Retraites : les réactions syndicales au discours d’Edouard Philippe

Cette revue de presse regroupe les publications parues sur les sites d’une organisation représentative d’employeurs (U2P) et d’organisations représentatives de salariés (CFE-CGC, FO, UNSA, CGT, CFDT) à la suite du discours d’Edouard Philippe sur le contenu de la réforme des retraites.

 

L’U2P salue le projet de réforme mais regrette le peu de place accordée aux professions libérales

Pour l’U2P, la France doit nécessairement s’engager dans un processus de réforme des retraites avec deux priorités majeures : 

  • pérenniser et garantir cette forme de protection sociale mise en place après la Seconde Guerre mondiale, qui maintient la solidarité entre les générations et qui est indispensable à toute société ;
  • sauvegarder un niveau de pension permettant aux Français de vivre pleinement leurs années de retraite et de contribuer à la croissance économique.

Les grands axes de la réforme présentés par le Premier ministre répondent à ces objectifs. Ainsi, en dépit de certaines réserves, l’U2P salue l’équilibre général du projet et constate avec satisfaction que la plupart des revendications que ses représentants ont porté pendant deux années seraient prises en compte. 

Compte tenu des spécificités de leurs régimes actuels les travailleurs indépendants étaient particulièrement en risque face à la réforme. Or, l’U2P a obtenu satisfaction sur plusieurs points. 

L’assiette des prélèvements sociaux des travailleurs indépendants va être revue à la baisse de façon à annuler la hausse du taux de cotisation des artisans et commerçants (de 24,75% à 28,12%) induite par la réforme. Par contre, ces propositions sont insuffisantes pour amortir la hausse des cotisations applicables aux professionnels libéraux (de 14% à 28,12% pour les avocats et les infirmières libérales notamment) et la baisse de leurs pensions. Un étalement sur 15 ans de l’application de la réforme ne permettra pas d’en limiter suffisamment l’impact. 

Une négociation avec les représentants des professions libérales devra être conduite le plus rapidement possible afin de trouver des mesures complémentaires destinées à limiter la hausse de leurs cotisations et la baisse prévisible du rendement de leurs retraites. 

Par ailleurs, l’U2P se félicite du relèvement à 1000 euros de la pension de retraite minimale, mesure qu’elle réclame depuis plusieurs années pour mettre fin à la situation de nombreuses personnes qui ont travaillé toute leur vie et qui ont la durée de cotisation requise mais qui se retrouvent avec quelques centaines d’euros pour vivre au même titre que des personnes éligibles aux minima sociaux. 

Le maintien du système des carrières longues permettant à ceux qui ont commencé à travailler tôt de partir entre 60 et 62 ans est également une mesure de bon sens. 

De même, la réforme prévoit de maintenir pour les travailleurs indépendants les réserves des régimes complémentaires. 

L’U2P approuve la décision de confier la gouvernance du système de retraites aux partenaires sociaux. C’était la condition pour ne pas risquer une remise en cause des grands équilibres du système de retraite à chaque alternance politique et c’est la reconnaissance de la qualité de la gestion notamment de l’Agirc et de l’Arrco par les partenaires sociaux. 

Ceux-ci auront la responsabilité de fixer par la négociation l’âge d’équilibre de départ à la retraite en deçà duquel la pension subira une décote et au-delà duquel un bonus sera au contraire appliqué. L’U2P a confiance dans les partenaires sociaux pour parvenir à trouver cet équilibre. 

Dans ce contexte, l’U2P appelle les organisations à l’origine des grèves et des manifestations de ces derniers jours, à trouver d’autres formes de contestation qui ne soient pas de nature à limiter l’accès des Françaises et des Français aux entreprises de proximité, singulièrement en cette période de fêtes. 

Selon Alain Griset, président de l’U2P : « Il est très important que notre système de retraite trouve les voies de sa pérennité et que l’entrée des travailleurs indépendants dans ce régime universel ne se fasse pas à leur détriment. Sur ces deux points, je considère que la réforme présentée par le Premier ministre est plutôt de nature à nous rassurer. Je m’engage à poursuivre pied à pied la concertation avec le Gouvernement et le parlement pour en améliorer les modalités de mise en œuvre, particulièrement pour les professions libérales. » 

Edouard Philippe convainc la CFE-CGC de rejoindre la grève intersyndicale du 17 décembre

La CFE-CGC, qui n’a jamais caché son inquiétude face à ce projet de réforme dangereux et inutile, s’était associée à la manifestation du 5 décembre en espérant faire revenir le gouvernement à la raison et à la table des négociations. 

