La chambre sociale de la Cour de cassation a rendu une décision le 15 mars 2016 portant sur la désignation d’un expert par le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et des frais qui sont à la charge de l’employeur. Cette décision est dans la droite ligne des jurisprudences précédentes mais ne sera bientôt plus de rigueur.
Les faits à l’origine de l’instance
Le CHSCT de l’établissement de Joué-les-Tours de la société Michelin a décidé d’avoir recours à la mesure d’expertise prévue par l’article L. 4614-12 du code du travail, qu’il a confiée à la société Intervention sociale et alternatives en santé au travail (ISAST).
En référé, le président du tribunal de grande instance a rejeté, le 17 février 2009, la contestation de l’employeur sur la nécessité du recours à expertise.
Mais le 1er juillet 2009, la cour d’appel a annulé la délibération du CHSCT et a condamné l’employeur au paiement des frais irrépétibles et des dépens. La société ISAST a alors saisi le président du tribunal de grande instance d’une demande de recouvrement de ses honoraires formée à l’encontre de l’employeur. La cour d’appel a rejeté cette demande au motif que l’expert aurait dû attendre l’issue de la procédure de contestation de la délibération du CHSCT avant de procéder à son expertise.
Le problème posé est donc de savoir si l’employeur doit s’acquitter des frais d’expertise décidée par délibération du CHSCT, même si cette délibération a été annulée par la suite.
Une solution dans la ligne de la jurisprudence de la Cour de cassation
Avant de donner sa décision, la Cour de cassation rappelle que d’après le Conseil constitutionnel, par décision 2015-500 QPC du 27 novembre 2015, il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que lorsque le CHSCT décide de faire appel à un expert agréé en application de l’article L. 4614-12 du code du travail, les frais de l’expertise demeurent à la charge de l’employeur, même lorsque ce dernier obtient l’annulation en justice de la délibération ayant décidé de recourir à l’expertise après que l’expert désigné a accompli sa mission.
Cependant, le Conseil constitutionnel énonce que ces dispositions (1er alinéa et 1ère phrase de l’alinéa 2 de l’article L. 4614-13 du Code du travail) sont contraires à la Constitution et doivent être supprimées. Mais cette suppression n’interviendra pas avant le 1er janvier 2017. Jusqu’à cette date, c’est donc la jurisprudence constante de la Cour de cassation qui s’applique.
La Cour de cassation précise par conséquent que la cour d’appel a méconnu la portée de ces textes en rejetant la demande en paiement de la société ISAST. En effet, en cas d’annulation de la délibération du CHSCT décidant de l’expertise, l’employeur est encore tenu, jusqu’au 1er janvier 2017, au paiement des honoraires de l’expert.