Le statut de jeune entreprise innovante, ou JEI, vient de faire l’objet d’une décision du Conseil constitutionnel. Cette décision nous explique que l’instabilité d’exonération sociale et fiscale découlant du statut de JEI n’est pas contraire à la Constitution.
Le régime d’exonération JEI est complexe et l’Etat ne s’est pas privé de le modifier au fil des années. Des entreprises bénéficiant du statut de JEI ont donc dû s’adapter en cours de route aux nouveaux critères d’exonération, même quand ils sont devenus moins favorables. C’est ce que reproche une entreprise à l’Etat en contestant la constitutionnalité d’une modification du régime d’exonération JEI.
Les JEI à la merci des revirements de l’Etat
La situation est simple et pourrait concerner n’importe quelle entreprise. En 2006, une entreprise a obtenu le statut de JEI lui permettant de bénéficier des exonérations sociales et fiscales conditionnées à des plafonds prévus par la loi de finances pour 2004.
Mais la loi de finance pour 2011 est venue abaisser le montant de ces plafonds d’exonération. L’entreprise, de bonne foi, a cru bon de continuer à demander et obtenir une exonération de charges JEI basée sur les plafonds initiaux.
C’était sans compter sur les URSSAF qui ont décider de réclamer le paiement des cotisations impayées avec les majorations de retard.
L’instabilité d’exonération : facteur de risque pour la JEI
Le fond du problème soulevé par l’entreprise réside dans l’imprévisibilité des conditions d’exonération des JEI. Les jeunes entreprises ont besoin de stabilité pour définir un budget et une politique qui lui permettront de se développer. Un fait que l’administration, semble avoir des difficultés à concevoir.
L’entreprise en cause s’était créée sur une base fixe d’exonération attendue sur sept années. Mais l’Etat a décidé, en cours de route, de revoir à la baisse les montants d’exonération qu’il était possible d’obtenir.
Or, le Conseil constitutionnel indique que le fait que les modalités de calcul des exonérations JEI changent n’est pas contraire à la Constitution. Cela, même pour les entreprises qui avaient déjà obtenu le statut JEI leur conférant des exonérations plus favorables.
Dans ce cadre, les perspectives d’exonération des JEI peuvent difficilement être prévisibles sur le long terme alors que tout entrepreneur a besoin de visibilité pour vivre sereinement.
Les JEI sont donc prévenues, elles doivent s’adapter, quelles que soient les conséquences sur leurs finances, à chaque nouvelle modification de calcul des exonérations.
Quelques extraits choisis de la décision du Conseil constitutionnel :
“L’article 131 de la loi du 30 décembre 2003, dans sa rédaction initiale, a institué un dispositif d’exonération totale des cotisations sociales patronales afin de favoriser le développement et la pérennité de ces entreprises.”
“Il est à tout moment loisible au législateur […] de modifier des textes antérieurs ou d’abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d’autres dispositions. Ce faisant, il ne saurait priver de garanties légales des exigences constitutionnelles. En particulier, il ne saurait, sans motif d’intérêt général suffisant, ni porter atteinte aux situations légalement acquises ni remettre en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations.”
“les dispositions contestées, qui ne disposent que pour l’avenir, ne s’appliquent pas aux cotisations dues à raison des gains et rémunérations versées avant leur entrée en vigueur. Elles n’ont donc pas porté atteinte à des situations légalement acquises. […] les dispositions contestées des paragraphes I et V de l’article 131 de la loi du 30 décembre 2003 n’ont pas remis en cause les effets qui pouvaient être légitimement attendus de situations légalement acquises sur le fondement des rédactions antérieures de cet article“