Assurance chômage : la CFDT fait son point de la rentrée

Cette publication est issue du site du syndicat de salariés CFDT

 

Au cœur de l’été, deux décrets (1) relatifs à l’assurance chômage ont été publiés, soit presque 1 an après la demande du Premier ministre pressant une renégociation du régime… 

Nous étudierons ici trois nouveautés issues du décret relatif au régime d’assurance chômage (2) applicables dès le 1er novembre : conditions d’ouverture des droits, rechargement des droits et coefficient de dégressivité pour les hauts revenus. 

La loi “Avenir professionnel” du 5 septembre 2018 a réformé en profondeur les règles de fonctionnement de l’assurance chômage, tandis que la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2019 avait substantiellement modifié le financement du régime. Celui-ci s’appuie désormais pour 1/3 sur l’impôt, au travers de la CSG, suite à la suppression des cotisations salariés. 

Les trois nouvelles mesures qui entrent en vigueur au 1er novembre 2019 sont issues d’un décret qui fait suite à l’échec de la négociation (en)cadrée par le Gouvernement. Ainsi, et il faut le marteler, c’est bien le Gouvernement, et lui seul, qui a décidé d’un durcissement des conditions d’attribution et de versement de l’allocation de retour à l’emploi (ARE). 

  • Les nouvelles conditions d’ouverture des droits

Depuis 2008, la convention d’assurance chômage prévoit une ouverture des droits au chômage dès 4 mois d’activité (88 jours travaillés ou 610 heures travaillées) sur une période de 28 mois pour les salariés de moins de 53 ans. Cette assiette large permet, jusqu’au 1er novembre 2019, d’intégrer des salariés qui subissent de plein fouet la précarité. 

Au 1er novembre, un nouveau seuil d’entrée de 6 mois (soit 130 jours travaillés ou 910 heures) dans les 24 derniers mois est mis en place, sauf exceptions pour les salariés de 53 ans et plus (3). 

 

 

 

Les conséquences vont être importantes pour les plus précaires (économie attendue de l’ordre d’1 milliard d’euros par an, chiffrage précis à venir de l’Unédic). A noter que paradoxalement, cette mesure va permettre de rester plus longtemps « enfermé » au chômage, pour reprendre les termes du Gouvernement, puisque la durée d’indemnisation minimale va passer de 4 à 6 mois. 

Cette modification n’est pas vraiment une surprise, même si l’on peut remarquer que ni la loi Avenir professionnel, ni la lettre de cadrage du Premier ministre, ne visaient spécifiquement ce paramètre. En revanche, ce qui constitue une surprise, c’est de l’avoir conjuguée avec l’allongement de la période d’activité pour ouvrir des droits et réduction de la période sur laquelle est recherché l’activité… Le Medef, lors des discussions paritaires, semblait envisager soit l’un soit l’autre, mais pas en même temps !  

  • Le rechargement des droits

Le dispositif crée en 2014 (4) (suite à l’ANI de 2013) permet d’inciter à la reprise d’un travail sans craindre de perdre son reliquat de droit au chômage et d’assurer ainsi un filet de sécurité au salarié qui se lance dans un nouveau travail. La réforme maintient le principe du rechargement des droits mais le prive de son utilité… 

Il faut dire d’emblée que la lettre de cadrage était très explicite sur le sujet, consacrant même un sous-titre à ce point (5). Pour le Gouvernement, les règles du rechargement enferment dans la précarité. La pilule, après les ordonnances, a du mal à passer, alors que près de la moitié des chômeurs indemnisés ont une activité !  

Au 1er novembre, le Gouvernement aligne le rechargement des droits sur les conditions initiales d’ouverture du droit, à savoir 6 mois. Ainsi pour répondre à l’effet d’enfermement des petits jobs, le gouvernement choisi non pas de durcir les règles des petits jobs mais de supprimer le filet de sécurité que constituait les droits rechargeables.  

  • La dégressivité du revenu de remplacement

Cette dernière mesure, qui va entrer en vigueur au 1er novembre 2019, part du principe que les hauts revenus profitent du système pour s’accorder un temps de repos, ou en tous les cas que leur revenu de remplacement trop élevé est un frein à une reprise rapide du travail. 

IL A DONC ÉTÉ DÉCIDÉ PAR LE GOUVERNEMENT DE BAISSER D’UN COUP DE 30 % L’ALLOCATION DE RETOUR À L’EMPLOI À PARTIR DU 183È JOUR, SOIT AU 7È MOIS. 

 

On comprend assez mal en quoi cette mesure est dégressive, puisqu’au contraire, la coupe est nette ! Cette mesure concerne les salariés de moins de 53 ans ayant un revenu supérieur à 4 500 euros bruts. Un plancher a été instauré : le revenu de remplacement de ces salariés ne pourra jamais être inférieur à 2261 € net. 

LES SALARIÉS AU-DESSOUS DE 4 500 EUROS BRUTS NE SERONT PAS CONCERNÉS PAR LA MESURE. 

Ainsi, le salarié qui perçoit 4 499 € bruts maintiendra son revenu de remplacement à 100 % pendant la durée de l’indemnisation… Cette mesure ne va toucher, selon le ministère du Travail, que 10 % des salariés les mieux rémunérés de notre pays. 

Sur ce point, on peut renvoyer à la lettre de cadrage, qui invitait les partenaires sociaux à corriger le fait que « des règles identiques pour tous, sous l’apparence de l’égalité ne tiennent pas compte des différences de capacité à retrouver un emploi. » Si on voulait faire un peu de mauvais esprit, ce qui n’est pas notre intention en cette rentrée, on pourrait se demander si cet argument n’aurait pas été mieux utilisé pour le barème prud’homal… 


(1)JO du 28 juillet : 

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJO.do?idJO=JORFCONT000038829057&fastPos=1&fastReqId=600531058 

 

(2) Décret n° 2019-797 du 26.07.19 relatif au régime d’assurance chômage. 

(3) Pour ces salariés, la période de recherche d’affiliation reste sur les 36 mois qui précèdent la fin du contrat de travail (terme du préavis). 

(4) ANI du 22 mars 2014. 

(5) « titre 2.1 : revoir les règles du cumul pour lutter contre la précarité et inciter à la reprise d’un emploi durable ». 

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