Cette publication provient du site du syndicat de salariés CFDT.
Un licenciement pour faute grave est justifié par la dissimulation, de manière volontaire et persistante, d’un trop perçu de rémunération. C’est ce que juge la Cour de cassation au regard de la grande autonomie de la salariée dans ses fonctions et du fait qu’elle s’occupe seule de l’encaissement. Cass.soc.11.09.19, n°18-19522.
Attention à bien vérifier sa fiche de paie et à signaler toute erreur ! Votre silence sur une erreur de l’employeur conduisant à un percevoir un double salaire pourrait justifier un licenciement pour faute grave.
- Faits, procédure
Un employeur s’aperçoit qu’une salariée lui a, volontairement et pendant plusieurs mois, caché que lui avait été versé un trop perçu de rémunération, dont le montant avoisinait les 25 000 euros. Cette erreur de l’employeur faisait suite à la mise en place d’un virement bancaire. Certains salariés avaient bien signalé à l’employeur un trop-perçu. Mais la salariée concernée par l’affaire avait omis d’avertir son employeur du double versement de son salaire pendant plusieurs mois. Lorsque l’employeur s’en aperçoit, la salariée n’est pas en mesure de le rembourser. Il décide alors de la licencier pour faute grave.
La salariée décide de contester le bien fondé de son licenciement au motif que son comportement ne caractérisait pas une faute grave. En outre, selon elle, des difficultés personnelles pouvaient expliquer qu’elle ne s’en soit pas rendu compte.
Les juges du fond ne la suivent pas et donnent raison à l’employeur. La salariée décide alors de se pourvoir en cassation.
- La dissimulation d’un trop-perçu peut conduire à un licenciement pour faute grave
La Cour de cassation confirme la position des juges du fond et valide le licenciement pour faute grave.
Dans l’attendu de principe, les juges de la Cour de cassation soulignent « le caractère volontaire et persistant de la dissimulation à l’employeur de l’existence d’un trop-perçu de rémunération, y compris après la réclamation de l’employeur du trop-perçu pour une partie de la période concernée ».
Il est également tenu compte du fait que « la salariée exerçant avec beaucoup d’autonomie des fonctions de vendeuse sur les marchés et s‘occupant seule de l’encaissement du produit des ventes, constituaient une faute grave rendant impossible le maintien de la salariée dans l’entreprise ».
A la lecture de cet attendu, il semble que ce ne soit pas le trop-perçu de rémunération (dû à une erreur de l’employeur) qui soit remis en cause mais bel et bien le fait que la salariée n’ait pas averti son employeur et ce, pendant plusieurs mois alors qu’il lui avait été donné l’occasion d’en faire part lors de l’alerte de ses collègues.
- Une grande autonomie dans les fonctions est une circonstance aggravante
Les juges justifient également la faute grave et donc l’impossibilité de maintenir la salariée dans l’entreprise du fait de la grande autonomie dans ses fonctions et qu’elle s’occupe seule de l’encaissement. Ce qui laisse entendre que le comportement de la salariée met fin à la relation de confiance avec l’employeur et caractérise un manquement à l’obligation de loyauté dans l’exécution du contrat de travail.
- Une arrêt non publié à prendre avec précaution
En principe, le trop –perçu de rémunération, suite à une erreur de l’employeur, n’est pas un motif de licenciement et encore moins pour faute grave.
Dans cette affaire, c’est clairement dissimulation volontaire qui a conduit les juges à valider le licenciement pour faute grave de la salariée. D’ailleurs l’attendu de principe de la Haute Cour reprend expressement ces faits pour étayer sa décision. En outre, l’arrêt n’est pas publié au bulletin officiel.
En effet, la salariée a dissimulé volontairement et pendant plusieurs mois le versement d’un double salaire. La somme perçue laisse à penser qu’il était difficile (voire impossible) de ne pas s’en apercevoir. Pour rappel, cette somme avoisinée un total de 25000 euros.
Pour éviter cette situation, le mieux est donc encore de signaler à votre employeur une erreur de rémunération et ce, dans les plus brefs délais.
L’article L.3245-1 du Code du travail prévoit que « l’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat ».