Dans son édition du 21 février, le Canard Enchainé publiait une lettre du directeur du CHU de Clermont-Ferrand dans laquelle il accusait un médecin de « ne pas rapporter assez d’argent » en ne pratiquant pas assez d’opérations et en abusant de la chirurgie ambulatoire.
Le chemin pour généraliser la chirurgie ambulatoire est encore très long si l’on en croit le Canard Enchainé. Le journal satirique a mis la main sur une lettre du directeur du CHU de Clermont-Ferrand qui critiquait un médecin qui ne pratiquait pas assez d’opérations. Cette pratique ferait porter un poids financier important sur l’hôpital.
« Vous ne rapportez pas assez d’argent à l’hôpital »
La formule, si elle est plus que critiquable, a au moins le don d’être très claire. Le directeur du CHU accuse un praticien de trop pratiquer les soins ambulatoires. Une catégorie de soins qui ne serait pas assez rentable pour l’hôpital. Néanmoins, on sait aussi que la chirurgie ambulatoire, en plus de revenir moins cher à la Sécurité Sociale, permet aux patients de réduire les coûts de leurs soins mais aussi la durée de ces derniers.
Seulement, il semblerait que cette réduction de coûts de la patientèle entraînerait une perte de recettes. Dans sa missive, le directeur du CHU montre que le service ORL accuserait une perte de 467 000€.
La CGT attaque, le DG tente la défense
Les réactions ne se sont pas faites attendre. La CGT déclare que ces missives sont « très révélatrices de la situation dans laquelle se trouvent les établissements hospitaliers français. On prend la santé pour de la marchandise. Les directeurs des centres hospitaliers ont la pression de l’Agence Régionale de la Santé. Ils doivent récupérer l’équilibre. Le CHU est en déficit de 11 millions d’euros sur l’année 2017. La pression est uniquement économique. On oublie les besoins des patients et on ne se préoccupe que du côté économique. »
De son côté, le directeur général Didier Hoeltgen se défend en affirmant qu’il s’agit d’un dialogue sur l’activité médicale « tout à fait habituel et logique » entre la direction et les chefs de service dans un soucis de bonne gestion. Pour autant, il assure ne jamais s’immiscer dans le diagnostic médical des patients.
Rien n’est donc plus normal que d’établir cette discussion concernant la nature de l’activité, les financements publics ainsi que les dépenses et les recettes qui procèdent de cette activité.
S’il est effectivement logique et normal de parler recettes et dépenses même dans un CHU, on ne peut que déplorer la forme de ce dialogue que met en évidence le Canard Enchaîné. L’interprétation qui en est faîte est plus claire : l’hôpital souhaite réduire l’activité ambulatoire afin de maximiser ses recettes.
Développer l’activité ambulatoire est-il vraiment possible ?
Plutôt que de jeter la pierre uniquement sur le CHU de Clermont-Ferrand, il convient de revoir le discours politique et sa volonté de développer l’activité ambulatoire en France. La question posée est très simple : est-il possible de la développer alors que le contexte économique actuel des hôpitaux est fragile ?
Pour Didier Hoeltgen, la réponse est oui si la balance financière de l’établissement concernée est positive. Sinon, c’est impossible. Dans ce cas, c’est peut-être sur une refonte entière du système financier lié aux hôpitaux qu’il faudra se pencher. Car depuis l’instauration en 2004 de la tarification de l’activité, plus un hôpital opère et plus il gagne de l’argent.
Joint par mail, le ministère de la Santé n’a pas souhaité s’exprimer sur cette polémique ni sur son plan pour faire adhérer les directeurs de CHU au développement de la chirurgie ambulatoire.
Reste que le CHU de Clermont-Ferrand n’en est pas à sa première polémique. En 2015, la salle de garde de l’internat se retrouvait affublée d’une fresqueparticulièrement obscène.