Sécurité Sociale : la CPAM et l’Urssaf condamnées face aux travailleurs transfrontaliers !

L’audience avait duré 4 jours, au parc-expo de Mulhouse. Elle trouve finalement son épilogue le 12 octobre dernier. Dans le conflit qui opposait plus de 2 000 travailleurs transfrontaliers à la CPAM et à l’Urssaf, ce sont les premiers qui ont obtenu gain de cause. 

C’est la fin d’un long combat qui n’avait donc aucun lieu d’être. Ce vendredi 12 octobre, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Haut-Rhin a estimé que « les travailleurs transfrontaliers n’avaient pas à être affiliés d’office en France ». Une décision qui risque de faire jurisprudence dans le milieu. 

Un procès hors-normes

Ce procès ne correspondait à aucun standard du genre. Alors que plus de 2 000 ex-affiliés ou affiliés de force s’opposaient à la Caisse Primaire de l’Assurance Maladie mais aussi à l’Urssaf, le Tass a dû prendre place dans le parc-expo de Mulhouse pour rendre son jugement, avec des auditions qui duraient du 11 au 14 septembre dernier.  

Vendredi dernier, la président du Tass a donc annoncé que « la Suisse seule avait le pouvoir d’affilier ou non le travailleur frontalier. La protection française ne s’applique que si l’intéressé demande et obtient une dérogation des Suisses.«  

Ainsi, plusieurs milliers de travailleurs transfrontaliers qui officiaient en Suisse accusaient la CPAM française de ne pas les radier alors même qu’ils avaient fait les démarches adéquates. Par ailleurs, les plaintes visant l’Urssaf faisaient état de mises en demeure et d’amendes en tous genres.  

Une aberration lorsque l’on sait qu’en 2016, un accord franco-suisse était signé, permettant aux travailleurs transfrontaliers de choisir l’affiliation qui leur convient. Par ailleurs, le site Ameli précise qu’il est, en théorie, possible de faire valoir son droit d’option lorsque l’on est travailleur frontalier. Dans la pratique donc, la CPAM continuait unilatéralement d’affilier ces travailleurs. 

Officiellement, il s’agissait « d’apporter une protection sociale, en vertu de la solidarité nationale. » Une défense que n’a donc pas retenue le tribunal.  

Le texte du règlement n’a rien d’ambigu. Le tribunal ne comprend pas comment la caisse, et davantage encore le ministère, qui dispose d’une armée de juristes, peuvent le lire autrement. 

Décision du Tribunal des affaires de sécurité sociale 

 

Le tribunal a, par la suite, annulé toutes les amendes et mises en demeures qui allaient à l’encontre des travailleurs transfrontaliers. Il s’agit maintenant d’indemniser les victimes qui ont dû continuer à verser des cotisations et celles qui, parfois, n’étaient pris en charge par aucune sécurité sociale. 

Comme le précise L’Alsace, « le tribunal a fait le choix d’un « montant de principe » quand ces demandes visaient la CPAM. Quand celles-ci visaient l’Urssaf, il a proportionné les montants en fonction du nombre de mises en demeure et de contraintes dont les frontaliers avaient été destinataires, en considérant qu’une contrainte, nécessitant l’intervention d’un huissier au domicile, était « plus stigmatisante » qu’une mise en demeure, par courrier recommandé.«  

Pour la CPAM, la note est de 1 050€ pour chaque personne visée. De son côté, l’Urssaf doit payer deux fois 750€. Dès l’ouverture de l’audience, le président de l’Urssaf, sentant le vent tourner, avait plaidé contre les demandes de dommages et intérêts, en expliquant que « la charge » que ces sommes pourraient représenter « pour la collectivité publique » seraient trop lourdes à supporter. Mais un appel n’est, pour le moment, pas à l’ordre du jour. 

Ce jugement montre donc que la Sécurité Sociale, quand bien-même elle est soutenue par le gouvernement, n’a pas tous les droits.  

Ajouter aux articles favoris

Conformité CCN en santé

Pour vous aider à gérer la conformité CCN de vos offres "santé standard", profitez de notre outil en marque blanche gratuitement en 2023. L'outil vous permettra de savoir, en un clic, le niveau de votre offre compatible avec la CCN que vous aurez sélectionnée. L'outil en marque blanche est relié à la base de données CCN de Tripalio, juridiquement certifiée et mise à jour en temps réel. Il bénéficie de notre algorithme de comparaison qui détecte les non-conformités du contrat santé standard.
Demandez votre outil
0 Shares:
Vous pourriez aussi aimer
Lire plus

Quand la relation intime entre deux salariés devient un motif de licenciement

La relation intime d'un responsable d'entreprise peut avoir des conséquences professionnelles s'il les cache à sa direction. C'est ce qu'a récemment rappelé la Cour de cassation dans une décision rendue le 29 mai 2024. Elle s'y prononce sur le licenciement pour faute grave d'un responsable d'entreprise qui a caché à son employeur sa relation avec une autre salariée de l'entreprise, laquelle est titulaire...
Lire plus

Indemnité de cantine fermée “covid” : le juge tranche en défaveur des télétravailleurs

La crise sanitaire de 2020 a provoqué la fermeture de nombreux lieux de rassemblement de population, dont la fameuse cantine d'entreprise. Or, certaines entreprises ont dû maintenir une activité dans leurs locaux pour assurer la continuité de service. Dans ce cadre, une indemnité dite de cantine fermée a été mise en place pour permettre aux salariés présents de ne pas être lésés par la fermeture du restaurant normalement accessible dans le cadre de leur emploi. Mais cette indemnité a fait naître quelques litiges, dont...
Lire plus

Obligation de prévention et sécurité : c’est à l’employeur de montrer patte blanche en cas d’accident

En entreprise, l'employeur est tenu de respecter des mesures de prévention et sécurité afin de protéger la santé de ses salariés. Les dispositions du code du travail encadrent cette obligation avec précision. Mais que se passe-t-il en cas de manquement de l'employeur ? Le salarié peut-il considérer que cette violation de ses obligations légales par l'entreprise constitue un motif de rupture de contrat de travail aux torts de l'employeur ? Dans ce cas, sur qui repose la charge de la preuve ? C'est à cette question que...