A l’occasion d’une conférence de presse organisée hier, le directeur de la caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), Thomas Fatôme, s’est emparé du sujet, sensible aussi bien d’un point de vue social que d’un point de vue budgétaire, de la hausse structurelle du recours aux arrêts de travail par les assurés sociaux.
Pointant du doigt une évolution trop dynamique du nombre des arrêts de travail et de leur coût, la Sécurité sociale veut renforcer sa politique de gestion de ce risque.
Des arrêts maladie en grande forme
Revenant sur l’état du recours aux arrêts de travail par les assurés sociaux, le directeur de la CNAM a rappelé son caractère dynamique sur le long terme. Sans prendre en compte la sinistralité due au Covid-19, les dépenses annuelles de la Sécurité sociale en matière d’indemnités journalières sont passées de 10,4 à 15,8 milliards d’euros entre 2015 et 2023. Ceci correspond à une progression annuelle moyenne d’environ 5,2 % par an – faisant de ce poste de dépenses l’un plus dynamiques des dépenses de santé. Selon toute hypothèse, l’année 2024 devrait prolonger cette trajectoire, puisque Thomas Fatôme a rapporté que les dépenses d’arrêts de travail avaient, en incluant les accidents du travail et maladies professionnelles, progressé de 8 % au premier semestre 2024. Le seuil des 17 milliards d’euros de dépenses est en vue.
Des structures qui n’expliquent pas tout
Afin de rendre compte de cette forte progression du recours aux arrêts de travail, le directeur de la CNAM a d’une part concédé qu’elle procédait majoritairement d’évolutions structurelles, aussi bien de la sinistralité que de l’environnement économique : évolution de la population active, notamment dans le sens de son vieillissement, ou hausse des salaires, par exemple. Mais ces éléments sont pourtant loin d’être suffisants afin d’expliquer cette forte progression. D’après les calculs de la CNAM, plus de 40 % des hausses de dépenses résulteraient en effet d’autres facteurs. “C’est un débat important, difficile, compliqué”, s’est avancé Thomas Fatôme, qui a invoqué des facteurs liés “à l’état de santé d’une partie de la population, aux conditions de vie au travail”, voire à un “rapport au travail différent”.
La pression de la CNAM sur les arrêts de travail
Partant de tout ceci, le directeur de la CNAM a jugé qu’il fallait approfondir la réflexion et l’action contre le recours trop important aux arrêts de travail. Dans cet objectif, il a d’abord appelé à “mettre tous les acteurs autour de la table”, à la fois du côté des pouvoirs publics et des représentants du monde du travail. Plus immédiatement, il a assuré que la CNAM allait “relancer” et “amplifier” sa lutte contre les recours abusifs ou excessifs aux arrêts de travail – soit un objectif plus large que celui de la lutte contre la seule fraude. Si cette politique fait grincer des dents du côté des professionnels de santé et des syndicats de salariés, elle a en tout cas permis à la Sécurité sociale de réaliser, l’an passé, plus de 200 millions d’euros d’économies – soit un chiffre, certes, nettement inférieur à celui de la progression des dépenses d’arrêts de travail.