Saisi à la fois par les projets de réformes sociales du gouvernement et par la volonté des dirigeants des syndicats de salariés de définir un agenda social proprement paritaire, le Medef est appelé à se mobiliser sur tous les fronts sociaux. Réticents à l’idée de se laisser embarquer dans des aventures dont ils ne maîtrisent guère le scenario, les dirigeants du patronat français apparaissent sur la défensive.
Unédic : le refus des plans gouvernementaux
Au sujet de la future négociation sur l’assurance chômage, ils ont d’une part clairement réaffirmé leurs lignes rouges. Si Geofrroy Roux de Bézieux, le président du Medef, avait déjà clairement exprimé son refus d’inclure dans la future convention Unédic un dispositif de bonus-malus sur les contrats courts, c’est récemment François Asselin, le président de la CPME, qui a tenu à se montrer inflexible vis-à-vis d’un tel système. Le qualifiant “d’usine à gaz” , il a estimé qu’il allait “impacter fortement le coût du travail de certaines entreprises, créer des distorsions de concurrence et sera mortifère pour l’emploi”. M. Asselin en a tiré la conclusion qu’il était hors de la question pour la CPME de parapher un accord paritaire sur l’Unédic qui instituerait un bonus-malus. Dans la mesure où le gouvernement prétend vouloir ce résultat, une explication de texte avec le patronat devrait s’avérer inévitable.
N’ignorant pas cet horizon, la CPME commence à faire état publiquement de ses inquiétudes quant à la solution que l’exécutif pourrait en venir à imposer aux entreprises. En conférence de presse, Jean-Michel Pottier, le négociateur Unédic de l’organisation, a expliqué mercredi dernier que le gouvernement savait bien où il allait. Pour les entreprises de plus de 11 salariés, le taux de la cotisation patronale à l’assurance chômage pourrait évoluer de plus ou moins 80 % en fonction de la fréquence du recours aux contrats courts. Les entreprises les plus vertueuses du point de vue du nouveau système, 40 % du total d’après la CPME, financeraient une cotisation abaissée à 0,75 % du salaire, tandis que les entreprises les moins vertueuses, 30 % du total toujours selon la CPME, en financeraient une qui s’éleverait à 7 % du salaire – contre 4,05 % actuellement. Les employeurs sont prévenus !
Agenda social : les syndicats refroidis
Parallèlement à ces mises en garde appuyés quant au bonus-malus sur les contrats courts, les représentants patronaux ont fait savoir aux dirigeants des organisations syndicales de salariés qu’ils n’étaient que moyennement convaincus par leur projet d’agenda social paritaire. Dans leur lettre de réponse aux dirigeants de la CFDT, de la CGT, de FO, de la CFTC et de la CFE-CGC, les responsables du Medef, de la CPME et de l’U2P ont d’emblée insisté sur le fait que la loi Travail étant passée par là, les négociations nationales interprofessionnelles n’auraient plus la place qu’elles avaient jusqu’alors. Elles devront composer avec les négociations dans les branches et les entreprises. D’après le patronat, “il s’agit pour les partenaires sociaux de réinventer le dialogue social interprofessionnel pour le mettre en adéquation avec la réalité et le monde économique de demain”.
Partant de là, les dirigeants du Medef, de la CPME et de l’U2P ont avancé les thèmes qui, selon eux, devront faire l’objet de négociations paritaires nationales et interprofessionnelles. Leurs homologues salariaux ont pu noter que les thèmes de la qualité de vie au travail et des discriminations dans l’accès au travail n’y figurent pas. A la place, le patronat préfèrerait redéfinir le “positionnement des partenaires sociaux au sein des systèmes de gestion paritaire”. Un sujet, il est vrai, d’actualité… Par ailleurs, il juge opportun de discuter “conséquences des transitions numériques et écologiques sur l’organisation du travail”, “nouvelles formes d’emploi liées aux mutations technologiques”, “rôle des entreprises dans la société par le travail” et “modèle économique et social en Europe”. Des thèmes de négociations qui, probablement, finiront bien par convenir aux représentants salariaux.