Tandis que se profilent de plus en plus clairement les principales mesures qui devraient être contenues dans les réformes à venir de l’assurance chômage et des régimes de retraite, la CFDT commence à se rendre compte que le gouvernement n’est pas vraiment sur la même longueur d’onde qu’elle.
De fait, elle se trouve dos au mur : si elle ne veut pas perdre une grande partie de son crédit politique, elle va devoir bander sérieusement les muscles.
Déséquilibres sur l’assurance chômage
Dans un communiqué de presse qu’elle a fait publier sur son site, la CFDT commente la récente déclaration de politique générale du Premier ministre Edouard Philippe. Tout en accueillant positivement un certain nombre d’annonces – en matière de transition écologique et de diffusion de la PMA, notamment – la première confédération salariale de France déplore d’une part des déséquilibres quant au contenu des mesures qui seraient mises en oeuvre dans la réforme de l’assurance chômage.
“La CFDT ne peut en revanche accepter que dans le chapitre consacré à la justice sociale, soit intégrée une réforme de l’assurance chômage qui demande des efforts considérables à tous les chômeurs, notamment les plus précaires, et n’impose un bonus-malus qu’à cinq à dix branches professionnelles” dénonce-t-elle en l’occurrence. A l’évidence, Laurent Berger s’attendait à un bonus-malus sur les contrats courts bien plus ambitieux que celui esquissé par l’exécutif.
Un projet de réforme retraite “inacceptable”
Outre cette critique, la centrale modérée en formule une autre, plus sévère encore, à l’égard du projet de réforme des retraites en cours d’élaboration. La CFDT critique vivement le principe de l’âge dit pivot évoqué à de nombreuses reprises ces dernières semaines dans le débat public, et qui serait destiné à définir l’âge de départ à la retraite sans décote. La CFDT “ne peut accepter l’évocation, pour le régime des retraites, d’un âge d’équilibre identique pour tous qui n’est ni nécessaire financièrement ni juste pour celles et ceux qui ont commencé à travailler tôt” affirme-t-elle en effet.
La centrale va plus loin, affirmant que la mise en oeuvre d’un tel dispositif serait de nature à remettre en cause “l’équilibre du projet de réforme et le rendrait inacceptable”. Reste à savoir si la CFDT s’en prend ici au principe même de l’institution d’un âge pivot ou si elle refuse plutôt son caractère uniforme.
Le coup de bluff de la CFDT ?
Le ton offensif du communiqué de presse de la CFDT est sans doute destiné à envoyer un message clair au Président de la République : s’il devait ne pas prendre en compte les principales revendications qu’elle formule, la centrale serait prête à envisager de recourir à des méthodes plus fortes que celles auxquelles elle a habitué le pouvoir depuis plusieurs décennies maintenant. La menace est à peine voilée.
Il faut dire que la CFDT a beaucoup à perdre aux réformes de l’assurance chômage et de l’assurance retraite. En cas de non prise en compte de ses remarques par le chef de l’Etat, le crédit politique cédétiste, voire la pertinence globale d’une démarche syndicale qui soit modérée, s’en trouveraient inévitablement mis à mal.
Dans cette configuration, une question est finalement posée : l’exécutif prendra-t-il au sérieux les menaces d’une CFDT traditionnellement si calme que l’on peut en venir à se demander si elle est encore en mesure de jouer des partitions plus radicales ?