Retraites complémentaires : Tendil joue aux Arlésiennes

« Le Medef reste droit dans ses bottes et poursuit son escalade dans les sacrifices demandés aux salariés », estimait ce vendredi 10 avril la CGT à l’issue de la troisième séance plénière de négociation sur les retraites complémentaires. « Ça commence à bouger », disait de son côté Pascale Coton, chef de file des négociateurs CFTC. « On n’est pas entrés dans le vif du sujet », confiait Serge Lavagna de la CFE-CGC. « Il est temps qu’on avance », glissait Jean-Louis Malys (CFDT), ce qui était aussi le sentiment de Philippe Pihet (FO). 

Quant à Claude Tendil, chef de file de la délégation patronale, délaissant la cacophonie syndicale, il jouait délibérément les Arlésiennes –une première s’agissant d’une négociation touchant un régime paritaire –, refusant de se rendre devant la presse au motif que le quotidien économique Les Échos avait diffusé le matin même l’état de ses réflexions sur « la décote provisoire », mais surtout les résultats d’une étude demandée aux services de l’Agirc et de l’Arrco sur la situation des chômeurs au moment de leur départ en retraite. Ces informations émanant des syndicats, notamment de la CFDT, il est donc clair que les hostilités ont bel et bien démarré, mais par voie de presse. 

 

La dégressivité prévue par le Medef

Sur les abattements provisoires, on retiendra donc que le Medef a précisé la dégressivité du dispositif : de 40%, 30% ou 20% à 62 ans, l’amputation se réduirait progressivement jusqu’à 67 ans selon un rythme et une amplitude qui restent à définir. La simulation réalisée montre que pour une retraite Agirc liquidée en moyenne à hauteur de 695 euros par mois, la pension serait ramenée à 556 euros avec une décote à -20 % et à 417 euros si la décote est fixée à -40%. Dans ce dispositif, le Medef fait brutalement chuter la décote à partir de 65 ans, ce qui revient sans réforme explicite à déplacer la borne d’âge plancher. Le Medef a toutefois consenti en séance à faire échapper à ce dispositif les petites pensions qui n’acquittent pas de CSG, soit 27 % des retraités principalement des femmes. Mais bien des points restent à préciser, Philippe Pihet (FO) rappelant que les retraites versées à l’étranger ne sont pas soumises à CSG sans que ce soient forcément des « petites pensions ». 

Le point qui pose problème confirme ce que l’on pressentait à savoir, qu’au moment de leur départ en retraite, 44% des salariés seulement sont en activité, pourcentage qui, selon Serge Lavagna (CFE-CGC), serait proche de 70 % si l’on prend en compte les professions libérales et les fonctionnaires. Le problème tient au fait que sur les 44 % de salariés en activité en décembre 2012 au moment de la liquidation de leurs droits, la proportion tombe à 37 % chez les femmes non cadres, 14 % des nouveaux retraités acquérant gratuitement des droits au titre du chômage, d’un dispositif de préretraite ou d’une maladie. Restent alors 42 % de salariés dont on ignorait la position par rapport à leur retraite en 2012 et qui touchaient en 2013 une pension moyenne mensuelle de1 344 euros. La proposition patronale en faveur des titulaires de petites retraites n’acquittant pas la CSG peut-elle suffire ? 

En tout état de cause, cette question des abattements se discutera en lien avec l’avenir de l’AGFF après 2018. À cette date ce système qui procure 11 milliards de recettes aux régimes Agirc-Arrco cessera de produire des effets. Autour d’une sanctuarisation de la borne d’âge de 67 ans un compromis devrait être possible estime prudemment Philippe Pihet, son homologue de la CFDT, Jean-Louis Malys souhaitant qu’au-delà de mesures conservatoires pour l’essentiel paramétriques les partenaires sociaux affichent leur volonté d’aller vers un système équitable et pérenne et d’écrire « une nouvelle page du paritarisme ». Les syndicats qui vont multiplier les réunions bilatérales avec le Medef dans les prochaines semaines se reverront le 27 mai, puis le 22 juin. Ils comptent bien épuiser ce délai pour parvenir à un accord « global » qui permette de passer le cap des années 2016 et 2017, mais qui trace aussi des perspectives pour atteindre l’équilibre des régimes en 2020. 

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