Le Premier ministre a dévoilé au CESE les grandes lignes et principes de la réforme des retraites. Le gouvernement maintient quasiment l’intégralité des principes du rapport Delevoye, apporte peu ou pas de précisions sur les sujets sensibles et réussi le tour de force de se mettre la totalité des organisations syndicales à dos ! C’est peu dire que nous n’avons été ni entendus ni compris. 

Nettoyé des longs développements démagogiques et quasiment incantatoires sur la justice et l’universalité, il reste du discours une réaffirmation de la mise en place d’un régime par points, d’une pseudo gouvernance par les partenaires sociaux dans un cadrage serré et sous tutelle du Parlement, d’un effort soit non chiffré soit en deçà du niveau actuel pour les femmes. Le maintien de l’âge pivot à 64 ans, sans connaître l’ampleur des décotes appliquées, continue de poser problème, et les aménagements demandés par la CFE-CGC pour prendre en compte la pénibilité et les catégories actives ne sont pas évoqués. 

Inquiétante confirmation, l’assiette de cotisation passe de 8 plafonds de la sécurité sociale à 3 plafonds, avec pour conséquence la certitude d’un déficit structurel dans le nouveau régime pour garantir les droits acquis et l’entrée de régimes complémentaires par capitalisation pour couvrir les droits futurs au-delà de 3 plafonds. 

Au final, le projet présenté par le Premier ministre est celui contenu dans le rapport Delevoye, sans modification ni ouverture. Ainsi présenté sous le masque de l’équité et des droits identiques, le projet se confirme comme un dispositif pénalisant les carrières ascendantes et longues, sans aucune garantie spécifique et concrète donnée aux carrières incomplètes et à la pénibilité de certains métiers. 

Cerise sur le gâteau : le calendrier de la réforme est resserré avec une présentation au Conseil des ministres en janvier et un premier passage au Parlement en février. 

La CFE-CGC attendait des infléchissements sensibles et l’ouverture d’espaces de négociation pour rendre possible la transition vers un système unique par point, elle en est pour ses frais. 

D’ores et déjà, la CFE-CGC rejoint l’appel intersyndical pour le 17 décembre et appelle ses fédérations à se mobiliser et à rejoindre les manifestations organisées à Paris et en province. 

 

FO confirme l’appel à la mobilisation contre la réforme

Le bureau confédéral de FO constate que le Premier ministre a confirmé essentiellement la volonté du gouvernement de mettre en place un régime unique par points supprimant l’ensemble du système existant et ses régimes. Il accélère même le calendrier législatif avec l’annonce d’un projet de loi en conseil des ministres le 22 janvier et sa présentation au parlement fin février. 

FO constate aussi que sur chacun des aspects des conséquences de ce régime, le Premier ministre a confirmé la justesse des analyses qu’elle a exprimées publiquement sans relâche : le régime unique par points n’améliorera pas les droits mais les dégradera, du fait du passage du calcul sur les meilleures périodes de la vie active à l’obligation d’acheter des points tout au long de la vie active, y compris dans les périodes de bas salaire, de temps partiel, d’interruption de carrière. 

Les mesures annoncées sont en fait des compensations aux difficultés rencontrées par les salariés et souvent les salariées dans l’emploi mais qui existent aujourd’hui dans le système actuel avec le Fonds de solidarité vieillesse, financées par la CSG sur les revenus du patrimoine et non comme demain sur le recul de l’âge de la retraite. 

A ce sujet, FO constate que le premier ministre confirme la mise en place d’un âge d’équilibre à 64 ans, qui pénalisera par une décote (malus) celles et ceux qui voudront faire valoir leur droit à pension à 62 ans. Cela va à l’encontre au demeurant de l’affichage de la plus grande liberté ! Cela va aussi à l’encontre de ce que l’on nous rappelle comme étant un engagement de campagne puisque la réforme ne devait ni conduire à de nouvelles économies sur les retraites ni reculer l’âge de départ ! 

FO ne peut que déplorer et dénoncer que le projet soit de fait la marque d’une démission devant l’inéluctabilité des petits jobs (caissières à temps partiel, livreurs à vélo …), dans la mesure où plutôt que de combattre résolument le chômage et la précarité, le premier ministre explique qu’il faut adapter notre système de retraite au nouveau visage de la précarité. 

