Quotas d’immigration de travail : les réactions paritaires

Semblant considérer que la France souffre d’un déficit d’immigration, l’exécutif a progressivement officialisé, durant la première partie de la semaine, son souhait de relancer l’immigration économique, par l’instauration de « quotas » chiffrés par secteurs d’activité.

 

L’idée a été diversement appréciée par les dirigeants des principales organisations patronales et salariales. 

Les syndicats opposés au principe des quotas

Interrogé mardi sur France Inter, Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, s’est dit « choqué » par la volonté gouvernementale d’instaurer des quotas pour l’immigration économique – sa réaction portait, certes, également sur la création d’un délai de carence afin d’accéder à la protection universelle maladie. S’exprimant au sujet des quotas, M. Berger a déclaré que « les migrants économiques, c’est 30.000 personnes en France par an » et que dès lors, il estime « qu’il y a besoin d’agiter des chiffons rouges sur ce sujet ». 

Sans surprise, la CGT s’est elle aussi opposée à la nouvelle politique migratoire prônée par l’exécutif. Elle a dénoncé vivement la « vieille recette réactionnaire et utilitariste » du recours au débat « sur la question migratoire et identitaire ». Pour la CGT, le recours à des quotas revient à effectuer un « tri entre les « talents et compétences » et les autres » et, partant, à « maintenir une partie du salariat sans droits et sans titres dans la clandestinité, la précarité et les discriminations ». Les migrants choisis pour leurs compétences seront également victimes du système, puisque leur visa sera « lié à un contrat à durée déterminée » et qu’ils seront donc « à la merci de son futur employeur ». Contre cette politique des quotas, la CGT « revendique, plus que jamais, la régularisation de tous les travailleurs sans-papiers ». 

Bien moins lyrique, Force Ouvrière a elle aussi fait part de son refus du système des quotas dans un communiqué. Qualifiant ce système de « vieux serpent de mer », FO juge qu’il « n’a jamais fait la preuve de sa pertinence » et qu’il est donc « inutile et inefficace ». Plus fondamentalement, l’organisation tonne : « les travailleurs ne sont pas une marchandise et ne devraient en aucun cas être assimilés à un quota ! ». FO en vient d’ailleurs à une réflexion intéressante quant aux conséquences de la politique des quotas sur les pays d’émigration, déplorant le fait qu’ils sont ainsi à amenés à faire face « à une fuite des qualifications préjudiciable à leur développement ». Enfin, FO rappelle que si certains postes ne trouvent pas de Français preneurs, c’est qu’il faut « revaloriser la nature de ces emplois ». 

Le patronat favorable à l’immigration de travail

Invité sur RMC hier, Geoffroy Roux de Bézieux, le président du Medef, s’est, à l’inverse des représentants salariaux, montré plus ouvert à l’égard des quotas d’immigration économique. Il a en effet déclaré qu’il était nécessaire que le recrutement de travailleurs étrangers « soit beaucoup plus transparent, objectif, professionnel et planifié » selon les besoins de l’économie française. Cela étant, pour M. Roux de Bézieux, instaurer des quotas ne suffira pas à faciliter la vie des entrepreneurs français. Il a également appelé à simplifier leurs démarches administratives en matière d’embauches de salariés immigrés, en rendant notamment « l’octroi de titres de travail plus facile, plus simple ». Enfin, le patron du Medef a jugé opportun d’accorder aux branches professionnelles un rôle centrale dans la définition des quotas. 

Cette approbation globale de la démarche gouvernementale par le président du Medef faisait écho à celle formulée la veille par François Asselin, au micro de RTL. « Si nous ne trouvons pas dans nos compatriotes la main d’oeuvre dont nous avons besoin ou l’intelligence dont nous avons besoin, bien évidemment il faut élargir » s’est-il justifié, poursuivant « un entrepreneur ce qu’il a besoin c’est de gens courageux, qui ont du potentiel, qui veulent porter le projet d’entreprise ». M. Asselin a d’ailleurs rappelé que les entreprises étaient généralement satisfaites des travailleurs immigrés. « Des entreprises ont déjà fait appel à des migrants, les ont formés, et ça se passe plutôt pas mal » a-t-il déclaré. 

Au final, seule l’U2P s’est montrée bien plus mesurée au sujet de la réforme de l’immigration économique voulue par le gouvernement. Alain Griset, son président, a en effet estimé que l’urgence première était bien plus de lutter contre le chômage des nationaux que d’importer de la main d’oeuvre. « Au regard du nombre de chômeurs qu’on a en France, la priorité absolue […] doit être de remettre au travail tous ceux qui sont actuellement au chômage avant d’envisager une immigration spécifique » a-t-il en effet estimé. Il a, certes, ajouté que s’il était question de recourir à des travailleurs immigrés, le recours à des quotas valait mieux qu’une « immigration totalement ouverte ». 

En somme : heureusement que l’U2P et FO sont là pour soulever, un tant soit peu, certaines des vraies questions qui sont posées par la démarche gouvernementale… 

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