Le conseil national de l’ordre des médecins (Cnom) publie le résultat de ses travaux sur les médecines naturelles (aussi appelées pratiques de soins non conventionnelles, PSNC). Leur intention est de proposer un état des lieux de ces pratiques, de leurs dérives et des actions qu’il est possible de mettre en œuvre pour mieux les cadrer. Cet encadrement ne plaira pas aux professionnels concernés qui peuvent voir dans ce projet une volonté d’entraver leur pratique.
Le Cnom annonce d’emblée qu’il n’est pas opposé aux médecines naturelles. Il reprend d’ailleurs les termes de l’Académie de Médecine qui estime qu’il faut “reconnaître le souhait de nos concitoyens de bénéficier de soins qui vont au-delà de ce que le système de soins conventionnels leur propose“. Cependant, ce qui inquiète le Cnom est le développement des PSNC qui ne sont pas réglementées et qui, selon lui, “entraîne des confusions aux conséquences non négligeables“.
En préambule du document, le Cnom indique que 20% des dossiers qu’il a eu à traiter en 2022 concernaient les médecines naturelles, soit 1 700 courriers environs. En outre, d’après les données publiées par la Miviludes (la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires), 60% des personnes qui ont recours à des PSNC sont atteintes d’un cancer et 70% des signalements dans le domaine de la santé concernent des PSNC.
Le Cnom propose donc 9 actions pour réduire au maximum le risque de dérive des médecines naturelles :
- le Cnom souhaite d’abord modifier la rédaction du code de la recherche pour mieux définir l’usage du titre de docteur. Il souhaite que les personnes qui ne sont pas titulaires d’un diplôme national de doctorat ne puissent pas faire usage du titre de docteur, ceci afin d’éviter de tromper les usagers. Ainsi le Cnom veut obliger ceux qui font usage du titre de docteur à mentionner la spécialité dans laquelle ils ont soutenu leur thèse.
- le Cnom veut aussi sanctuariser le terme “médecine” qui ne l’est pas actuellement : il propose de réserver son usage aux seules professions médicales. On parle en effet de médecine naturelle et les professionnels des PSNC en font usage également. Etant donné que l’OMS reconnaît la possibilité de parler de médecine traditionnelle, qui n’est pas nécessairement exercée par les professions médicales, cette proposition a peu de chance d’aboutir (sauf à créer des conflits terminologiques importants).
- le Cnom entend également “sensibiliser” (le mot est faible) les doyens des facultés de médecine au sujet. L’ordre des médecins veut tout bonnement réserver aux étudiants en médecine (à la limite à d’autres étudiants du secteur médical) l’entrée dans les diplômes universitaires. De plus, l’ordre veut interdire l’enseignement des médecines naturelles par DU dans les facultés de médecine.
- le Cnom propose de rappeler, par courrier, à Pôle Emploi que certains métiers référencés par un code ROME n’ont pas de diplôme reconnu par l’Etat et peuvent aboutir à des poursuites pénales pour exercice illégal de la médecine.
- la 5e proposition du Cnom consiste à contrôler de manière effective les formations professionnelles des médecines naturelles.
- le Cnom envisage aussi de renforcer la coopération avec les instances compétentes (Miviludes, Oclaesp, préfectures, Drieets, associations).
- Un projet de groupe d’appui technique sur les médecines naturelles est aussi prévu, sans date précise.
- le Cnom veut aussi surveiller davantage les travaux et positions de l’agence des médecines complémentaires adaptées (A-MCA).
- enfin le Cnom veut alerter patients et médecins, par une campagne de communication, sur “les dangers pour la santé du recours à certaines de ces pratiques, surtout lorsqu’elles ne sont pas encadrées“.
On remarque qu’à aucun moment le Cnom n’imagine des axes bâtis en commun avec les professionnels de médecine naturelle ou leurs représentants.