Après plusieurs navettes parlementaires et plus de 400 heures de débat, la loi Macron fait actuellement un détour rue Montpensier, avant sa prochaine promulgation.
Tonique de ses trois titres délibérément volontaristes : « Libérer l’activité », « Investir » et « Travailler », la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, se présente à première vue comme un texte particulièrement ambitieux. Quels sont les principaux éléments novateurs de la loi ? Sous réserves de la décision à intervenir du Conseil constitutionnel, voici les 10 points à retenir ;
1. L’extension des compétences de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires
(Article 1er de la loi)
L’Araf devient l’Arafer. Cette autorité publique indépendante, dotée de la personnalité morale, a été créée par la loi n° 2009-1503 du 8 décembre 2009 relative à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports. Aux termes de l’article L. 2131-1 du code des transports, elle concourt au bon fonctionnement du service public et des activités concurrentielles de transport ferroviaire, au bénéfice des usagers et clients des services de transport ferroviaire. Par l’effet de la nouvelle loi, l’Arafer sera désormais chargée en plus, de réguler et de contrôler le secteur des services réguliers interurbains de transport routier de personnes et le secteur des autoroutes. Début 2016, l’Arafer contrôlera l’exécution des contrats de concessions autoroutières. En outre, l’ARAFER régulera le nouveau marché du transport régulier par autocar, et contrôlera ce nouveau secteur économique. (Voir le dossier de presse de l’Araf du 10 juillet 2015).
2. Développement du transport par autocar
(Article 5 de la loi).
La loi assouplit les règles de concurrence en matière de transport et libéralise les transports intercités en autocar. Elle instaure la possibilité pour les entreprises de transport public routier de personnes d’assurer des services réguliers de longues distances. Ceci devrait avoir un fort impact sur les prix.
3. Les professions juridiques réglementées
(Articles 50 et suivants de la loi).
Outre le fait que le texte organise des nouvelles modalités de nomination des notaires et des huissiers, il favorise l’emploi de salariés dans les offices publics et ministériels. La loi Macron vise à faire baisser les tarifs des administrateurs, mandataires et commissaires-priseurs judiciaires, greffiers de tribunaux de commerce, huissiers de justice et notaires et de simplifier les conditions d’installation de ces professions. Désormais, ces professionnels du droit devront afficher les tarifs qu’ils pratiquent, de manière visible et lisible, dans leur lieu d’exercice et sur leur site internet, selon des modalités fixées dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article L. 113-3 du code de la consommation.
Le texte prévoit une liberté d’installation “contrôlée” et fixe une limite d’âge à ces professions (70 ans).
Enfin, le législateur autorise le Gouvernement à créer par ordonnance, dans un délai de dix mois à compter de la promulgation de la loi, une nouvelle profession de commissaire de justice regroupant les professions d’huissier de justice et de commissaire-priseur judiciaire, de façon progressive.
4. L’ouverture des magasins le dimanche
(Articles 241 et suivants de la loi)
La loi Macron s’appuie sur les conclusions du rapport Bailly (« vers une société qui s’adapte en gardant ses valeurs ») : la spécificité du dimanche doit être respectée, il faut donner des marges de décisions aux acteurs locaux tout en renforçant les droits des salariés travaillant le dimanche.
Augmentation des « dimanches du maire » : De cinq par ans, le nombre d’ouvertures dominicales autorisées pour les commerces passe à 12. Le texte prévoit la création de “zones touristiques”, “zones commerciales” et “zones touristiques internationales” (ZTI), où les commerces pourront également être ouverts le dimanche et en soirée jusqu’à minuit. Les commerces de gares connaissant une grande affluence auront aussi cette possibilité. Des compensations pour les salariés seront arrêtées par accord de branche, d’entreprise ou territorial. Toutefois, Dans les établissements de moins de onze salariés, à défaut d’accord collectif ou d’accord conclu à un niveau territorial, l’employeur devra consulter au préalable les salariés concernés et recueillir l’approbation de la majorité d’entre eux (art., 246, I, 2°).
5. Droit du travail et Justice prud’homale
(Articles 258 et suivants de la loi).
La loi établit un barème des indemnités que pourront allouer les juges en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse et modifie l’article L. 1235-3 du code du travail (article 266 de la loi).
Le texte réorganise la juridiction du travail en vue d’accélérer les procédures.
Création d’un véritable statut de défenseur syndical (qui devient un réel acteur judiciaire et bénéficiera du statut protecteur au même titre que les actuels salariés protégés).
Le législateur supprime la peine d’emprisonnement à laquelle s’expose le chef d’entreprise en cas de délit d’entrave, et lui substitue une sanction pécuniaire doublée, à savoir 7.500 € (actuellement emprisonnement d’un an et amende de 3 750 €).
La loi sécurise les procédures de licenciement dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi. En cas d’annulation d’une décision de validation ou d’homologation du PSE en raison d’une insuffisance de motivation, l’autorité administrative prend une nouvelle décision suffisamment motivée dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à l’administration. Dans pareille hypothèse, l’annulation pour le seul motif d’insuffisance de motivation de la première décision de l’autorité administrative est sans incidence sur la validité du licenciement et ne donne lieu ni à réintégration, ni au versement d’une indemnité à la charge de l’employeur (article 292 de la loi).
6. Insaisissabilité de la résidence principale des entrepreneurs individuels
(Article 206 de la loi)
Pour les entrepreneurs individuels, est créée une insaisissabilité de plein droit de leur résidence principale, par les créanciers professionnels. Lorsque la résidence principale est utilisée en partie pour un usage professionnel, la partie non utilisée pour un usage professionnel est de droit insaisissable, sans qu’un état descriptif de division soit nécessaire.
7. Cession d’entreprise
Révision de la loi relative à l’économie sociale et solidaire (ESS) du 31 juillet 2014, dite « loi Hamon », qui oblige l’employeur à informer les salariés lorsqu’il envisage de céder son entreprise. L’on sait que le Conseil constitutionnel a récemment déclaré inconstitutionnel la sanction de nullité de la cession intervenue en méconnaissance de cette disposition. La loi Macron, semble régler le problème, puisque la sanction de nullité est remplacée par une amende civile, qui pourra être le résultat d’une action en responsabilité, et « dont le montant ne peut excéder 2 % du montant de la vente » (article 204, II, 8° de la loi). En outre, l’information des salariés ne serait obligatoire qu’en cas de vente d’un fonds de commerce ou d’au moins 50% des parts d’une SARL ou d’une SA.
8. Baux commerciaux
Le texte supprime l’obligation de recourir à un acte extrajudiciaire dans les relations entre bailleurs et locataires (article 207 de la loi).
9. Recouvrement des petites créances par huissier
L’article 208 de la loi insère un article 1244-4 au code civil aux termes duquel « une procédure simplifiée de recouvrement des petites créances peut être mise en œuvre par un huissier de justice à la demande du créancier pour le paiement d’une créance ayant une cause contractuelle ou résultant d’une obligation de caractère statutaire et inférieure à un montant défini par décret en Conseil d’État ». Cette procédure nécessitera l’accord du créancier et du débiteur sur le montant et les modalités du paiement.
10. Epargne salariale
Nouvelles modalités incitatives pour le PERCO (art. 151) Les branches professionnelles devront engager des négociations sur l’intéressement avant le 30 décembre 2017. Les entreprises de moins de 50 salariés qui concluent pour le première fois un accord de participation ou d’intéressement seront exonérées de forfait social pendant trois ans, avant de se voir appliquer, durant les années qui suivent, un taux réduit de 8 %.