Les débats relatifs au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (PLFSS 2025) ont épuisé le temps imparti, mardi 5 novembre à minuit. Les députés n’ont même pas eu le temps d’examiner les articles 19 à 32 du projet de loi. Il ne faut pas pour autant considérer que tous les amendements adoptés à l’Assemblée nationale sont jetés à la poubelle, loin de là. C’est pourquoi il est utile de bien les connaître.
Au milieu de la nuit dernière (du 5 au 6 novembre), la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement, Nathalie Delattre, a enclenché la procédure prévue par l’article 47-1 de la Constitution. Cette procédure prévoit que si les députés n’ont pas respecté le délai de 20 jours pour discuter du PLFSS, le gouvernement transmet sa version au Sénat qui a alors 15 jours pour débattre. Or, la ministre précise que cette version du texte intégrera tous les amendements adoptés en séance publique que le gouvernement jugera utiles. Partant de là, plusieurs amendements essentiels pour les organismes complémentaires d’assurance maladie (Ocam) pourraient peut-être demeurer dans la version du PLFSS transmis au Sénat, voici lesquels.
Les amendements les plus susceptibles d’être retenus dans le PLFSS transmis au Sénat
Quelques thèmes importants pour les Ocam ont fait l’objet d’amendements adoptés par les députés qui ont quelques chances de se trouver dans la version du PLFSS transmise par le gouvernement au Sénat. Ces apports concernent la lutte contre la fraude, le dispositif “Mon soutien psy”, la prévention dentaire, l’option de pratique tarifaire maîtrisée (Optam) ainsi que les soins en centres de santé et de médiation en santé sexuelle (CSMSS).
Sur la lutte contre la fraude, c’est un amendement du gouvernement (2338) qui est intéressant. Il étend les pouvoirs de communication des directeurs et agents des organismes de recouvrement. Cela doit permettre de faciliter l’identification des auteurs de fraudes et l’engagement d’actions répressives à leur encontre selon l’exposé des motifs. In fine, cette lutte renforcée contre la fraude aux prestations sociales devrait impacter positivement les Ocam.
Sur le dispositif “Mon soutien psy”, 4 amendements identiques émanant du gouvernement et des groupes Horizons, Ensemble, Les Démocrates (2437, 2442, 2444 et 2446) suppriment la condition d’adressage préalable actuellement en vigueur. Autrement dit, ces amendements permettent aux patients d’aller voir un psychologue conventionné sans avoir consulté préalablement un autre professionnel de santé.
S’agissant de la prévention dentaire, un duo d’amendements du gouvernement et du groupe Les Démocrates (2438 et 2445) rend l’examen de prévention bucco-dentaire obligatoire chaque année (au lieu de tous les 3 ans) pour les assurés de 3 à 24 ans. Surtout, ces amendements impliquent désormais les Ocam dans la prise en charge de cette prévention pour leur faire participer à hauteur de 40% BRSS. Rappelons que cette prévention est initialement remboursée intégralement par l’assurance maladie. De plus, les 2 amendements imposent le tiers payant sur ces examens de prévention.
En matière d’Optam, c’est un amendement venant du groupe Ensemble (2011) qui pourrait être conservé par le gouvernement. Les députés y proposent la révision des conditions d’adhésion à l’Optam tout en faisant en sorte de limiter les dérives tarifaires des professionnels adhérents de secteur 2.
Enfin, deux amendements du gouvernement et Ensemble (2232 et 2318) actent la suppression du ticket modérateur pour tous les patients pris en charge dans les CSMSS. Les Ocam n’auront donc plus à participer aux soins concernés.
Les 5 thèmes dont les amendements ne seront probablement pas conservés dans le PLFSS par le gouvernement
Au-delà des amendements vus précédemment, de nombreuses autres modifications adoptées par les députés sur le PLFSS 2025 ne devraient pas être gardées par le gouvernement. Mais le doute reste permis et il est utile de les connaître.
La hausse contrecarrée du ticket modérateur dans le PLFSS 2025
Les premiers amendements qui nous intéressent sont évidemment ceux qui contrecarrent la hausse du ticket modérateur chez le généraliste et les sages-femmes en 2025. Ces amendements modifient l’annexe à laquelle fait référence l’article 14 du PLFSS (231, 1526, 1589), mais l’un d’entre eux est aussi positionné après l’article 18 (230).
La TSA réduite dans 2 cas de figure
Puis 2 types d’amendements ont été adoptés par les députés pour abaisser le taux de la taxe de solidarité additionnelle (TSA) sur les contrats de complémentaire santé. Les uns (664, 968, 1786 et 2123) proposent une TSA à 7,04% pour les contrats qui ne bénéficient pas d’un avantage fiscal ou qui ne bénéficient pas d’une prise en charge par l’employeur. L’autre (1442) prévoit une TSA à 10,27% sur les contrats qui prennent en charge des thérapeutiques non médicamenteuses validées par la Haute autorité de santé comme l’activité physique ou la diététique.
Le Rac0 élargi aux fauteuils roulants
Vient ensuite l’inclusion des fauteuils roulants dans le panier du reste à charge zéro (Rac0 ou 100% santé) par un amendement d’appel venant des bancs socialistes (694). Les députés rappellent au gouvernement la promesse d’Emmanuel Macron d’inclure les fauteuils roulants dans le panier 100% santé. Si cet appel était entendu par le gouvernement en 2025, cela serait une nouvelle charge indéniable pour les Ocam.
La résistance face au risque de déremboursement des cures thermales
Les cures thermales sont aussi visées par plusieurs amendements (dont l’un provient des bancs Ensemble). Ces amendements limitent la remise en cause du remboursement des cures thermales par la sécurité sociale (2414, 2429 et 2452). Pour cela, ils soumettent la révision du taux de prise en charge à la consultation préalable de tous les acteurs du secteur des cures thermales. Le n° 2452 va même plus loin en précisant que l’avis de ces acteurs est opposable à l’assurance maladie. Un autre amendement (2415) confie au service du contrôle médical de l’assurance maladie le soin de donner l’avis médical pour définir sur les cures thermales sont remboursées ou non. En effet, ce service est indépendant des caisses primaires selon l’exposé des motifs de l’amendement.
L’évaluation négative de “Mon soutien psy”
Enfin, un amendement relatif au dispositif “Mon soutien psy” adopté à l’initiative de LFI (1246) demande la remise d’un rapport en vue d’un démantèlement. Le rapport dont la demande est insérée après l’article 17 du PLFSS 2025 vise à faire un bilan pour constater l’échec de “Mon soutien psy”. L’objectif est d’y mettre fin pour flécher les financements vers le recrutement de psychologues dans les centres médico-psychologiques et médico-psychopédagogiques et vers la revalorisation des salaires.
La version du PLFSS 2025 finalement retenue par le gouvernement en vue des débats au Sénat devrait être mise en ligne prochainement, nous ne manquerons pas de l’examiner de près.