La cour d’appel examine l’affaire des “dames pipi”

Cet article a été initialement publié sur le site du syndicat FO.

 

L’affaire opposant les six salariées des toilettes publiques des monuments parisiens défendues par FO et le nouveau prestataire, le groupe néerlandais 2theloo, a été examinée par la cour d’appel de Paris le 22 octobre. En lutte depuis trois mois, ces dames gardent l’espoir de retrouver leur poste de travail. 

Les « dames pipi » ont retrouvé le sourire. Elles viennent de percevoir les salaires correspondant aux mois de juillet à septembre. Ils ont été versés à titre provisoire par la société Stem, leur ancien employeur, « dans une problématique humaine, pour les aider à payer le loyer et nourrir les enfants », a précisé l’avocat de FO Me Fiodor Rilov. Il a ajouté que Stem « se réserve le droit de demander un remboursement à la société Sarivo », la filiale du groupe 2theloo qui a repris le marché. 

Du point de vue judiciaire, la procédure suit son cours. Le 29 septembre, les prud’hommes de Paris avaient renvoyé l’affaire sur le fond, estimant qu’il n’y avait pas d’urgence dans ce dossier. Pourtant, ces six salariées étaient sans revenus ni employeur depuis le 9 juillet, date de la reprise du marché des toilettes publiques par Sarivo. Cette société, qui se défend d’être une société de nettoyage et affirme avoir lancé un concept novateur, refuse de reprendre les contrats de travail comme l’y oblige pourtant la convention collective du secteur.  

FO, qui accompagne six salariées dans ce dossier, avait alors fait appel à jour fixe, en référé, pour accélérer la procédure. Lors de cette troisième audience, les plaignantes ont à nouveau demandé la reprise de leur contrat de travail par Sarivo. Leur demande initiale de versement des arriérés de salaire a été convertie en provision financière de dommages et intérêts.  

Une nouvelle fois, les débats ont porté sur la nature de l’activité de la société Sarivo. Cette dernière prétend relever de la convention des entreprises de services à la personne par le biais de machines fonctionnant avec des pièces de monnaie, par référence aux tourniquets d’accès. 

 

Un soutien clair de la ville de Paris 

Mais pour Me Fiodor Rilov, les conventions passées entre la mairie de Paris et les deux sociétés ont un objet identique : gérer et exploiter des toilettes publiques, activité nécessitant du nettoyage.  

À la barre, l’avocate de la Ville de Paris, le donneur d’ordre dans cette affaire, a clairement pris le parti des dames. « La convention d’appel d’offres faisait un rappel sur la reprise des salariés, la société Sarivo doit donc les reprendre pour l’activité de gestion des lavatories », a-t-elle affirmé. 

L’avocat de Sarivo a déploré un « changement de position politique » de la mairie de Paris. Il a aussi précisé qu’entre les deux conventions, le modèle économique de gestion des toilettes avait été modifié pour devenir une concession d’occupation du domaine public, alors que son prédécesseur était rémunéré par la ville. 

L’avocate générale, qui représente la société durant l’instance, a tenu à prendre la parole – une démarche assez rare – en faveur des salariées. Elle s’est interrogée sur les différences entre les deux conventions : le nouveau statut juridique, l’entrée qui devient payante, les gros travaux désormais à la charge du repreneur ou la création d’un showroom avec des produits de luxe…  

« Il y a un transfert des lieux ou de l’utilisation des lieux, de l’activité et des usagers, a-t-elle conclu. L’activité principale reste la gestion de lavatories, donc du nettoyage. Les salariés doivent passer à la seconde entreprise. 

L’avocate générale a aussi rappelé que dans la jurisprudence, le non-paiement des salaires sans licenciement constituait un trouble illicite et justifiait une action en urgence. Elle a évoqué la possibilité de mettre en place une mesure conservatoire même en cas de contestation sérieuse. Elle a précisé que généralement, dans ce genre d’affaires, le paiement des salaires était à la charge des deux sociétés, dans l’attente d’une décision sur le fond.  

Les « dames pipi » devront attendre le rendu de l’arrêt le 26 novembre pour être fixées sur leur sort. « Ils se renvoient tous la balle, mais on sait qu’on ne gagne pas d’un coup, on continue à se battre », préviennent-elles, confiantes. 

 

 

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