Comment apprécier l’existence d’une discrimination syndicale sur la carrière

métallurgie

L’appartenance à un syndicat ne doit pas être un facteur de discrimination en entreprise, notamment lorsqu’il s’agit d’évolution de rémunération. A ce sujet, la Cour de cassation apporte une précision intéressante sur la façon dont une telle discrimination peut (ou non) être caractérisée en examinant le parcours professionnel du salarié.

métallurgie

L’affaire jugée en octobre 2023 oppose un salarié retraité à son ancien employeur, l’entreprise de métallurgie Arcelormittal Méditerranée. Ce salarié se retourne contre son ancien employeur quelques années après sa mise à la retraite. Il s’estime victime de discrimination en raison de son mandat syndical au sein du comité d’entreprise entre 1976 et 1978. En effet, le salarié considère que l’évolution de sa rémunération a été impactée négativement par son mandat syndical. Mais la cour d’appel ne le voit pas de cet œil : le salarié va donc jusqu’en cassation pour tenter de faire valoir sa position.

La discrimination syndicale doit être établie à partir de situations comparables dans l’entreprise

Pour étayer sa position, le salarié désormais retraité met en avant la lenteur de sa progression dans l’entreprise postérieurement à son mandat syndical. Au cours de ce mandat, il est attesté que le salarié a participé à des grèves en 1976 et 1979. C’est à partir de sa promotion de 1977 que son évolution aurait subi un coup de frein selon lui. Il met en avant le fait qu’il a mis 12 ans à gravir l’échelon suivant (soit en 1989), puis 12 ans supplémentaires pour gravir l’échelon qui suit (soit en 2001). Selon lui, cette lenteur dans la progression de sa carrière est en totale opposition avec l’évolution que les autres salariés de l’entreprise ont connu au même moment. Ceux-ci ont plutôt connu des délais qui oscillent entre 3 et 5 années par échelon.

Face à cela, l’entreprise se prévaut des délais de progression observés dans l’ensemble de la profession. Ces délais y sont beaucoup plus allongés que dans l’entreprise : entre 16 et 24 ans selon les échelons ! La cour d’appel se range derrière cet argument est considère que “on ne peut présumer une discrimination syndicale à partir de la durée passée dans les divers échelons ainsi que le salarié le soutient“.

Toutefois, la Cour de cassation rappelle que ce sont les décisions de l’entreprise uniquement qui sont contestées. Par conséquent, ce sont les statistiques d’évolution de carrière au sein même de l’entreprise qui servent de référence pour savoir si le salarié plaignant a subi une discrimination syndicale :

En statuant ainsi, alors que la comparaison avec l’ancienneté moyenne dans la profession était inopérante dès lors qu’étaient contestées les décisions de l’employeur et que les statistiques de la durée moyenne par coefficient dans l’entreprise, telles qu’établies par l’employeur lui-même, laissaient supposer l’existence d’une discrimination syndicale, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Chambre sociale de la Cour de cassation, pourvoi n° 22-11.698, 18/10/2023

En comparant les délais imposés par l’entreprise au salarié entre deux évolutions d’échelon avec les délais habituellement enregistrés pour les autres salariés, la Cour de cassation considère que les indices d’une discrimination syndicale sont établis. Dès lors, la décision de la cour d’appel qui donnait raison à l’entreprise est cassée et un nouveau jugement doit être rendu pour tenir compte de l’inégalité de traitement dont le salarié retraité a été victime.

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmarkClose
0 Shares:
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pourriez aussi aimer
Lire plus

Les accords CCN en PDF sont tous dans la nouvelle bibliothèque Tripalio

Une toute nouvelle bibliothèque d'accords signés dans les conventions collectives nationales (CCN) au format PDF est maintenant accessible sur Tripalio. Plus besoin d'aller fouiller dans les bases de Légifrance ! Tous les textes officiellement mis en ligne sont désormais consultables et téléchargeables depuis notre base de données. La bibliothèque d'accords CCN de Tripalio est facilement...
protection sociale
Lire plus

Le gouvernement seul face aux déficits sociaux

Annoncé hier, le départ de l'U2P, la confédération patronale de l'artisanat, du commerce et des professions libérales, du conclave sur l'avenir des retraites, ou “délégation paritaire permanente retraite”, signe l'échec de la tentative du gouvernement de faire endosser largement des décisions douloureuses pour l'évolution de la protection sociale de la population et la réduction des déficits...

Avis d’extension d’un avenant à un accord frais de santé dans la CCN polyculture élevage de la Manche

La ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, envisage d’étendre, par avis publié le 19 mars 2025, les dispositions de l’avenant n° 7 du 4 octobre 2024 à l'accord collectif départemental instituant un régime complémentaire frais de santé pour les salariés non cadres relevant des exploitations de « polyculture-élevage » du département de la Manche (...

Avis d’extension d’un avenant à un accord de prévoyance dans les CCN polyculture horticulture et CUMA de la Mayenne

La ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, envisage d’étendre, par avis publié le 19 mars 2025, les dispositions de l’avenant n° 7 du 3 octobre 2024 à l'accord de prévoyance interprofessionnel des salariés non cadres des exploitations de polyculture et d'élevage, de maraichage, d'horticulture, de pépinières, des entreprises de travaux agricoles et ruraux et des coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA)...

Avis d’extension d’un avenant à un accord de prévoyance dans les exploitations et entreprises sylvicoles des Pays de la Loire

La ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, envisage d’étendre, par avis publié le 19 mars 2025, les dispositions de l’avenant n° 6 du 26 septembre 2024 à l'accord régional instituant une prévoyance complémentaire en agriculture pour les salariés non cadres des exploitations et entreprises sylvicoles de la région des Pays de la Loire (...