La CFDT se réjouit de la protection accordée aux salariés membres d’une commission paritaire

Cet article provient du site du syndicat CFDT.

 

La Cour de cassation vient de reconnaître, dans un arrêt publié sur son site internet, que les salariés mandatés par une organisation syndicale pour siéger au sein d’une commission paritaire créée par voie d’accord collectif bénéficient, eux aussi, de la protection contre le licenciement, au même titre que les délégués syndicaux. Le licenciement doit donc être autorisé préalablement par l’inspection du travail. Cass.soc. 01.02.17, n°15-24310. 

L’article L. 2234-1 du Code du travail, issu de la loi du 4 mai 2004 (1), prévoit la mise en place de commissions paritaires professionnelles ou interprofessionnelles au niveau local, départemental ou régional par voie d’accord collectif. L’article L. 2234-3 précise que ces accords déterminent les modalités de protection contre le licenciement des salariés membres de ces commissions et les conditions dans lesquelles ils bénéficient de la protection prévue par les dispositions relatives aux salariés protégés. 

Faits, procédureDans cette affaire, un géomètre-expert est mandaté par une organisation syndicale afin de siéger au sein de la de la commission paritaire nationale pour l’emploi et la formation professionnelle (CPNEFP). Cette commission est instaurée par voie conventionnelle, plus précisément par la convention collective nationale des cabinets ou entreprises de géomètres-experts.Suite à son licenciement, le salarié mandaté soutient qu’en tant que membre de la CPNEFP, il bénéficie du statut protecteur et donc que son licenciement ne peut se faire sans l’autorisation de l’inspection du travail.La cour d’appel déboute le salarié. Pour elle, il ne peut être considéré comme salarié protégé du fait que son mandat ne figure pas dans la liste de ceux bénéficiant d’une protection (2). En outre, la convention collective précise qu’une protection contre le licenciement existe seulement pour les représentants syndicaux de salariés siégeant à une commission paritaire régionale – et non nationale, comme c’est le cas en l’espèce.Saisi d’un pourvoi par le mandaté, la Cour de cassation a dû répondre à la question suivante : les salariés mandatés pour siéger au sein d’une commission paritaire mise en place par voie conventionnelle (et n’ayant aucun autre mandat syndical les protégeant par ailleurs) peuvent-il bénéficier du statut protecteur au même titre qu’un délégué syndical ? 

Application du statut protecteur, au même titre que les délégués syndicauxLa Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel et donne raison au mandaté. Elle justifie sa décision au motif qu’à travers les dispositions légales (art. L. 2234-1 et L.2234-3 du Code du travail) prévoyant que les accords instituant des commissions paritaires professionnelles au plan local, départemental ou régional déterminent les modalités de protection des salariés qui en sont membres, le législateur a voulu que ces salariés mandatés puissent bénéficier de la protection contre le licenciement conférée aux délégués syndicaux. L’inspection du travail doit donc autoriser préalablement leur licenciement.La Haute Cour ajoute que « ces dispositions, qui sont d’ordre public en raison de leur objet, s’imposent en vertu des principes généraux du droit du travail». En visant l’article L. 2251-1 du Code du travail, elle rappelle que « les conventions et accords collectifs de travail ne peuvent déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d’ordre public ».Aussi, peu importe que l’accord collectif prévoie ou non cette protection, le salarié mandaté y aura droit ! Interdiction donc d’écarter la protection contre le licenciement. 

Quelles sont les commissions paritaires visées ?La Cour de cassation précise que ces dispositions légales s’imposent « à toutes les commissions paritaires professionnelles ou interprofessionnelles créées par accord collectif, y compris celles créées par des accords antérieurs à l’entrée en vigueur de la loi du 4 mai 2004 ». Les juges font expressément référence « à toutes commissions », aussi peu importe que celles-ci soient mises en place au niveau national comme en l’espèce. La Haute Cour va ainsi au-delà de ce que prévoit le Code du travail, qui ne mentionne que la mise en place au niveau local, départemental ou encore régional.  

