Encore une fois, la France fait l’expérience de sa difficulté à s’affranchir de ses vieux dogmes: l’Etat, la lutte des classes, les clivages et les postures. Pourtant, la peur d’entrer dans un nouveau monde ne dispense pas de l’obligation de s’y adapter, même dans un contexte de forte émotion marquée par les attentats de la semaine précédente.
Samedi 10 janvier: le décret sur les mises en concurrence
La Direction de la Sécurité Sociale travaille d’arrache-pied. Elle produit texte sur texte. A la faveur d’un week-end, elle publie un décret sur les mises en concurrence en complémentaire santé dans les branches. Les fonctionnaires sont heureux: ils réglementent et justifient ainsi leur salaire A quoi sert ce décret? Il n’aborde pas la délicate question du financement discret des fédérations syndicales par des prestataires qui se concilient ainsi leurs bonnes grâces. Un oubli tout à fait dommageable.
Lundi 12 janvier: la crise de succession à la CGT rebondit
La commission exécutive de la CGT se réunit une énième fois pour trouver une solution à la crise ouverte par les frasques de Thierry Lepaon. L’intéressé a concocté un scénario qui lui fait la part belle: il reste membre de la commission, et le successeur qu’il a désigné, Philippe Martinez, secrétaire de la fédération métallurgie de la CGT, est ceinturé par les proches du démissionnaire. La méthode n’est pas très propre, mais dans l’entre-soi à l’ancienne, elle a sa cohérence: la liste proposée par Thierry Lepaon recueille une courte majorité qui laisse présager un vote difficile le lendemain, au comité confédéral national.
Mardi 13 janvier: la crise de succession à la CGT rebondit encore
Le comité confédéral national ne valide la liste de Thierry Lepaon qu’à 57%. La majorité est trop courte: il aurait fallu dix points de plus pour passer. La candidature de Martinez au secrétariat général est repoussée pour cette fois. Elle devrait passer début février. Thierry Lepaon est prié de quitter définitivement les lieux. Voilà ce qu’il en coûte de fouler trop ostensiblement aux pieds la volonté des militants. En attendant, les orientations futures de la CGT restent en suspens: lutte des classes ou réformisme, rien n’est tranché.
Le même jour, le débat sur la loi Macron commence en commission à l’Assemblée Nationale. La France parviendra-t-elle à réformer ses rigidités?
Jeudi 15 janvier: début du dernier round sur la modernisation du dialogue social
Les partenaires sociaux se retrouvent au MEDEF pour négocier en apparence un texte très technique, mais en réalité fondamental. Comment permettre aux entreprises de déroger à une loi par un accord local? Pour y arriver, il faut des organisations syndicales représentatives dans toutes les entreprises capables de négocier, y compris dans les très petites entreprises. Cette idée constitue un casus belli pour une partie du patronat qui ne veut pas lâcher la proie du dialogue collectif pour l’ombre de l’autorité patronale. La compétitivité des entreprises françaises est en jeu et, une fois de plus, la tentation maximaliste du patronat, qui est d’obtenir le beurre de la flexibilité et l’argent du beurre de l’autorité unilatérale met le dialogue social sans dessus dessous.
Vendredi 16 janvier: accord ou pas?
Il faudra suivre avec attention l’état du débat, pour être sûr qu’un accord sera bien signé entre les partenaires sociaux – un nouvel ANI qui devrait changer la place du syndicalisme dans l’entreprise. Une signature pour samedi matin? ou alors le gouvernement reprendra la main.