Congrès de la CGT : une base électorale qui pose certaines questions

Cette semaine, Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, a annoncé qu’il serait candidat à sa propre succession à l’occasion du prochain congrès de la CGT, qui doit se tenir à Dijon du 13 au 17 mai prochain. A priori seul candidat en lice, il ne devrait pas avoir de difficulté à se maintenir à la tête de l’organisation.

 

Son succès étant annoncé, il n’en demeure pas moins que la définition de la base électorale de la CGT pose certaines questions. 

De curieuses affaires

Tout commence par plusieurs affaires à propos desquelles nous avons été amené à connaître certains éléments. Des adhérents de la CGT auraient pu constater, ces derniers mois, qu’ils étaient inscrits comme cotisants auprès de structures où ils n’ont pourtant jamais travaillé. Autrement dit : ils ont été affiliés par leur union départementale à une structure d’appartenance – entreprise ou association – qui n’a jamais été leur employeur. 

Interpellés par cette affiliation exotique, certains d’entre ces adhérents ont cherché à en savoir un peu plus. En attente de plus amples investigations, de premiers éléments de réponse leur ont été donnés. La centrale aurait exprimé son étonnement du fait que des adhérents aient pu avoir accès aux informations relatives à leur cotisation. Elle aurait en effet décrit comme étant très limité l’accès au système d’information de la CGT où sont enregistrées les données liées aux adhérents, dit système “Cogitiel”. 

La CGT hors zone RGPD ?

Cette affaire pose d’une part la question de la manière dont la CGT appréhende l’enjeu de la protection des données de ses adhérents. En soi, il peut, certes, apparaître louable d’avoir mis en place un accès limité au système centralisé de gestion de ces données. Il est en effet important de s’assurer que n’importe quel responsable cégétiste ne peut ni accéder aux informations de chaque adhérent ni les modifier. Par exemple afin d’affilier un adhérent à une structure où il n’a jamais travaillé – fait qui peut s’avérer utile à plusieurs fins… Hélas donc pour la CGT et pour ses adhérents, il faut croire que l’accès au Cogitiel n’est pas encore assez restreint. 

Et, dans le même temps, qu’il l’est également trop. En application du RGPD – mis en oeuvre, justement, afin d’éviter, entre autres, les problèmes du type de celui dont il est ici question – les adhérents d’une organisation doivent en effet pouvoir accéder aisément aux informations qui sont détenues les concernant par ladite organisation, et également, si nécessaire, les modifier. La CGT applique-t-elle bien le RGPD ? C’est en tout cas par hasard que des adhérents découvrent leur mauvaise affiliation. Surtout, il s’avère difficile pour eux d’en savoir plus sur les informations contenues à leur sujet dans le Cogitiel – sans même parler de leur modification. 

Décidément, l’accès et la gestion du Cogitiel sont mal calibrés ! 

Un électorat CGT localement problématique

Outre cette première question liée à la gestion des données personnelles, une seconde se pose, bien plus politique car liée cette fois-ci à la manière dont est défini l’électorat de la CGT. Imaginerait-on, dans le cadre par exemple d’élections locales, que ce soient les élus locaux eux-mêmes qui décident du lieu où seraient inscrits les électeurs ? Ceci pourrait donner lieu à bien des arrangements fort intéressants pour lesdits élus. Si cette affaire venait à être confirmée, ce fonctionnement correspondrait pourtant à celui appliqué dans certaines organisations territoriales de la CGT. Certains responsables cégétistes locaux semblent prêts à s’accommoder avec certaines règles. Afin de pousser leurs pions ? 

Plus généralement et de manière plus diffuse, le flou qui entoure la gestion des données personnelles des adhérents de la CGT entretient inévitablement un doute sur la fiabilité même de la base électorale cégétiste. On voit en effet mal comment l’électorat cégétiste pourrait être clairement établi dans le cas où l’identité des adhérents serait définie et gérée de manière problématique. 

Et Philippe Martinez dans tout ça ?

Philippe Martinez ne devrait pas négliger l’importance de tous ces problèmes. Au-delà du fait que la gestion des données personnelles des adhérents de la CGT est un problème qui, en soi, doit être pris au sérieux, c’est, plus fondamentalement, la légitimité même de son poste de secrétaire général qui pourrait être critiquée. Les légèretés prises par quelques responsables locaux avec la gestion des données des adhérents pourraient finir par lui nuire. 

A la CGT, certains en viennent même à se demander si ce n’est pas, d’ailleurs, l’objectif desdits responsables. Après l’affaire de la fiche – douteuse – dite de la lutte contre la présence médiatique de l’extrême-droite, il est vrai que l’on peut se poser la question. 

Interrogé sur ces questions, Philippe Martinez ne nous a pas encore répondu. 

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