L’Insee souligne les inégalités de santé qui demeurent en France

L’Insee a publié son nouveau numéro d’Economie et statistique relatif à la santé et aux soins en France. 

Il s’agit d’un double numéro 475-476 qui est paru le 30 avril 2015. Ce document très complet rassemble une sélection d’articles issus des 35es Journées des économistes de la santé français (JESF) qui se sont tenues à l’université Paris-Est Créteil en décembre 2013. 

Le sujet de ce numéro d’Economie et statistique est donc la santé et les soins et s’intéresse aux modalités de prise en charge, aux déterminants sociaux, ainsi qu’aux conséquences professionnelles. Le développement est découpé en 7 parties regroupées en 3 thématiques. Il ressort du document que les inégalités de santé sont toujours présentes en France et ont plusieurs aspects. 

La première thématique abordée est liée aux coûts et à la prise en charge dans le domaine sanitaire, c’est la thématique principale. Il y est fait une analyse fine de l’impact du cumul des différents modes de remboursements par l’Assurance maladie et par les organismes complémentaires, sur le reste à charge de l’assuré. Il en ressort que le reste à charge complémentaire (RACC) des individus exonérés du ticket modérateur était, en 2002, en moyenne 70% plus élevé que celui des personnes non exonérées. 

La seconde partie du premier thème aborde la question du coût de la prise en charge des personnes âgées en perte d’autonomie. L’objectif affiché de l’analyse est d’étudier les déterminants du consentement à payer (CAP) des aidants informels pour l’aide qu’ils apportent aux personnes âgées de 75 ans et plus vivant à domicile. Il ressort de l’analyse que la distance entre lieux de vie de l’aidé et de l’aidant, la dégradation de la santé mentale où l’âge de ce dernier font partie des critères de reconnaissance des aidants informels à travers les valeurs déclarées qui leur sont associées, ainsi que leur besoin de répit. Le contexte socioéconomique joue aussi un rôle important : plus le revenu de l’aidant et celui de la personne aidée sont élevés, plus le montant du CAP est élevé. Mais le contexte socioéconomique joue aussi un rôle important car plus le revenu de l’aidant et celui de la personne aidée sont élevés, plus le montant du CAP est élevé. Ces données sont importantes pour l’avenir car avec une population vieillissante, les coûts de prise en charge à domicile des personnes âgées et des soins à long terme ne cessent d’augmenter. 

La troisième partie traite de la tarification à l’activité (T2A) mise en œuvre en 2004. Les auteurs de l’article décryptent les effets de cette réforme sur la qualité des soins. La qualité des prises en charge peut être appréhendée, d’après l’article, par le taux de réadmission à trente jours. Les résultats de l’analyse décruvent une augmentation du risque de réadmission qui s’explique par une modification de la structure de la population (vieillissement) ainsi que par les modifications de prise en charge ; et non par la mise en place de la T2A

 

La seconde thématique repose sur l’analyse des déterminants sociaux dans les inégalités face à la santé. Le premier article de ce thème s’intéresse à l’évolution des inégalités sociales dans la consommation de tabac en France selon l’âge et les générations. Sur les 3 cohortes de naissance constituées (1941-1955, 1956-1970 et 1971-1985), les auteurs remarquent plusieurs choses. En premier lieu, après avoir été plus fréquent parmi les plus diplômés, le tabagisme a reculé dans ces milieux, alors qu’il continue de progresser parmi les groupes moins diplômés. Ensuite, l’article confirme le décalage d’une génération chez les femmes par rapport aux hommes dans la diffusion du tabagisme. Les inégalités sociales face au tabagisme ressortent grandement aux âges jeunes, pour toutes les cohortes et pour les deux sexes. En résumé, les politiques de prévention du tabagisme auraient tout intérêt à cibler des catégories sociales spécifiques et des classes d’âge bien définies pour gagner en efficacité : les milieux les moins diplômés pourraient, d’après l’analyse, être une priorité. 

Le deuxième article du thème s’intéresse au lien qui existe entre le niveau de revenu familial et l’état de santé des enfants. Les résultats de l’analyse effectuée démontrent que le revenu familial a un impact sur la santé digestive et pondérale des enfants, indépendamment de l’effet de la santé des parents. Les conditions de vie de l’enfant jouent donc un rôle certain dans le cadre des inégalités sociales de la santé. 

 

La troisième thématique porte sur l’incidence de l’état de santé des individus sur leur parcours professionnel. Le premier article du thème a pour sujet les effets des arrêts maladie sur la trajectoire professionnelle. Il en ressort que les parcours professionnels sont bien plus durablement dégradés pour les personnes qui ont eu des arrêts de travail, en particulier lorsque ceux-ci sont dus à des longs épisodes de maladie. De plus, les arrêts courts constituent un facteur de risque pour les salariés dès lors que leur durée cumulée dépasse 30 jours. Les auteurs précisent d’ailleurs que les salariés prennent en compte ces risques de pénalités en limitant leur recours aux arrêts à la suite d’épisodes de chômage ou d’inactivité. L’état de santé qui entraine un ou plusieurs arrêts de travail a donc un impact direct sur l’avenir professionnel des individus d’après le document de l’Insee. 

Le second article de cette thématique concerne les effets de la survenance d’un cancer sur l’emploi, le chômage et les arrêts maladie. Les auteurs précisent d’emblée que la réduction des inégalités face à la maladie est un objectif du 3e plan cancer 2014-2019. L’article explique que l’employabilité des travailleurs atteints du cancer diminue avec le temps : déjà, la première année après le diagnostic correspond au temps des traitements caractérisé par une augmentation du nombre de trimestres d’arrêts de travail pour maladie de 1,7 pour les femmes et de 1,2 pour les hommes. La proportion de femmes et d’hommes employés au moins un trimestre, baisse respectivement de 8 et 7 points de pourcentage dans l’année suivant la survenue du cancer et jusqu’à 13 points de pourcentage cinq ans plus tard. 

 

A noter que l’introduction de ce numéro d’Economie et statistique se termine par un plaidoyer en faveur de la transparence des données de santé, limité toutefois à la recherche. Sans remettre en question leur nécessaire confidentialité, les auteurs s’expriment en faveur d’un “accès à des données exhaustives, individuelles et longitudinales pour les chercheurs”, ce qui constituerait “un atour crucial pour identifier les gains potentiels d’efficience et d’équité du système de santé”.  

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