Si le Président de la République a renoncé à recourir à un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2023 afin de réformer les retraites, il n’a toutefois pas du tout abandonné l’idée de s’attaquer à une telle réforme – et de le faire très rapidement.
Dans cet objectif, le gouvernement vient de commencer à consulter les partenaires sociaux afin de leur dévoiler l’agenda, très serré, de la concertation qu’il entend mener avec eux sur ce sujet.
Une concertation prévue pour durer deux mois et demi
C’est hier qu’Olivier Dussopt, le ministre du Travail, a reçu les partenaires sociaux afin de leur présenter l’agenda de la “concertation” sur la réforme des retraites. Cet agenda va articuler trois temps, trois “cycles”, de trois semaines chacun, durant lesquels l’exécutif va recevoir, sous le format de réunions bilatérales, les représentants des principales organisations patronales et salariales françaises afin d’échanger avec eux des principaux éléments qui devraient être contenus dans la réforme des retraites. A l’issue de cette concertation menée tambour battant, le gouvernement entend dévoiler, mi-décembre, la réforme qu’il entend mettre en œuvre.
Dans le détail, le premier cycle, qui sera engagé dès la semaine prochaine, concernera les thèmes du “travail des seniors” et de “l’usure professionnelle”. Puis, en novembre, il s’agirait d’évoquer les aspects plus sociaux de la réforme : pension minimale, égalité hommes-femmes, justice sociale, notamment. Enfin, le dernier temps de la concertation serait l’occasion d’aborder les sujets qui fâchent et, tout particulièrement, celui des questions d’âge. Le Président de la République ne fait pas mystère, il est vrai, de sa volonté de relever l’âge du départ effectif à la retraite – mesure destinée à assainir quelque peu un budget à l’équilibre mal assuré.
Une réforme des retraites à hauts risques sociaux
Du côté de la représentation patronale française, ces dernières semaines, on a réaffirmé la nécessité d’une hausse de l’âge de la retraite. Cette position des employeurs n’étonne, certes, guère, dans la mesure où elle correspond à une position traditionnelle du patronat français. Pourtant, ce positionnement public pourrait fort bien s’accommoder, en interne, de positionnements bien plus nuancés. La complexité des perspectives économiques et sociales d’une part et l’enclenchement de la transition écologique d’autre part n’apparaissent en effet pas pleinement compatibles avec un relèvement rapide de l’âge de la retraite – et les experts patronaux des questions sociales ne l’ignorent pas.
Il faut d’ailleurs dire que, quelle que soit leur sensibilité, les responsables des organisations syndicales de salariés répètent aussi souvent qu’ils le peuvent qu’ils refusent catégoriquement d’entendre parler d’une hausse de l’âge du départ à la retraite. Dans un communiqué commun qu’elles ont publié mardi, elles l’ont encore réaffirmé très clairement : “Les organisations syndicales réaffirment ainsi qu’elles sont, comme la majorité de la population, fermement opposées à tout recul de l’âge légal de départ en retraite et à une augmentation de la durée de cotisation”. Elles appellent bien plutôt à réfléchir aux pistes “alternatives” de réforme.
Il n’est pas certain que quelques semaines de “concertation” suffiront à rapprocher les positions gouvernementales des positions syndicales. L’hypothèse du déclenchement, durant l’hiver, d’un conflit social d’ampleur est dès lors à prendre au sérieux.