Les partenaires sociaux se retrouvaient hier pour une troisième séance de leur négociation paritaire sur l’avenir des régimes de retraite, afin d’aborder notamment les thèmes liés à l’emploi des seniors et aux carrières longues.

A l’occasion de cette nouvelle réunion, le patronat et les syndicats ont affiché leurs nettes divergences de vues sur le sujet des carrières longues.
Offensive patronale sur les carrières longues
Du point de la représentation des employeurs, cette discussion devait être l’occasion d’une remise à plat du dispositif des carrières longues – initialement créé en 2003 et renforcé par la dernière réforme des retraites. Ayant rappelé que près d’un quart des départs à la retraite se réalisait dans le cadre de ce dispositif, Diane Milleron-Deperrois, la négociatrice en chef du MEDEF, en a tiré la conclusion qu’il s’était progressivement “éloigné de sa cible initiale”. Il ne bénéficierait en effet plus uniquement à des salariés dont entrés tôt dans leur vie, de manière définitive sur le marché du travail, mais également à beaucoup de salariés ayant occupé des emplois saisonniers ou des emplois étudiants, par exemple. Repenser le dispositif des carrières longues permettrait donc, certes, de réaliser des économies budgétaires, mais également de répondre à un “principe d’équité” entre les salariés. Ce positionnement était défendu par la CPME, pour des motifs et dans des termes comparables.
Une discussion refusée par les syndicats
C’est peu dire que le projet patronal pour l’évolution de la prise en compte des carrières longues n’a guère plu aux représentants des salariés français. De manière unanime, ils ont, chacun à leur manière, fait savoir qu’ils n’entendaient pas s’engager dans de tels échanges. Pour la CFDT, ce thème doit être abordé en même temps que celui de la pénibilité – sous-entendu : comme l’un des éléments de compensation de celle-ci, et pas nécessairement avec des visées de durcissement du régime. La CGT, pour sa part, a appelé à une nouvelle amélioration du dispositif, destinée à prendre en compte le cas des salariés, souvent d’ailleurs des femmes, ne pouvant pas justifier de carrière complète une fois arrivés à l’âge de la retraite. Même la CFTC, organisation que l’on qualifiera difficilement de radicale, a estimé que l’amélioration de la prise en compte des carrières longues “est l’un des rares points positifs de la réforme de 2023” et qu’elle n’avait par conséquent “pas du tout l’intention de [le] revoir”.
Une négociation aux perspectives toujours aussi incertaines
Les échanges paritaires, on l’imagine aisément, ont rapidement dû tourner en rond. De fait, ce n’est pas la séance de négociation d’hier qui a permis d’esquisser une voie pour ce qui pourrait être un accord paritaire sur les retraites. Il faut d’ailleurs bien reconnaître, à ce sujet, que les perspectives générales de cette négociation sont toujours aussi incertaines. D’un côté, les syndicats de salariés escomptent en obtenir un assouplissement de la réforme de 2023, en particulier sur l’enjeu de l’âge de la retraite. De l’autre, le patronat français se fait le défenseur intransigeant – et on ne peut pas vraiment l’en blâmer étant donné la situation budgétaire de notre pays – du principe de la remise à l’équilibre comptable durable des régimes de retraite. Enfin, tout en prétendant laisser les partenaires sociaux entièrement libres de leurs mouvements, l’exécutif ne peut s’empêcher de s’immiscer régulièrement dans le débat, pour appeler, de fait, à un durcissement de la réforme de 2023. Tous les ingrédients semblent décidément réunis pour que les discussions en viennent à capoter.