La Grèce a fait défaut hier et (étrange leçon d’un monde surinformé) l’annonce du phénomène s’est diluée dans une sorte d’indifférence générale.
Un défaut en toute beauté
Comme l’expliquait Reuters hier, la Grèce a honoré une échéance de 750 millions € au FMI hier, dont 650 millions venus du Trésor grec et… 100 millions venus du FMI. La Grèce a en effet utilisé sa ligne de facilité au FMI pour rembourser le FMI. D’une certaine façon, la Grèce a commencé à rembourser ses prêts à long terme en utilisant du credit revolving.
De l’aveu de ministre des Finances Varoufakis, la Grèce dispose de 15 jours de liquidité tout au plus avant de faire faillite.
Quel scénario en cas de défaut grec?
Cette situation, qui était prévisible de longue date, n’a pas poussé l’Union Européenne à rassurer les acteurs économiques en prenant des mesures fortes. L’Eurogroupe du lundi 11 mai a en effet confirmé la paralysie des négociations avec les Grecs pour éviter leur sortie de route.
Plusieurs scénarios semblent se dessiner aujourd’hui.
Un scénario réaliste consiste à maintenir la Grèce sous respirateur artificiel. L’Union pourrait par exemple verser mensuellement une aide permettant à la Grèce de maintenir la bouche hors de l’eau pour ne pas se noyer, mais rien de plus. Chaque tranche sera négociée âprement, et la visibilité à plusieurs mois sera nulle.
Un scénario à la prussienne consiste à profiter du défaut grec pour sortir le pays de la zone euro et le laisser gérer son défaut sans engager la solidarité européenne. Cette solution est discrètement préconisée par le minsitre Schaüble depuis plusieurs semaines.
Un scénario intermédiaire pourrait conduire l’Union à maintenir la Grèce dans la zone euro mais en la mettant de fait sous tutelle d’un cabinet technique qui lui imposerait les réformes jugées nécessaires par les créanciers: une baisse des retraites et une réforme fiscale.
Quels risques pour l’Europe?
Le risque collectif auquel l’Europe s’expose avec le défaut grec peut être analysé sous deux angles.
En termes économiques, la zone monétaire unique va subir un choc partiel sans politique économique véritablement coordonnée. Il s’agit d’une véritable épine dans le pied qui rend impossible un maintien de la Grèce dans la zone sans réaction budgétaire forte. La théorie économique exige donc soit le scénario intermédiaire (de reprise en main de l’exécutif grec par l’Union) soit le scénario prussien.
En termes politiques, l’Union subira un choc de premier ordre, parce qu’elle aura montré son incapacité à composer avec un gouvernement opposé à la ligne budgétaire majoritaire de l’Union. On imagine mal comment, sans un souffle nouveau, la construction communautaire pourrait survivre à ce ratage en beauté.