Accès à l’emploi : une reprise qui ne profite pas pleinement aux personnes éloignées du marché du travail

Le marché du travail s’est nettement amélioré au cours des dix dernières années, mais cette dynamique ne profite pas à tous. Dans une étude récente, la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) montre que les personnes les plus éloignées de l’emploi peinent encore à y accéder de manière durable.

L’étude porte sur des groupes identifiés pour leur moindre accès au travail : mères isolées avec jeunes enfants, personnes peu diplômées, étrangers hors Union européenne et individus en mauvaise santé. En croisant les données d’enquêtes emploi entre 2015 et 2024, elle évalue dans quelle mesure ces catégories ont pu profiter de la dynamique positive du marché du travail.

L’accès au travail reste très inégal selon les profils

Entre 2015 et 2024, le taux d’emploi des 15-64 ans (hors étudiants et retraités) a progressé de 3,8 points, pour atteindre 80,1 % en 2024. Cette dynamique est indéniable. Mais elle masque d’importantes disparités.

Les personnes cumulant certaines caractéristiques socio-économiques spécifiques restent nettement en retrait. En 2024, le taux d’emploi des mères isolées avec enfant de moins de 6 ans est inférieur de 23,8 points à la moyenne. Même constat pour les étrangers hors Union européenne (‑22,6 points) et les personnes peu ou pas diplômées (‑22,5 points). Quant aux individus en mauvaise santé, leur taux d’emploi est en retrait de 9,7 points.

L’étude montre aussi que les effets sont cumulatifs : les personnes présentant deux de ces caractéristiques ou plus ne sont que 49,4 % à être en emploi, soit 30,7 points de moins que la moyenne nationale.

Une amélioration du travail qui ne bénéficie pas à tous

Tous les groupes identifiés connaissent une progression de leur taux d’emploi depuis 2015, mais à des rythmes très différents.

Les étrangers hors UE enregistrent la plus forte hausse (+9,4 points). Les personnes en mauvaise santé progressent de +5,1 points, et les mères isolées avec jeunes enfants de +4,7 points. En revanche, les personnes peu ou pas diplômées voient leur taux d’emploi à peine progresser (+1,3 point), ce qui les place en décalage avec le reste de la population.

Cette faible progression s’explique en partie par la baisse de leur poids dans la population active (21,4 % en 2015, 16,3 % en 2024) et par un effet de signal négatif du faible niveau de diplôme dans un contexte de généralisation des études supérieures.

Les formes d’absence du travail se diversifient

L’étude ne se limite pas à l’emploi. Elle détaille aussi les situations de chômage, de « halo du chômage » (personnes souhaitant travailler mais non disponibles ou ne recherchant pas activement) et d’inactivité hors halo.

Certaines populations se retrouvent sur-représentées dans ces zones grises du marché du travail. Les mères isolées avec un enfant de moins de 3 ans cumulent un taux d’emploi très faible (‑31,1 points), une surreprésentation dans le halo (+14,7 points) et parmi les inactifs hors halo (+13,1 points).

Pour les personnes en mauvaise santé ou sans diplôme, le principal facteur d’éloignement reste l’inactivité hors halo. Quant aux étrangers hors UE, c’est le chômage qui pèse le plus fortement (+4,4 points par rapport à la moyenne), même si leur taux d’activité progresse.

Des écarts structurels toujours visibles

Même à caractéristiques égales, certains profils restent nettement désavantagés dans leur accès au travail. La régression logistique menée par la Dares le confirme. Les personnes peu ou pas diplômées ont une probabilité d’être en emploi inférieure de 24 points à celle des diplômés du baccalauréat ou plus. Les étrangers hors Union européenne présentent un écart défavorable de 17 points par rapport aux personnes de nationalité française. Les personnes en mauvaise santé sont également pénalisées, avec une probabilité d’accès au travail inférieure de 13 points. Enfin, les mères isolées ayant un enfant de moins de 6 ans présentent un écart négatif de 12 points.

Ces écarts ont légèrement diminué entre 2015 et 2024 pour les étrangers et les personnes en mauvaise santé. En revanche, pour les personnes peu ou pas diplômées, l’amélioration n’est pas significative.

Une inclusion partielle malgré la conjoncture favorable

En conclusion, la Dares montre que la reprise du marché du travail depuis 2015 n’a que partiellement réduit les inégalités d’accès à l’emploi. Si certains groupes en ont profité, d’autres restent durablement à l’écart.

Rendre le travail accessible ne peut se limiter à créer des postes : il faut lever les freins périphériques (santé, garde d’enfants, formation, transports), lutter contre les discriminations, et adapter les conditions d’emploi aux besoins des publics fragiles. Faute de quoi, le travail restera une promesse inégalement tenue.

Retrouvez la publication complète de la Dares ci-après :

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