Sécurité sociale : la Cour des Comptes décrit un océan de déficits

La Cour des Comptes vient de publier l’édition 2023 de son rapport annuel sur l’application des lois de financement de la Sécurité sociale, dans lequel elle “éclaire […] la situation financière de la sécurité sociale en 2022, notamment dans le champ des dépenses d’assurance maladie, et ses perspectives pour 2023 et les années ultérieures”.

La Cour des Comptes y pointe notamment du doigt le fait que, malgré les tours de vis opérés ou en cours de réalisation dans les différentes branches de la Sécurité sociale afin de durcir les conditions de prise en charge des assurés, ses perspectives sont à l’accumulation des déficits.

Des déficits structurels par dizaines de milliards pour la Sécurité sociale

Dans son rapport, la Cour des Comptes décrit une trajectoire comptable lourdement déficitaire à moyen terme pour la Sécurité sociale. Après un déficit d’un peu plus de 8 milliards d’euros en 2023, elle devrait en connaître un de près de 10 milliards l’an prochain, puis son solde devrait plonger encore davantage, au-delà de – 13 milliards d’euros en 2025 et 2026. D’après la Cour des Comptes, d’ici 2026, la Sécurité sociale devrait donc générer un endettement supplémentaire de près de 45 milliards d’euros. Comme elle le met en avant, deux branches de la Sécurité sociale contribuent notamment à ce creusement des déficits et de l’endettement : la branche maladie et la branche retraite – les branches famille et AT/MP étant pour leur part structurellement excédentaires.

Une nette dégradation pour les comptes de la retraite

S’agissant des comptes de la branche retraite de la Sécurité sociale et du FSV, la Cour des Comptes montre que la réforme des retraites récemment menée par l’exécutif ne permet pas d’assurer leur équilibre à long terme. En effet, à horizon 2030, non seulement le solde de cette branche n’est jamais prévu pour repasser dans le vert mais, plus problématique encore, il est prévu pour être lourdement déficitaire, entre 6 et 9 milliards d’euros par an.

La rue Cambon relève d’ailleurs que la réforme des retraites ne permettra de réaliser des économies qu’à compter de 2025. “À horizon 2030, sous les hypothèses favorables d’une productivité augmentant de 1 % par an (soit plus que les 0,7 % constatés en moyenne ces dix dernières années) et d’un taux de chômage ramené à 4,5 % (7,2 % à fin 2022), l’impact net sur les soldes de la branche vieillesse des régimes obligatoires de base et du FSV serait de 7,1 Md€” précise-t-elle au sujet de la réforme.

Une trajectoire trop optimiste sur la maladie ?

Concernant la branche maladie de la Sécurité sociale, la Cour des Comptes rapporte, certes, l’amélioration progressive de son solde sur laquelle table le gouvernement. Après avoir atteint des niveaux de déficits inédits entre 2020 et 2022 – entre 20 et 30 milliards d’euros – l’assurance maladie devrait passer sous les 10 milliards de déficits en 2023, avant de voir sa situation comptable s’améliorer d’ici 2026, passant sous le seuil des 5 milliards d’euros de déficits.

Pour les magistrats de la rue Cambon, cette trajectoire semble toutefois, hélas, irréaliste – “particulièrement ambitieuse” dit-elle en l’occurrence. Elle suppose en effet des ONDAM durablement proche du niveau de l’inflation, ce qui n’est pas chose commune. “L’hypothèse concernant l’évolution de l’Ondam, hors crise sanitaire, apparaît particulièrement ambitieuse. Sa progression moyenne annuelle sur la période 2023-2026 serait de 2,9 %, soit à peine plus que l’inflation (2,8 %). Dans le passé, jamais une telle modération n’a pu être obtenue sur plusieurs années” écrivent-ils. Ils estiment d’ailleurs d’autant plus improbable une telle modération budgétaire tendancielle que, dans un contexte de tensions fortes et grandissantes sur l’offre de soins, l’heure est à l’amélioration des conditions de rémunérations des professionnels de santé.

Vers une rigueur budgétaire encore accrue

Dans une telle configuration d’ensemble, la Cour des Comptes formule de nombreuses préconisations destinées à rectifier le tir budgétaire de la Sécurité sociale. La plupart de ces propositions concerne l’assurance maladie – imagerie médicale, radiothérapie organisation du SAMU, modalités de recours aux ambulances, entre autres – mais certaines concernent également la branche retraite, notamment le régime des marins et les droits familiaux et pensions de réversion. Autrement dit, alors que les réformes de reflux des droits sociaux existants se multiplient ces dernières années à la Sécurité sociale, en matière de prestations familiales, de retraite ou de maladie – les fameux transferts de charges vers les organismes complémentaires d’assurance maladie – la Cour des Comptes annonce de nouveaux lendemains qui déchantent pour les assurés sociaux.

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmarkClose
0 Shares:
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pourriez aussi aimer
agriculture
Lire plus

PSC : l’Agriculture prête pour 2025 (au prix d’une pratique restrictive du dialogue social)

Le ministère de l'Agriculture, de la Souveraineté Alimentaire et de la Forêt (MASAF) a arrêté le choix de son futur opérateur de prévoyance complémentaire : comme l'ont annoncé nos confrères de Newsassurancespro, il s'agit d'Harmonie Mutuelle et de Mutex - autrement dit de l'environnement mutualisation du groupe Vyv. ...
Lire plus

PLFSS 2025 : le Sénat soulage les vendeurs de prothèses auditives

Lors de ses derniers débats le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (PLFSS 2025), le Sénat s'est penché un instant sur le sujet des prothèses auditives. Rappelons que la version du projet de loi transmise par le gouvernement aux sénatrices et sénateurs contient un article 9 quater. Cet article taxe les publicités pour les prothèses auditives à hauteur de 40%,...

MGEN (groupe VYV) accueille le nouveau conseiller de son président

Ce communiqué a été diffusé par MGEN (groupe VYV). Après un Bafa et quelques années de pionnicat en parallèle de sa licence de lettres modernes, Alexandre Dimeck-Ghione exerce le métier de coordinateur d'assistance pour le compte de Mondial Assistance de 2012 à 2017. En 2017, il rejoint la direction qualité de AWP (Allianz Worldwide Partners) comme expert de la relation client. En janvier 2020, Alexandre rejoint le...