Petite leçon de représentativité pour la CGT

La CGT commence à apprendre, à ses dépens, les nouvelles règles de représentativité en entreprise. Elle vient de subir un revers en justice alors qu’elle souhaitait faire annuler un accord de révision sur le droit syndical 

La loi du 20 août 2008 a bouleversé les modalités d’appréciation de la représentativité des syndicats de salariés en entreprise. Depuis cette loi, la représentativité s’acquiert à chaque échéance électorale si le syndicat franchit le seuil des 10% de suffrages exprimés. Logiquement, un syndicat non représentatif ne peut plus négocier d’accord, ce que certains syndicats de salarié semblent avoir du mal à saisir. 

 

La perte de représentativité enlève tout pouvoir de négociation

L’affaire jugée par la chambre sociale de la Cour de cassation résulte d’un pourvoi formé par la CGT Aircelle. Le syndicat de salariés conteste la révision d’un accord signé huit ans auparavant par la CGT-FO qui était alors représentative. Hors, cette révision est intervenue uniquement entre les nouvelles organisations représentatives en 2011 : la CFE-CGC et la CFTC. 

Malgré la perte de représentativité de la CGT-FO, le syndicat estime qu’en tant que signataire de l’accord initial, il doit être obligatoirement associé à la révision. 

Mais la Cour de cassation est loin d’approuver ce raisonnement et renvoie la CGT Aircelles à ses études. En effet, un syndicat signataire d’un accord et qui perd sa représentativité ne peut pas participer à la révision dudit accord comme la Cour l’explique : “la loi du 20 août 2008 conduit la chambre sociale à estimer qu’il faut désormais tirer les conséquences de la nouvelle légitimité démocratique reconnue aux syndicats en entreprise, remise en cause tous les quatre ans. C’est ainsi qu’elle juge par l’arrêt du 21 septembre 2017, que seuls les syndicats signataires qui sont encore représentatifs lors du cycle électoral au cours duquel est proposée la révision de l’accord collectif peuvent s’y opposer“. 

Seules les organisations syndicales représentatives en entreprise sont donc aptes à négocier avec l’employeur des accords d’entreprises. 

 

Une négociation facilitée pour les entreprises

La Cour considère que ce raisonnement permet de faire prévaloir le principe démocratique de la représentativité face au principe contractuel. Les entreprises devraient en effet pouvoir s’adapter plus facilement en négociant des accords uniquement avec les organisations syndicales effectivement représentatives. 

 

Retrouvez le texte de l’arrêt ci-après :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Rouen, 21 avril 2015) ,statuant en référé, que le 29 avril 2003, un accord collectif sur le droit syndical a été signé entre la société Hurel-Hispano, aux droits de laquelle se trouve la société Aircelle (la société), et les organisations syndicales CFE-CGC, CGT et CGT-FO ; qu’après annulation par le tribunal de grande instance pour défaut d’appel à la négociation de l’accord de révision signé le 21 décembre 2011 par la société et les organisations syndicales représentatives CFE-CGC et CFTC, un nouvel accord de révision a été signé le 6 juin 2013 entre la société et les mêmes organisations syndicales, la CFTC ayant adhéré à l’accord initial ; que par acte du 30 octobre 2013, le syndicat CGT Aircelle a fait assigner en référé la société devant le président du tribunal de grande instance sur le fondement de l’article 809, alinéa 1, du code de procédure civile en suspension de la mise en oeuvre et de l’application des dispositions de l’accord de révision du 6 juin 2013, invoquant le trouble manifestement illicite constitué notamment par l’absence de consentement de l’ensemble des syndicats signataires de l’accord initial à l’engagement de la révision ; 

Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches, ci-après annexé : 

Attendu qu’ayant constaté qu’il n’était pas démontré que le syndicat CGT Aircelle n’avait pas participé activement aux négociations de révision de l’accord du 29 avril 2003, peu important qu’il ait refusé à l’issue des négociations de signer l’accord de révision, la cour d’appel, qui en a déduit l’absence de trouble manifestement illicite, a légalement justifié sa décision ; 

Sur le premier moyen, pris en ses deux dernières branches : 

Attendu que le syndicat CGT Aircelle fait grief à l’arrêt de dire n’y avoir lieu à référé sur sa demande de suspension de l’accord de révision du 6 juin 2013, alors, selon le moyen : 

1°/ qu’en constatant que le syndicat CGT-FO, signataire de l’accord initial du 29 avril 2003, n’avait pas été convoqué aux réunions de négociation de 2012 et 2013 et en décidant néanmoins que la preuve d’un trouble manifestement illicite tenant au défaut de consentement des signataires de l’accord initial pour engager le processus de révision de celui-ci n’était pas rapportée, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 2261-7 et R. 1455-6 du code du travail ; 

2°/ subsidiairement, qu’en constatant que le syndicat CGT-FO, signataire de l’accord initial du 29 avril 2003, n’avait pas été convoqué aux réunions de négociation de 2012 et 2013 et en décidant néanmoins que la preuve d’un trouble manifestement illicite tenant au défaut de consentement des signataires de l’accord initial pour engager le processus de révision de celui-ci n’était pas rapportée, aux motifs inopérants que ce syndicat avait perdu sa qualité d’organisation syndicale de salariés représentative au sein de la société Aircelle, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 2261-7 et R. 1455-6 du code du travail ; 

Mais attendu, d’abord, que l’évolution des conditions d’acquisition par une organisation syndicale de la représentativité telle qu’elle résulte de la loi n° 789-2008 du 20 août 2008 conduit à apprécier différemment, en application de l’article L.2261-7 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, les conditions mises à la révision d’un accord collectif d’entreprise ; 

Attendu, ensuite, qu’aux termes de l’article L. 2261-7 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, les organisations syndicales de salariés représentatives, signataires d’une convention ou d’un accord ou qui y ont adhéré conformément aux dispositions de l’article L. 2261-3, sont seules habilitées à signer, dans les conditions prévues au chapitre II du livre III, les avenants portant révision de cette convention ou de cet accord ; qu’il en résulte que l’organisation syndicale de salariés qui, signataire d’un accord d’entreprise, n’est plus représentative pour la durée du cycle électoral au cours duquel la révision d’un accord d’entreprise est proposée, ne peut s’opposer à la négociation d’un tel accord ; 

Et attendu qu’ayant constaté que le syndicat CGT-FO avait perdu sa représentativité pour le cycle électoral au cours duquel les négociations de l’accord de révision ont eu lieu, la cour d’appel en a déduit à juste titre l’absence de trouble manifestement illicite justifiant la suspension de l’accord de révision ; 

D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ; 

Sur le second moyen, ci-après annexé : 

Attendu qu’ayant constaté que la preuve de l’existence de négociations séparées n’était pas rapportée, la cour d’appel a estimé, dans le cadre de son pouvoir souverain d’appréciation, que la mauvaise foi de l’employeur n’était pas établie ; que le moyen n’est pas fondé ; 

PAR CES MOTIFS : 

REJETTE le pourvoi ; 

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