Retraites : les préconisations prudentes de la Cour des Comptes sur les droits familiaux

Dans le cadre de son rapport annuel sur les comptes de la Sécurité sociale, la Cour des Comptes s’est penchée sur la question des “droits familiaux” – ces droits à pension dits de solidarité, spécifiquement liés à l’accueil et l’éducation d’enfant(s) par les assurés sociaux.

Si la Cour formule plusieurs préconisations d’évolution pour ces droits familiaux, elle le fait de manière relativement prudente.

Des droits familiaux à 20 milliards d’euros

Dans la première partie du chapitre de leur rapport qu’ils consacrent à cet enjeu, les magistrats de la rue Cambon avancent différents éléments d’information qui permettent de l’objectiver. Bénéficiant à environ “trois retraités sur cinq”, les droits familiaux ont représenté des dépenses de l’ordre de 20 milliards d’euros – en 2016 – soit “6,7 % de la masse des pensions de droit direct”.

Trois dispositifs concentrent l’essentiel des dépenses : l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF), permettant “d’acquérir des trimestres au régime général selon les règles de droit commun”, les “majorations de durée d’assurance” (MDA) en fonction du nombre d’enfants et, enfin, une majoration des pensions des parents de famille nombreuse (MPE).

Encourager l’activité salariée des femmes

S’agissant de l’AVPF, la Cour des Comptes propose plusieurs pistes de réforme. D’abord, elle estime que le bénéfice de ce dispositif doit être conditionné uniquement par celui “des prestations familiales qui y donnent accès”, sans que des conditions de ressources viennent s’ajouter. Le surcoût de 800 millions d’ici 2040 induit par cette évolution serait compensé par deux mesures.

D’une part, l’accès à ‘AVPF au titre du complément familial serait durci, “pour ne pas écarter durablement les mères du marché du travail”. Se rangeant à l’avis du rapport Fragonard de 2015 sur les droits familiaux, la Cour des Comptes propose “que l’affiliation à l’AVPF pour les parents d’au moins trois enfants de plus de trois ans, au titre du complément familial , cesse au sixième anniversaire du benjamin”. D’autre part, la rue Cambon préconise de mieux cibler les bénéficiaires de l’AVPF, en prévoyant “un droit conditionnel d’affiliation à l’AVPF” destiné à respecter “le principe de non-cumul entre les trimestres d’AVPF et les trimestres de retraite compensant les interruptions d’activité dans la limite de trois ans par enfant” prévues par les codes de la Sécurité sociale et des pensions civiles et militaires de retraite.

“Des ajustements et des harmonisations” pour les majorations

Concernant les deux dispositifs de majoration des droits à pension, la Cour des Comptes juge opportun d’opérer “des ajustements et des harmonisations”. Elle propose dans ce cadre d’accorder deux trimestres de majoration de durée d’assurance au titre de la maternité, d’élargir le bénéfice de ces trimestres – en faisant en sorte que la “condition d’affiliation de deux ans minimum à un régime d’assurance vieillesse pour l’octroi de la MDA au titre de l’éducation ne porte que sur le seul parent bénéficiaire de ce droit individuel” – et d’étendre ce système aux professions libérales.

De manière à faciliter la gestion des droits des assurés par les caisses et donc l’accès à ces droits, la rue Cambon préconise deux mesures complémentaires. D’une part, celle de “conduire à son terme le projet de constitution d’une base de données relatives aux enfants” et, d’autre part, celle de définir “par voie réglementaire une liste exhaustive des justificatifs de la condition d’éducation et de charge des enfants, lorsque cette condition est exigée pour bénéficier de la majoration de pension pour parents d’au moins trois enfants”.

Des pistes pour une réforme plus structurelle

Enfin, relevons que la Cour des Comptes esquisse les conditions d’une réforme bien plus structurelle des droits familiaux de retraite. Cette réforme serait fondée sur le principe d’une actualisation des objectifs de fond de ces droits : elle “pourrait viser à simplifier et à harmoniser les droits familiaux, tout en recherchant à mieux compenser, à la retraite, les pertes de salaire liées aux enfants, principalement pour les générations de femmes, mieux insérées sur le marché du travail, qui vont arriver à la retraite”.

Avançant ses pistes de réflexion, la Cour se réfère explicitement à celles contenues sur ce thème dans le projet de réforme systémique des retraites. On en retiendra notamment un système de majoration des pensions qui serait “proportionnel au montant de la pension”. “Pour compenser, à la retraite, l’impact des enfants sur les salaires ultérieurs des mères, quel que soit le secteur d’activité, une majoration de pension au titre de chaque enfant, étendue à tous les régimes de base et complémentaires, pourrait en outre être attribuée aux mères. Comme les pensions de retraite sont proportionnelles aux revenus d’activité, elle serait proportionnelle au montant de la pension (de l’ordre de 5 % dans le secteur privé)” propose la rue Cambon.

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