Incontestablement la mobilisation exceptionnelle et la grève engagée le 5 décembre conduisent le gouvernement à retarder l’application effective à la génération 1975 plutôt qu’à la génération 1963 comme initialement prévu. 

Pour FO cela ne peut que confirmer la nécessité de renforcer cette mobilisation. 

FO appelle l’ensemble des salariés du privé et du public à s’y associer. 

FO le réaffirme, nous devons préserver notre système de retraite et ses régimes. Nous sommes prêts à négocier pour son amélioration. 

L’UNSA s’offusque de l’âge pivot à 64 ans

Après des mois de tergiversations, le Premier ministre vient de dévoiler l’architecture globale de la réforme des retraites.Quelques-unes des mesures annoncées aujourd’hui sont à mettre au crédit de notre action, basées sur des propositions de l’UNSA.L’UNSA a défendu l’intérêt de l’ensemble des salariés et prend acte des évolutions proposées : 

  • La première génération concernée par le régime universel sera celle née en 1975. Pour autant, les générations suivantes ne doivent pas être oubliées. Ces 12 années gagnées par rapport au projet initial, à mettre à l’actif de l’action de l’UNSA, laisseront ainsi le temps nécessaire pour améliorer les carrières, les salaires, la qualité de vie au travail de l’ensemble des salariés.
  • Les salariés, nés à partir de 1975, bénéficieront de 100 % de droits acquis dans l’actuel régime . Ce qui est une garantie indispensable en particulier pour celles et ceux qui y ont déjà accompli une part significative de leur carrière.

De grandes incertitudes persistent qui éloignent la sortie de la crise. 

– Sur la Fonction Publique globalement où les annonces ne sont pas à la hauteur, pour la fonction publique hospitalière, territoriale et pour toutes les catégories qui touchent le moins de primes.- Sur les mesures de compensation, en particulier pour les enseignants, l’UNSA considère que les annonces d’une revalorisation et d’une garantie de maintien de pension vont dans le bon sens. Il faudra cependant, avant la fin de semaine, que le voile soit levé sur un démarrage très rapide de négociations, sur le volume financier consacré et sa programmation.-la prise en compte de la dangerosité de certains métiers n’est toujours pas complètement clarifiée-Concernant les régimes spécifiques (RATP, SNCF), le Premier ministre s’il dit avoir entendu la nécessité d’une transition plus longue, renvoie celle-ci à des négociations d’entreprise, sans préciser aucune borne d’âge ni accorder aucune garantie quant au respect du contrat social. Ce flou n’est pas acceptable et ne répond pas aux attentes pourtant claires des salariés.-Concernant la pénibilité rien de nouveau. Des négociations sérieuses doivent enfin commencer afin de prendre en compte tous les métiers. 

Enfin, la mise en place d’un âge pivot à 64 ans en 2027 avec une montée en charge dès 2022 est pour l’UNSA une ligne rouge.Nous avions prévenu qu’il ne fallait pas mélanger une réforme systémique avec des mesures d’équilibre financier. Nous n’avons pas été entendus sur ce point. Une contrainte supplémentaire apparait pour les partenaires sociaux, enjoints d’en définir les détails techniques.Ce n’est pas acceptable. 

Nous poursuivrons nos échanges et notre pression auprès de l’exécutif afin obtenir de nouveaux acquis ou de nouvelles garanties. Notre méthode mélant négociation et mobilsation va se renforcer. Concernant la mobilisation, nous allons en discuter avec nos partenaires.Dès présent, l’UNSA se dirige vers une mobilisation plus globale, y compris par la grève dès mardi prochain. 

 

La CGT veut durcir la lutte

Le Premier ministre, Édouard Philippe, a annoncé le contenu du projet de réforme des retraites mercredi 11 décembre. Le gouvernement a décidé de rester sourd à la colère des travailleurs et travailleuses en lutte et de passer en force. Plusieurs mobilisations sont prévues dès aujourd’hui. 

Dans son allocution, le Premier ministre a confirmé les propositions du rapport Delevoye : 

  • report de l’âge à la retraite à 64 ans ;
  • principe de la retraite à point ;
  • 1 000 euros minimum, mais seulement en cas de carrière complète.

Il ne remet pas en cause les plafonds des 14 % du PIB consacré au financement, ni des 120 000 euros annuel des salaires soumis à cotisation. Cela dans un contexte où 6 millions de retraitables sont attendus d’ici 2042. 

