Le projet de loi qui instaure le passe sanitaire dans certains lieux et une obligation vaccinale pour les professionnels de santé (au sens large) est discuté aujourd’hui à l’Assemblée. Cette loi fait peser sur certains employeurs un risque de sanction pénale (amende, voire peine de prison) s’ils ne contrôlent pas leurs salariés. Il faut bien distinguer deux situations en fonction de l’activité exercée.
La loi en discussion a déjà été légèrement modifiée en commission, sans grand impact sur les mesures qui nous intéressent. Les employeurs, qu’ils soient publics ou privés seront concernés dès le 30 août (si la loi est votée et appliquée en retenant ces mesures). D’un côté, tous les employeurs intervenant dans 6 domaines d’activité (voir encadré ci-dessous) devront veiller au respect du passe sanitaire par leurs salariés. De l’autre, tous les employeurs agissant dans le domaine de la santé sont chargés de contrôler le respect de l’obligation vaccinale par les personnes placées sous leur responsabilité.
Bon à savoir : les 6 domaines d'activité concernés par le passe sanitaire sont les activités de loisirs ; les activités de restauration (sauf restauration collective et professionnelle routière) ; les activités de foires et salons professionnels ; les activités des services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux pour les accompagnants, visiteurs et patients accueillis pour des soins programmés (sauf cas d'urgence) ; les activités de transport public de longue distance (sauf urgence) ; les activités des grands magasins et centres commerciaux.
L’obligation de contrôle du passe sanitaire (et ses conséquences) pèse directement sur l’employeur
L’article 1er de la loi relative à la gestion de la crise sanitaire n’écrit pas littéralement que chaque employeur des secteurs concernés par le passe sanitaire est obligé de contrôler ses salariés. Le texte est plus insidieux que cela.
Il nous explique d’abord ce que risque le salarié s’il “ne présente pas les justificatifs, certificats ou résultats dont [les] dispositions lui imposent la présentation“. Il risque d’être suspendu de ses fonctions par son employeur le temps qu’il obtienne son passe sanitaire. A terme, après 2 mois de suspension (non rémunérée), il pourrait être licencié. Arrêtons-nous sur le terme “présente” utilisé par la loi. Pour que le salarié présente son passe sanitaire, il faut que quelqu’un le lui réclame. En toute logique, cela devrait être à l’employeur d’effectuer ce contrôle, sauf que cette mission ne lui est pas clairement confiée par la loi !
Ces nouveaux types de licenciements seront-ils valides ? La défenseure des droits a mis en garde contre cette nouvelle possibilité de licencier des salariés pour un motif discriminatoire. Le fait de pouvoir licencier un salarié au motif qu'il ne serait pas détenteur d'un document revient à opérer une distinction qui s'apparente à de la discrimination entre ceux qui ont le passe sanitaire et ceux qui ne l'ont pas.
Le texte du projet de loi nous informe aussi que si un employeur ne contrôle pas la bonne détention du passe sanitaire, il pourra être puni d’une amende. Si le non-contrôle est constaté 3 fois en 30 jours, la sanction pourra atteindre 1 an de prison et 9 000 € d’amende. Ici encore, on comprend que l’employeur risque gros s’il ne contrôle pas le passe sanitaire, bien que cette obligation de contrôle ne soit pas explicitement établie.
Le contrôle de l’obligation vaccinale est aussi mis à la charge de l’employeur
Avec l’avis rendu par le Conseil d’Etat, la rédaction des mesures portant sur l’obligation vaccinale a légèrement changé. En effet, la loi ne mentionnait pas clairement que les employeurs des personnels concernés par l’obligation vaccinale ont l’obligation de les contrôler. Contrairement aux mesures liées à l’obligation de contrôle du passe sanitaire qui, elle, doit être déduite de la loi, l’obligation de contrôle de la vaccination du personnel travaillant dans le domaine de la santé doit être explicité.
Ni une, ni deux, le projet de loi finalement adopté en Conseil des ministres et discuté à l’Assemblée nationale indique désormais que :
Les employeurs sont chargés de contrôler le respect de l’obligation [vaccinale] par les personnes placées sous leur responsabilité
Article 6, IV du projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire.
Si les personnes concernées ne justifient pas de leur vaccination dès le lendemain de la loi, elles ne pourront plus exercer à moins de présenter un test négatif. Puis l’obligation de vaccination deviendra totalement obligatoire le 15 septembre 2021, même si la personne présente un test négatif.
Comme pour le passe sanitaire, le salarié qui refusera de présenter son attestation de vaccination sera suspendue (sans rémunération) et pourra être licenciée après 2 mois d’inactivité. L’amende et l’éventuelle peine de prison qui pèsent sur l’employeur qui ne contrôlera pas ses salariés sera identique à celle liée au passe sanitaire.