ; Jean-Baptiste de Foucault, coordinateur du « Pacte civique » ; Josiane Ricard, président des Francas ; Jean-Michel Ducomte, président de la Ligue de l’enseignement ; Thierry Beaudet, président de La Mutualité française ; Luc Bérille, secrétaire général de l’Unsa.