Dès lors, la variable d’ajustement serait la valeur du point et donc la baisse du niveau des pensions

Le gouvernement n’hésite pas à tenter la division des salariés, y compris dans la même entreprise et la même profession.

Pour les jeunes qui entreront sur le marché du travail à partir de 2022, la réforme leur sera appliquée intégralement. Pour les travailleurs et travailleuses nés avant 1975, la réforme ne leur sera pas applicable tandis que celles et ceux nés à partir de 75 verront leur retraite calculée sur deux régimes : le taux plein pour la carrière effectuée avant 2025 et la retraite à point pour la carrière effectuée après cette date butoir. 

Par ailleurs, le gouvernement confirme la suppression des 42 régimes spéciaux et particuliers tout en précisant que certains secteurs bénéficieraient d’un traitement adapté. Des mesures dérogatoires sur l’âge de départ pour les métiers « régaliens » et dangereux seraient ainsi prévues. Les autres métiers seront intégrés au régime universel. 

À la CGT, nous revendiquons la prise en compte de la pénibilité du travail par des départs anticipés avant 60 ans pour les salariés du privé comme du public.

Édouard Philippe a par ailleurs annoncé que la mise en œuvre de la réforme sera confiée aux « partenaires sociaux », qui devront en gérer les conséquences pour l’ensemble de la population, et ce sous le contrôles des orientations budgétaires du gouvernement. Il semblerait que le gouvernement s’apprête à passer en force en légiférant, par ordonnance et décrets, des arbitrages essentiels pour l’avenir de nos retraites

Face à un gouvernement sourd, les organisations syndicales réaffirment leur appel à renforcer la mobilisation par la grève et sa reconduction quand les salariés le décident et par les manifestations notamment les 12 et 17 décembre prochains. Plusieurs mobilisations locales sont prévues aujourd’hui. 

À Paris, l’union départementale CGT de Paris appelle à une manifestation interprofessionnelle à 14 heures au départ de Nation pour se rendre à République.  

 

La CFDT regrette l’obsession budgétaire du gouvernement

Malgré les alertes de la CFDT, le Premier ministre a imposé des mesures d’âge inutiles et injustes à travers l’instauration d’un « âge d’équilibre » dès 2022. Pour la CFDT, une ligne rouge a été franchie. Cette disposition remet en cause la promesse du président de la République de ne pas faire de mesure d’âge. 

Ce sont tout particulièrement ceux qui ont commencé à travailler jeune, et les personnes qui se retrouvent au chômage en fin de carrière qui seront pénalisés. Dès 2022, ceux qui pouvaient prétendre à la retraite à 62 ans devront travailler plus longtemps pour maintenir leur niveau de pension : si la réforme systémique est repoussée à la génération 1975, les mesures d’économies sont, elles, avancées à la génération 1960.La CFDT rappelle que les salariés font déjà des efforts puisque les lois antérieures prévoient un allongement de la durée de cotisation pour tous jusqu’en 2035. 

La CFDT porte depuis de nombreuses années l’ambition de construire un système de retraite juste, solidaire et universel. Si le rapport Delevoye donne tous les outils pour le bâtir, la concertation menée depuis septembre n’a pas permis d’avancer sur des points essentiels :- La reconnaissance de la pénibilité n’est aujourd’hui pas à la hauteur alors qu’elle est une condition de la justice sociale.– La CFDT maintient qu’une carrière complète au SMIC mérite une pension bien supérieure à 85% du SMIC. Le gouvernement doit aller plus loin en la matière.– Les dispositions en matière de retraite progressive restent quant à elles très floues ; la responsabilité des entreprises dans le maintien dans l’emploi des seniors doit être engagée.- Il est urgent que la situation des travailleurs concernés par les régimes spéciaux soit clarifiée, et que les mesures de compensation et de revalorisation salariales pour la fonction publique soient définies. 

L’obsession budgétaire et la justice sociale ne font pas bon ménage. En souhaitant mener de front une réforme ambitieuse et une réforme budgétaire à l’ancienne, l’exécutif a perdu le sens et la lisibilité d’une réforme du système de retraite pourtant attendue. 

La CFDT appelle donc l’ensemble des travailleurs à se mobiliser le 17 décembre pour que le gouvernement renonce à toute mesure d’âge et rouvre les discussions pour un système de retraite universel qui soit réellement juste. 

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