Cette publication provient du site du syndicat de salariés CFDT
A l’approche de l’été, nous revenons sur les principales caractéristiques du CDD saisonnier, qui concerner des populations différentes avec aux deux extrêmes : des jeunes qui exercent un job d’été et des « saisonniers professionnels » pour qui ces emplois constituent un mode de vie, parfois contraint.
Chaque année, il y aurait entre 500.000 et 700 000 saisonniers (1). Le travail saisonnier peut recouvrir différents contrats, mais sont principalement concernés les contrats à durée déterminée (CDD) pour un emploi saisonnier que nous aborderons ici, même si en pratique les employeurs peuvent avoir recours à d’autres formes de contrat (CDD d’usage, contrat intérimaire, contrat de vendange…).
- Définition du CDD Saisonnier
Le CDD, peu importe le motif, ne peut pas « pourvoir un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise ».
La loi « Travail » (2) a introduit dans le Code du travail une définition des emplois à caractère saisonnier (3). Cette définition est très importante, en ce qu’elle enferme le recours au CDD saisonnier pour les emplois liés aux rythmes des saisons (ex : les travaux agricoles) ou des modes de vie collectifs (ex : le tourisme) dont les tâches se répètent tous les ans selon une périodicité « à peu près fixe ». Il est important de retenir que le caractère saisonnier ne dépend donc pas de la volonté de l’employeur mais bien d’un « phénomène » extérieur.
Ainsi, ne peut prétendre à la qualification de CDD saisonnier :
– l’emploi d’un salarié affecté à une tâche sans lien avec le rythme des saisons (ex : pour la comptabilité) ;
– l’emploi d’un salarié pour une période coïncidant avec la durée totale d’ouverture de l’entreprise lorsque celle-ci est restreinte (un restaurant d’altitude par exemple…).
- Les principales spécificités du CDD saisonnier
Sans surprise, les dispositions légales sur le CDD saisonnier offrent une grande souplesse à l’employeur par rapport à un CDI mais également par rapport aux autres CDD. La négociation de branche, ou d’entreprise peut s’emparer de ce sujet pour fixer des règles plus favorables. A défaut d’accord, la loi travail a initié pour certaines branches des mesures supplétives visant à infléchir la précarité.
Le socle légal. Le contrat saisonnier se démarque du droit commun des CDD à plusieurs titres :
– il peut ne pas comprendre de terme précis (4). Toutefois un CDD d’un an serait difficilement envisageable dans la mesure où cela démontre une activité normale et permanente de l’entreprise… Lorsque le terme est imprécis l’employeur doit fixer une durée minimale d’embauche qui garantit donc un minimum d’activité et de revenu ;
– le délai de carence qui interdit à l’employeur de conclure un nouveau CDD sur le même poste de travail, avec le même salarié (5) ou un autre (6), avant un certain délai, n’est pas applicable non plus ;
– le salarié n’a pas légalement droit à l’indemnité de fin de contrat (7) qui correspond en principe à 10 % de la rémunération totale brute perçue pendant la durée du contrat ;
– le Code du travail prévoit que le chômage des jours fériés ne peut entraîner de perte de salaire pour les salariés ayant au moins 3 mois d’ancienneté dans l’entreprise. De manière favorable, la loi « Travail » a ajouté pour les salariés saisonnier que cette ancienneté est atteinte en cumulant les emplois successifs ou non dans la même entreprise (art. L. 3133-3 C.trav.).
Pour les jeunes salariés, le salaire horaire ne peut être inférieur à : – 80% du Smic horaire s’il a 16 ans (8,02 euros bruts en 2019) ;- 90% du Smic horaire s’il est âgé de 17 à 18 ans (9,02 euros bruts en 2019) ;- au minimum au smic horaire si le salarié saisonnier est âgé d’au moins 18 ans (10,03 euros bruts en 2019).
Des dispositions propres à chaque secteur d’activité. Ces contrats particulièrement précaires n’ont pas attendu la loi pour être encadrés dans certaines branches professionnelles, lesquelles ont notamment précisé des règles de reconduction des contrats d’une année sur l’autre et/ou la prise en compte de l’ancienneté afin d’assurer une certaine stabilité dans l’emploi et de meilleures garanties.
