Reclassement du salarié inapte : existe-il un formalisme à respecter ?

Cet article a été initialement publié sur le site du syndicat : CFDT

 

Dans le cadre de l’inaptitude d’un salarié, la chambre sociale de la Cour de cassation s’est penchée sur la forme que doit prendre la proposition de reclassement : absence de formalisme ou exigence d’un écrit ? Pour les hauts magistrats les dispositions légales n’imposent pas que les propositions de reclassement soient faites par écrit.Cass.soc., 31.03.2016, n°14-28.314. 

 

  • Faits, procédure, problématique

Suite à un arrêt de travail pour maladie non professionnelle, un salarié d’une société de distribution, manager du département boucherie, a été déclaré inapte à son poste de travail. 

Licencié pour inaptitude suite à son impossibilité de reclassement, le salarié a décidé de contester la validité de la rupture de son contrat de travail devant la juridiction prud’homale. Le salarié estime que l’employeur n’a pas satisfait à son obligation de reclassement. 

Dans le cadre d’une procédure de reclassement pour inaptitude, l’employeur doit respecter une obligation de loyauté. A cet égard, lorsque le médecin du travail a constaté l’inaptitude du salarié à reprendre son emploi, l’employeur doit commencer par chercher, pour ce salarié, un emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé. Cette recherche doit être menée avec sérieux et loyauté, le cas échéant à l’intérieur du groupe dont l’entreprise fait partie. Sauf en cas d’inaptitude d’origine professionnelle, elle doit être mise en œuvre même si le salarié a été déclaré « inapte à tout emploi dans l’entreprise ». Autrement dit, l’employeur doit s’efforcer d’assurer le reclassement du salarié afin de préserver son emploi. 

La cour d’appel considère que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que les propositions de reclassement présentées au salarié doivent être écrites. La cour estime en effet « qu’en s’abstenant de proposer par écrit au salarié des postes caissier, d’employé commercial et d’hôte d’accueil conformes aux préconisations du médecin du travail et disponibles, l’employeur n’a pas respecté son obligation reclassement ». 

En désaccord avec le raisonement de la cour d’appel, l’employeur décide de contester la décision devant la chambre sociale de la Cour de cassation. 

Les propositions de reclassement faites à un salarié inapte doivent-elles être faites obligatoirement par écrit ? Telle est la question tranchée par la chambre sociale de la Cour de cassation. 

  • Absence de formalisme mais l’écrit reste vivement recommandé

Les magistrats de la Haute Cour censurent et cassent la décision de la cour d’appel en reprenant les termes de l’article L. 1226-2 du Code du travail.  

L’article L. 1226-2 du Code du travail dispose que lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. 

Sellon eux « il ne résulte pas de ces dispositions que les propositions de reclassement doivent être faites par écrit ». En conséquence, pour la Cour de cassation, « la Cour d’appel a ajouté à la loi une condition qu’elle ne prévoit pas ». 

Pour la Cour de cassation la loi n’impose pas d’écrit. Autrement dit, un employeur ne peut pas être sanctionné lorsqu’il n’a pas remis par écrit au salarié inapte des propositions de reclassement.  

Les propositions de reclassement peuvent très bien être exposées au cours d’un entretien. Toutefois, il est nécessaire de rappeler que ces propositions doivent être sérieuses et précises(1). En cas de litige, il appartiendra à l’employeur et non au salarié de prouver qu’il a bel et bien rempli son obligation de reclassement. 

L’oralité d’une proposition de reclassement restant extrêmement difficile à prouver pour l’employeur, il sera toujours préférable pour ce dernier, de garder une trace écrite des propositions faites au salarié (sous forme de lettre ou de compte-rendu d’entretien). 

La portée de cet arrêt reste donc mesurée pour les salariés. L’obligation de loyauté de l’employeur et la charge de la preuve vienent tempérer cet arrêt. En effet, si les propositions de reclassement peuvent être formulées verbalement reste que la preuve de cette proposition incombe à l’employeur. Les employeurs ne manqueront donc pas de se rappeler que si les paroles s’envolent les écrits restent… 

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