Le sujet de l’augmentation des franchises médicales pour trouver des économies dans le budget de la sécurité sociale n’est pas enterré, loin de là. Alors que le thème est totalement absent du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 (PLFSS 2024), le ministre de la santé Aurélien Rousseau vient de confirmer que le projet est prêt à être mis en œuvre par voie réglementaire.
C’est à l’occasion de son audition par la commission des affaires sociales du Sénat, le jeudi 26 octobre 2023, que le ministre de la santé a rappelé la position du Gouvernement. Celui-ci est favorable à la hausse des franchises et tout est même déjà instruit et prêt à être mis en œuvre. L’intervention d’Aurélien Rousseau, reproduite ci-dessous, est intéressante car il laisse croire que des barrières insurmontables doivent être franchies pour justifier qu’aucune feuille de route claire sur le sujet n’est prévue. La déclaration du ministre de la santé est d’autant plus surprenante que deux jours auparavant, en séance publique à l’Assemblée, M. Rousseau affirmait que “une analyse plus globale [devait être menée], notamment au regard des conséquences sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens“.
La décision d’augmenter les franchises médicales aurait pourtant mérité de figurer dans le PLFSS 2024 car elle fait partie intégrante du plan d’économies prévu par le Gouvernement. Pour justifier ce procédé parallèle et les tergiversations des différents ministres sur le sujet, Aurélien Rousseau évoque les “4 mois de consultations à mettre en œuvre devant un tas d’organismes” et estime que la mesure ne peut pas être appliquée “sans être allé au bout, y compris de l’examen et des débats sur le PLF“. Cette justification est difficile à entendre dès lors que le délai des 4 mois de consultations qui semble incompressible n’empêche pas le Gouvernement d’avoir déjà pris la décision d’appliquer la hausse des franchises médicales.
D’autre part, sur le besoin d’aller au bout des débats à l’Assemblée nationale et au Sénat, on voit difficilement comment il peut y avoir un débat avec l’usage systématique de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution qui ferme la porte à tout échange entre élus. Ces derniers réclamaient d’ailleurs en séance publique, des informations sur le sujet pour en débattre, à l’image notamment de Yannick Neuder (LR).
j’aimerais que le ministre de la santé, dont je regrette l’absence, nous donne une position claire sur les franchises médicales s’appliquant aux médicaments et aux consultations. Jusqu’à présent, c’est une belle nébuleuse qui nous a été présentée.
Intervention de Yannick Neuder lors de la séance publique du mercredi 25 octobre 2023
D’autres députés étaient tout autant méfiants, comme Jérôme Guedj (Socialiste) ou Pierre Darrhéville (Nupes) qui n’ont cessé de relancer le Gouvernement sur le sujet :
Dans l’Ondam 2024, vous avez intégré 1,3 milliard de mesures dites de responsabilisation : 500 millions pour les soins dentaires, dispositions déjà entrées en vigueur ; 800 millions au titre des franchises médicales. Selon les informations en ma possession depuis ce matin, il existe parmi les différents scénarios envisagés pour ces dernières une option 1 qui prévoit le doublement des franchises existantes sur les médicaments, les actes paramédicaux, les transports sanitaires pour un montant de 360 millions d’euros et le doublement des participations forfaitaires sur les actes médicaux, les analyses de biologie médicale et les examens de radiologie pour un montant de 440 millions d’euros.
Intervention de Jérôme Guedj lors de la séance publique du mercredi 25 octobre 2023
Monsieur le ministre délégué, vous avez affirmé que l’évolution des franchises était envisagée et que vous ne vous en cachiez pas. Cela ne saurait suffire à nous informer dans le cadre de l’examen du PLFSS. Dites-nous donc clairement ce que vous avez en tête et ce que vous comptez faire !
Intervention de Pierre Dharréville lors de la séance publique du mercredi 25 octobre 2023
Finalement, en l’absence d’Aurélien Rousseau, c’est Thomas Cazenave, ministre délégué aux comptes publics, qui affirmait :
je vous redis que les mesures relatives aux franchises et participations forfaitaires relèvent du domaine réglementaire. Vous le savez d’ailleurs très bien. À ce titre, elles doivent faire l’objet de consultations et concertations préalables avec un certain nombre d’acteurs – là encore, vous le savez très bien. Au nom du respect des procédures que nous nous sommes nous-mêmes fixées, je ne peux donc pas m’engager ici.
Intervention de Thomas Cazenave lors de la séance publique du mercredi 25 octobre 2023
Malgré ces louvoiements à répétition du Gouvernement, il ne fait donc aucun doute que les franchises médicales augmenteront, reste à savoir exactement sur quelles prestations.
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