Caractère collectif des régimes de prévoyance : la CFDT décrypte

Cet article provient du site du syndicat CFDT.

Un régime de retraite supplémentaire réservé aux seuls salariés justifiant d’une ancienneté continue de 12 mois, excluant ainsi une partie des salariés en CDD de son bénéfice, n’a pas de caractère collectif au sens du Code de la Sécurité sociale. Il en résulte qu’il n’ouvre pas droit aux exonérations de charges sociales. C’est ce qu’a décidé la Cour de cassation dans un arrêt récent. Cass. 2e civ, 15 juin 2017, n° 16-18532. 

  • Faits et procédure

Dans cette affaire, la société a mis en place un accord collectif de retraite supplémentaire s’appliquant à tous les salariés employés, cadres, cadres de direction, comptant au moins un 1 d’ancienneté continue au sein de l’UES(1). A la suite d’un contrôle, l’Urssaf a considéré que le caractère collectif de l’accord n’était pas respecté. Elle a ainsi notifié un redressement, réintégrant dans l’assiette de cotisations les contributions de la société au financement de prestations complémentaires de retraite et de prévoyance. 

La société a alors saisi le tribunal des Affaires de sécurité sociale d’un recours contre cette décision. 

Pour ouvrir droit aux exonérations de charges sociales, un régime de prévoyance, de frais de santé ou de retraite supplémentaire doit avoir un caractère obligatoire et collectif(2). Le régime est considéré comme collectif s’il bénéficie :- à l’ensemble des salariés de l’entreprise,- ou à une ou plusieurs catégorie(s) « objective(s) » de salariés. Il s’agit de catégories de salariés « que leur activité professionnelle place dans une situation identique au regard des garanties concernées»(3). 

 

  • Un contrat ne bénéficiant pas à une catégorie objective

Approuvant la décision du tribunal, la cour d’appel a rejeté le recours de la société. Elle a considéré que l’accord n’avait pas de caractère collectif au sens des règles de la Sécurité sociale. En effet, les juges d’appel ont relevé que le régime de retraite était réservé aux seuls salariés justifiant d’une ancienneté continue de 12 mois et excluait en conséquence les salariés justifiant d’une ancienneté de douze mois discontinue. 

Ainsi, les salariés ayant un CDD de moins de 12 mois mais ayant une ancienneté cumulée supérieure ou sein de l’UES ne pouvaient pas bénéficier de l’accord de retraite supplémentaire (en effet, le calcul de l’ancienneté était opéré par l’entreprise contrat par contrat). Il en résultait une différence de traitement non justifiée par des raisons objectives. 

L’employeur a décidé de se pourvoir en cassation. L’entreprise se fondait sur le décret prévoyant qu’en la matière (hors régime de complémentaire santé), le fait qu’un accord prévoie que l’accès aux garanties est réservé aux salariés de plus de 12 mois d’ancienneté ne remet pas en cause le caractère collectif de ces garanties(4). Selon elle, cette règle s’appliquait indifféremment que l’accord pose un critère d’ancienneté continue ou discontinue. Elle considérait que la différence de traitement instituée par l’accord était fondée sur une raison objective : « l’exigence d’un lien suffisamment pérenne avec l’entreprise », permettant « de ne pas avoir à affilier des salariés ne travaillant que de manière ponctuelle et discontinue, et partant d’éviter à avoir à procéder à des désaffiliations ».  

  • Une inégalité de traitement entre CDD

Le Cour de cassation rejette cette argumentation. Elle rappelle d’abord qu’est collectif un contrat qui bénéficie de façon impersonnelle et générale à l’ensemble du personnel salarié d’une entreprise ou à une partie d’entre eux appartenant à une catégorie objective établie à partir de critères objectifs.C’est-à-dire que tous les salariés qui en bénéficient doivent se trouver dans une situation identique au regard des garanties concernées. 

Elle constate ensuite que le régime de retraite mis en place excluait tous les salariés ayant bénéficié antérieurement d’une succession de contrats à durée déterminée au sein de l’entreprise dont le total cumulé s’élevait à 12 mois ou plus. Elle en déduit enfin qu’il existait une différence de traitement entre les salariés titulaires d’un contrat à durée déterminée selon qu’ils aient travaillé ou pas dans le cadre de contrats à durée déterminée successifs. Le contrat de retraite supplémentaire ne bénéficiait donc pas à une catégorie objective de salariés, et la contribution de l’employeur pour le financement de ce contrat n’avait pas à être déduite de l’assiette des cotisations. 

Cette décision est bienvenue en ce qu’elle sécurise les salariés fragilisés par le recours aux CDD successif. 

 


(1) Unité économique et sociale. 

(2) Art.L.242-1 CSS. 

(3) Art.R.242-1-1 CSS. 

(4) Art.R.242-1-2 CSS 

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmark Close
0 Shares:
Vous pourriez aussi aimer

Un premier avenant intéressant pour la PSC du ministère de l’Intérieur

Un an après la signature de l’accord ministériel du 16 mai 2024 sur la protection sociale complémentaire (PSC) des agents du ministère de l’Intérieur et des outre-mer, un premier avenant est venu, le 12 mars 2025, en corriger plusieurs aspects. Publié au Journal officiel d'aujourd'hui, ce texte modifie la structure des bénéficiaires, ajuste un article sur la gouvernance et corrige une rédaction ambiguë sur les ayants droit. La principale évolution porte sur...

Budget 2025 : plus de 33 milliards d’euros alloués aux établissements médico-sociaux par la CNSA

Un arrêté publié au Journal officiel d'aujourd'hui, fixe pour l’année 2025 l’objectif de dépenses et le montant total annuel des financements alloués aux établissements et services médico-sociaux relevant de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). L’objectif de dépenses est établi à 33 248,30 Md€ pour l’ensemble du secteur. Ce montant se répartit entre 17 538,87 Md€ pour les établissements et services accueillant des personnes âgées...

Dotations médico-sociales 2025 : 32,55 Md€ répartis entre les régions par la CNSA

Par décision du 2 juin 2025, publiée au Journal officiel d'aujourd'hui, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) a fixé les dotations régionales limitatives applicables aux établissements et services médico-sociaux pour l’année 2025. Ces dotations, réparties par Agence régionale de santé (ARS), concernent à la fois les structures accueillant des personnes âgées et celles destinées aux personnes en situation de handicap. Le montant total...