La loi « Travail » avait souhaité généraliser ces bonnes pratiques dans les branches identifiées comme particulièrement concernées par le travail saisonnier. Finalement, ce sont 17 branches qui ont dû appliquer les mesures suivantes (8) :
– Sur le calcul de l’ancienneté du salarié :
Le Code du travail précisait déjà que le calcul de l’ancienneté du salarié suppose de cumuler les durées des CDD saisonnier successifs dans une même entreprise (9). Désormais, pour les branches concernées, le terme « successif » concerne les contrats conclus avec une même entreprise sur une ou plusieurs saisons, y compris lorsqu’ils ont été interrompus par des périodes sans activité dans cette entreprise.
– Sur la reconduction des contrats :
Le Code du travail se contente de préciser que les CDD saisonnier peuvent comporter une clause de reconduction pour la saison suivante (10). Pour les 17 branches, le droit va plus loin en précisant que tout salarié en CDD saisonnier a droit à la reconduction de son contrat lorsqu’il a effectué au moins deux mêmes saisons dans l’entreprise sur deux années consécutives et que l’employeur dispose d’un emploi saisonnier compatible avec la qualification du salarié. L’employeur devra informer le salarié de son droit à la reconduction de son contrat « sauf motif dûment fondé », ce qui pourrait par exemple être le cas si le salarié a préalablement indiqué à l’employeur qu’il ne souhaitait plus travailler dans cette entreprise.
Ces dispositions plus favorables pour les saisonniers s’appliquent uniquement dans les 17 branches, et attention car elles sont supplétives c’est-à-dire qu’elles s’appliqueront à condition qu’il n’y ait pas d’accord de branche ou d’entreprise même moins favorable sur le sujet.
Pour approfondir le sujet : – la confédération édite un guide des saisonniers ;- la fédération des services édite un guide spécifique pour les salariés des Hôtels-Cafés-Restaurants(cf.documents joints).
(1) France Stratégie est un organisme de concertation et de réflexion rattaché au Premier ministre qui a publié un rapport en juillet 2016 intitulé « Emplois saisonniers : enjeux et perspectives ».
(2) Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels
(3) Le CDD saisonnier n’est possible que pour les emplois « dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ». L.1242-2, 3°, C.trav.
(4) Art. L.1242-7, 4° C.trav.
(5) Art. L. 1244-1,3°, C.trav.
(6) Art. L. 1244-4-1, 3° C.trav.
(7) Art. L.1243-10, 1° C.trav.
(8) L’arrêté du 5 mai 2017 listant les branches où l’emploi saisonnier est particulièrement développé concerne :
Sociétés d’assistance (IDCC 1801).
Casinos (IDCC 2257).
Détaillants et détaillants-fabricants de la confiserie, chocolaterie, biscuiterie (IDCC 1286).
Activités de production des eaux embouteillées et boissons rafraîchissantes sans alcool et de bière (IDCC 1513).
Espaces des loisirs, d’attractions et culturels (IDCC 1790).
Hôtellerie de plein air (IDCC 1631).
Hôtels, cafés, restaurants (IDCC 1979).
Centres de plongée (Sport IDCC 2511).
Jardineries et graineteries (IDCC 1760).
Personnels des ports de plaisance (IDCC 1182).
Entreprises du négoce et de l’industrie des produits du sol, engrais et produits connexes (IDCC 1077).
Remontées mécaniques et domaines skiables (IDCC 454).
Commerce des articles de sports et d’équipements de loisirs (IDCC 1557).
Thermalisme (IDCC 2104).
Tourisme social et familial (IDCC 1316).
Transports routiers et activités auxiliaires du transport (IDCC 16).
Vins, cidres, jus de fruits, sirops, spiritueux et liqueurs de France (IDCC 493).
(9) Art. L.1244-2, dernier alinéa C.trav.
(10) Art. L.1244-2, premier alinéa C.trav.