Perturbateurs endocriniens : la politique de l’UE critiquée au Sénat

La commission des affaires européennes sur les perturbateurs endocriniens dans les produits phytopharmaceutiques et les biocides, autrement appelés pesticides, vient de délivrer un rapport plutôt tiède au Sénat. 

Le texte dresse le bilan des risques des perturbateurs endocriniens pour la santé et met en lumière l’inaction de l’Union européenne face à leur utilisation fréquente. Le rapport critique également les mesures prises par l’Union européenne pour règlementer la présence des perturbateurs endocriniens dans les pesticides. 

 

 

 

Les perturbateurs endocriniens présentent un risque sur le système hormonal

Le rapport commence par présenter le contexte en décrivant les effets des perturbateurs endocriniens sur la santé. Ces produits ont des “effets néfastes sur la santé de l’organisme intact ou sur celle de sa descendance” : en d’autres termes, ils sont de nature à troubler le système hormonal de tout être vivant. 

Les conséquences sur l’Homme sont “une hausse du nombre de cancers hormono-dépendants, notamment des cancers du sein et de la prostate”. Mais le rapport souligne également “des cas plus nombreux de puberté précoce chez les jeunes filles et de malformation génitale chez les garçons, ainsi qu’une baisse du nombre de spermatozoïdes chez les hommes. De même, les cas de diabète de type 2, d’obésité et d’autisme recensés sont en augmentation”. 

Le rapport termine ce point en rappelant que pour les endocrinologues, toute dose, si infime soit-elle, de perturbateurs endocriniens, est susceptible d’être toxique pour l’Homme. Cette approche ne permet donc pas d’adopter la politique habituellement pratiquée pour les produits toxiques qui considère qu’une dose maximale sans effet toxique observable peut être déterminée. 

 

L’inaction de l’UE face aux perturbateurs endocriniens

Le rapport remis au Séant consacre toute une partie au fait que l’UE tarde à se mobiliser alors que les caractéristiques nocives des perturbateurs endocriniens sont connues de tous. 

La grande difficulté soulevée par les auteurs du rapport réside dans les controverses qui demeurent quant à l’existence de seuils qui marquent la différence entre les toxicologues et les endocrinologues. 

Le document note que si des mesures ont été mises en place par l’UE, elles sont insuffisamment adaptées au cas des perturbateurs endocriniens. Cela a même entrainé la condamnation de la Commission européenne pour carence de définition des critères d’identification des perturbateurs endocriniens le 16 décembre 2015. 

Malheureusement, les auteurs du rapport rappellent que c’est l’UE qui est compétente pour approuver les substances contenues dans les pesticides. L’absence de réaction de l’UE est palliée en France par plusieurs lois restrictives qui l’exposent à un risque de condamnation. 

L’absence de régulation des perturbateurs endocriniens dans les pesticides

Le document remis au Sénat précise qu’au niveau européen, aucune définition des perturbateurs endocriniens n’a été donnée. 

Le seul moyen légal d’identification des perturbateurs endocriniens dans les pesticides repose sur le danger qu’ils représentent. Cette procédure n’est satisfaisante ni pour les endocrinologues et les associations de protection de l’environnement et de la santé, ni pour les industriels qui produisent ces produits. 

Pour avancer sur la définition des perturbateurs endocriniens, la Commission retient la définition de l’OMS : « une substance ou un mélange exogène altérant les fonctions du système endocrinien et induisant de ce fait des effets néfastes sur la santé d’un organisme intact, de ses descendants ou au niveau des (sous-) populations ». La Commission a également donné des critères permettant de distinguer les perturbateurs endocriniens avérés des perturbateurs endocriniens présumés. 

Les auteurs du rapport notent que ce choix opéré par la Commission européenne est accompagné d’une volonté d’élargir les possibilités de dérogation pour les pesticides ! 

La justification réside dans l’objectif de perturber le système endocrinien des organismes nuisibles. Le rapport ne manque pas de soulever toutes les critiques émises à l’encontre de la position de la Commission : les oppositions proviennent aussi bien d’associations de défense de l’environnement et de la santé que d’Etats membres, dont la France. 

En revanche, les industriels ainsi que les représentants d’agriculteurs, dont la FNSEA qui a reçu des contributions de l’AGPM (association générale des producteurs de maïs), de l’AGPB (association générale des producteurs de blé) et du collectif Sauvons les fruits et légumes, sont farouchement opposés à un durcissement de la réglementation. Ils craignent notamment des conséquences négatives sur le rendement des récoltes. 

 

Finalement, les rapporteurs critiquent ouvertement la position de la Commission européenne sur la définition des perturbateurs endocriniens. Ils sont favorables à l’application du principe de précaution s’agissant de ces substances dans le but de protéger la santé publique. C’est donc la position française qui est préconisée, voici la liste souhaitée des critères permettant d’identifier un perturbateur endocrinien : 

« Une substance est considérée comme pouvant avoir des propriétés perturbant le système endocrinien de l’être humain si la substance répond aux critères ci-dessous : 

« – elle est connue ou présumée pour ses effets néfastes sur un organisme sain ou sa progéniture, à savoir un changement dans la morphologie, la physiologie, la croissance, le développement, la reproduction ou la durée de vie d’un organisme, d’un système ou d’une (sous-)population qui se traduit par l’altération d’une capacité fonctionnelle ou d’une capacité à compenser un stress supplémentaire ou par l’augmentation de la sensibilité aux effets néfastes d’autres influences ; 

– elle présente un mode d’action endocrinien et altère donc les fonctions du système endocrinien ; 

– il est biologiquement plausible que ses effets néfastes soient une conséquence du mode d’action endocrinien. » 

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