Dans le BTP, FO s’oppose à la reprise du travail

Cet article provient du site du syndicat de salariés FO.

Un guide de bonnes pratiques sanitaires dans le secteur de la construction a été publié le 3 avril avec l’aval du gouvernement. Il pousse à la relance de l’activité sur les chantiers, quasiment à l’arrêt depuis le début du confinement mi-mars. FO, qui estime que la vie des travailleurs est mise en danger, refuse toute reprise du travail hors des missions essentielles à la Nation. 

Nos organisations refusent une reprise du travail dans le BTP et dans les carrières, les tuiles et briques, les cimenteries, les négoces de matériaux, préviennent quatre organisations syndicales de la construction, dont FO, dans un communiqué commun du 3 avril. Ce même jour, l’OPPBTP, organisme deprévention du secteur, a publié un « Guide de préconisations de sécurité sanitaire pour la continuité des activités de la construction en période d’épidémie de Coronavirus Covid-19 ». Ce document, qui liste les mesures à adopter pour relancer l’activité tout en protégeant la santé des travailleurs, a obtenu l’aval des organisations patronales et l’accord du gouvernement. Il va être diffusé à toutes les entreprises de construction. Il permet donc officiellement la reprise des chantiers, quasiment à l’arrêt depuis trois semaines, sauf travaux urgents. 

Mais à l’exception de la CFDT, les organisations syndicales représentatives du secteur, parmi lesquelles la fédération FO-Construction, estiment que ce guide mettra de côté la santé et des vies en danger. Le document préconise notamment l’application des gestes barrières et le port d’un équipement de protection individuel. Mais le respect d’une distance d’au moins un mètre entre deux personnes est difficilement applicable sur un chantier.Il ne peut y avoir de chantiers sans proximité des travailleurs entre eux, dans les déplacements, dans le travail, dans les pauses, alerte dans un tract le syndicat FO des personnels de l’équipement et de l’environnement (SNP2E-FO). Et comment fournir des masques aux ouvriers alors que les professionnels de santéen manquent déjà ? 

 

Appel au droit de retrait

Les organisations syndicales du secteur n’ont pas été associées à la rédaction du guide et expliquent avoir été mises à contribution quand tout était déjà plié. Elles dénoncent un manque de clarté dans les mesures de sécurité à prendre et des formulations non contraignantes comme : il est recommandé, dans la mesure du possible, ou selon disponibilité. Le guide impose aussi un nettoyage toutes les deux heures, mais sans préciser qui doit le faire, l’employeur, le salarié ou une entreprise spécialisée. Selon ces syndicats, l’objectif de ce document est bien de faire reprendre l’activité en protégeant juridiquement les employeurs, au mépris de la santé des salariés. 

Parmi leurs revendications, les organisations syndicales auraient souhaité que le guide mentionne une reprise de l’activité seulement pour les travaux urgents, que cette reprise se fasse en accord avec la CSSCT ou les élus de chaque entreprise, ou rende obligatoire le dépistage à l’entrée des chantiers. 

Elles appellent donc les salariés à rester chez eux ou, à défaut, à utiliser leur droit de retrait en l’absence d’EPI [équipement de protection individuelle, NDLR] nécessaire ou dans l’impossibilité d’exécuter les gestes barrières, ou s’ils se sentent en danger. Les organisations syndicales préviennent qu’elles seront impitoyables si elles estiment qu’un employeur a mis en danger la vie d’autrui. 

La fédération FO-Construction avait déjà appelé, le 27 mars, à un droit de retrait général tous les salariés du secteur confrontés à un risque de contamination. Elle dénonçait ainsi des corrections inadmissibles apportées par l’exécutif à une première version du guide, à la rédaction de laquelle les syndicats avaient cette fois été associés. Toute mention obligeant à stopper l’activité quand les préconisations nécessaires pour assurer la santé et la sécurité des salariés ne sont pas respectées avait par exemple disparu dans cette version. 

 

FO refuse une relance de l’activité pour motif économique

Le gouvernement pousse à la reprise de l’activité dans le secteur. On a besoin de ces activités, notamment pour la maintenance de nos réseaux, de noscentrales nucléaires, de nos éoliennes, a déclaré Élisabeth Borne, ministre de la Transition écologique, lors d’une audition au Sénat le 2 avril. 

Début avril, les pouvoirs publics ont envoyé une circulaire aux préfets afin qu’ils veillent à la poursuite et à la reprise des chantiers, en appliquant le guide des bonnes pratiques. L’objectif est bien sûr d’assurer les services publics nécessaires à la poursuite des activités indispensables, mais aussi d’éviter une mise à l’arrêt totale des chantiers, pour ne pas déstabiliser non seulement les entreprises concernées, mais aussi l’ensemble de la chaîne économique. 

Il est ainsi demandé aux préfets d’œuvrer autant que possible à la reprise des chantiers interrompus, quel que soit le secteur, et de préparer la reprise rapide de l’intégralité des chantiers à la sortie de l’état d’urgence sanitaire. 

Dans la Fonction publique, nous sommes attachés à la continuité des services publics pour les missions essentielles, mais les agents doivent intervenir en étant protégés, explique Laurent Janvier, secrétaire fédéral à la FEETS-FO, la fédération de l’Équipement, de l’Environnement, des Transports et des Services. 

La reprise ne doit pas être justifiée par un motif économique. On ne va pas envoyer nos agents ni les salariés du privé au casse-pipe. Sur les routes, le fauchage ou le renouvellement programmé des couches de roulement ne sont pas urgents, sauf si ça pose un problème de sécurité, poursuit-il. 

 

Définir quelles sont les missions essentielles

Selon Laurent Janvier, toutes les entreprises ne sont pas volontaires pour reprendre l’activité et le guide des bonnes pratiques leur donne mauvaise conscience. Et il donne un blanc-seing aux autres.  

Le 6 avril, une motion présentée par deux syndicats dont FO a été adoptée en comité technique ministériel contre la reprise du travail dans les activités non essentielles, en particulier au sein des directions interrégionales des routes (DIR) et du secteur maritime. Les syndicats exigent que l’administration assure la sécurité des personnels en fournissant les moyens de protection nécessaires (gants, masques FFP2, gel hydroalcoolique, tests…) à l’exécution des missions essentielles. 

Cette motion a également rappelé l’avis unanime du CHCTM du 27 mars, demandant notamment l’ouverture de négociations sur la définition des missionsessentielles. 

Actuellement, les chantiers n’ont pas encore démarré. Nous en sommes au stade où chaque direction de DIR tâte le terrain, indique Laurent Janvier. Savoir s’il y a assez de masques, quels gestes barrières adopter…, ce sont des questions qui se poseront à la fin, quand le chantier sera jugé nécessaire. Chaque CHSCT des DIR devrait être consulté et nous allons demander au niveau central d’être informés sur chaque chantier. 

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