Solution identique à la position récente du Conseil d’EtatLe Conseil d’Etat, saisi sur la même question en mai 2016 (3), a également répondu par la positive, accordant ainsi le statut protecteur au salarié mandaté.En l’espèce, il s’agissait de la convention collective nationale des entreprises d’architecture, qui ne prévoyait pas de protection pour les salariés mandatés siégeant au sein d’une commission paritaire régionale. Cette protection était réservée aux seuls délégués syndicaux et représentants des élus du personnel. L’employeur avait toutefois demandé l’autorisation de licencier le salarié à l’inspection du travail, qui avait refusé de traiter la demande au motif qu’elle n’était pas compétente, puisque le salarié ne bénéficiait d’aucun mandat lui conférant un statut protecteur.S’appuyant sur les mêmes dispositions du Code du travail, le Conseil d’Etat avait déjà souligné la volonté du législateur de conférer à ces salariés mandatés le bénéfice d’un statut protecteur. Les juges avaient également ajouté que ces dispositions étaient d’ordre public et qu’étaient visées toutes les commissions paritaires créées par accord collectif y compris celles antérieures à la loi du 4 mai 2004.  

Application aux commissions paritaire régionales négociées dans le cadre des TPE ?La loi Rebsamen (4) prévoit qu’au plus tard au 1er juillet 2017 seront mises en place les commissions paritaires interprofessionnelles régionales (CPRI) où siègeront notamment des salariés mandatés par des organisations syndicales représentatives dans le but de représenter les salariés des très petites entreprises (une représentation revendiquait depuis longtemps par la CFDT). Ces commissions légales ne seront, toutefois, mises en place qu’à défaut de commissions paritaires régionales (CPR) créées par voie d’accord collectif dans la branche. En outre, elles devront respecter les conditions imposées par la loi. Le législateur a uniquement prévue une protection contre le licenciement pour les salariés mandatés dans les commissions légales (CPRI). Il a donc été laissé à la négociation le fait de prévoir une protection pour les salariés mandatés au sein des commissions négociées. 

La solution de la Cour de cassation (et du Conseil d’Etat) qui vise « toutes les commissions paritaires mises en place par accord collectif », laisse penser que le statut protecteur bénéficiera également aux futurs salariés mandatés siégeant au sein des CPR, permettant ainsi de les protéger peu importe que l’accord collectif le prévoie ou non. Ce point ne serait alors plus négociable pour les organisations professionnelles d’employeurs !Un message fort est ainsi envoyé en direction des employeurs et de l’inspection du travail, qui devront s’y soumettre : il s’agit d’en faire bénéficier tous les salariés mandatés qui siègent au sein de commissions paritaires créées par accord collectif d’un statut protecteur. Il faudra toutefois attendre d’autres affaires pour s’en assurer…  

La CFDT ne peut que se réjouir de la protection accordée à ces salariés qui s’engagent et s’exposent. Et ce d’autant plus s’ils ne bénéficient pas d’un mandat de DS ou d’élu du personnel qui les protégerait par ailleurs. 

Attention si vous êtes bénéficiaire d’un mandat extérieur (comme c’est le cas en l’espèce) à bien en informer votre employeur !!! (Au plus tard au jour de l’entretien préalable de licenciement). Sans quoi vous ne pourrez revendiquer le statut de salarié protégé. En effet, il ne peut être reproché à votre employeur de ne pas avoir demandé l’autorisation à l’inspection de travail de vous licencier s’il n’était pas informé de votre mandat. Ces derniers son, en effet moins visibles que ceux pratiqués dans l’entreprise, tel qu’un mandat de délégué syndical. Voir : L’EMPLOYEUR BIEN INFORMÉ REND LE CONSEILLER DU SALARIÉ BIEN PROTÉGÉ  

(1) Loi n° 2004-391 du 04.05.04 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social.(2) Art. L.2411-1 C.trav.(3) CE, 04.05.16, n°38095.(4) Loi n°2015-994 du 17.08.15 relative au dialogue social et à l’emploi. 

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