Le feuilleton de la préparation des élections à la présidence de la CFE-CGC n’en finit pas de connaître des rebondissements inattendus. Dans la mesure où il est désormais acquis que la fédération de l’énergie ne soutiendra pas Carole Couvert en vue du scrutin qui se tiendra durant le congrès confédéral de 2016, les proches de l’actuelle présidente pensent à modifier les statuts de la centrale.
Modifier les statuts, une “exigence démocratique”
Peu après la décision prise par le congrès national de l’énergie, Régis dos Santos, soutien de Carole Couvert issu de la fédération bancaire, s’est indigné de ce qu’une composante de la CFE-CGC rassemblant “6000 adhérents sur un total de 160000” puisse seule empêcher la réélection de la présidente. “C’est tout à fait antidémocratique ! Il faut permettre à la présidente de se présenter devant le congrès, afin qu’elle puisse montrer qu’elle a un bon bilan. Nul doute qu’elle serait alors reconduite !” tonne notre interlocuteur. Le problème, c’est que les statuts confédéraux empêchent cette manoeuvre. Les proches de Carole Couvert ont donc rapidement imaginé quelques pistes afin de contourner cette interdiction.
“Il n’y a pas cinquante solutions possibles”, explique le responsable du comité de soutien à la présidente, qui précise : “On préfère faire les choses dans les règles, il n’est pas souhaitable de s’orienter vers un transfert à une autre fédération. La solution la plus légitime serait de revoir les statuts”. Le principe, rien moins qu’anodin, est ainsi mis sur la table. Régis dos Santos estime que les délais peuvent être tenus, malgré la lourdeur de l’opération. “Nous avons le temps, le congrès n’est prévu que pour la mi-2016 et les candidatures doivent être arrêtées à la fin du printemps”. Cette assurance ne saurait toutefois masquer le fait qu’à la CFE-CGC, tout le monde n’entend pas les choses de la même oreille.
La dénonciation d’un “coup d’Etat constitutionnel”
Interrogé quant à l’éventualité de la modification des statuts, un représentant de la centrale de l’encadrement ne mâche pas ses mots : “Nous sommes à moins de six mois du congrès, le règlement de ce dernier a été approuvé en novembre dernier et on voudrait à présent en modifier les règles ! Qui plus est sur un aspect fondamental ! C’est un vrai coup d’Etat constitutionnel, c’est inacceptable !” Les esprits chagrins rappellent qu’avant d’arriver aux responsabilités, les dirigeants actuels avaient empêché le précédent président, Bernard Van Craeynest, de modifier les statuts confédéraux juste avant le congrès : “Et ils voudraient recourir aux mêmes stratagèmes ? La démocratie, c’est le respect des statuts !”
Dans cette ambiance chaleureuse, les échanges d’amabilités se multiplient. Ainsi, un participant au récent congrès national de l’énergie évoque le tractage organisé sur les lieux du congrès par les soutiens de la présidente : “Il y avait Régis dos Santos, ainsi que les présidents de l’assurance, des services publics et de la communication. Ils diffusaient un tract faisant état de la confiance accordée à Carole Couvert par quelques fédérations de la CGC. Autrement dit, ils tentaient d’influencer le vote des militants. Ce ne sont pas des méthodes correctes, surtout qu’au moins une des fédérations citées dans le tract n’a pas donné son accord à cette forme de communication”. Les mois qui viennent risquent d’être sympathiques à la CGC…
Quelle probabilité pour la réécriture des statuts ?
Les proches de Carole Couvert semblent convaincus de leur capacité à mener à bien une réforme des statuts avant le congrès de 2016. Régis dos Santos en veut pour preuve la motion de soutien et de confiance adoptée à l’unanimité par le comité confédéral du 26 novembre 2015. Les 14 fédérations signataires de la motion “représentent 78000 adhérents sur les 128000 de la CFE-CGC et 61 % des mandats pour une AGE [assemblée générale extraordinaire] ou un Congrès”. Au-delà de certaines incertitudes sur les chiffres : la CGC revendique-t-elle 160000 ou 128000 adhérents ? une chose est sûre selon les proches de Mme Couvert : l’appareil est tout à fait prêt à permettre à la présidente de se représenter.
Le son de cloche n’est pourtant pas le même partout. Un responsable du mouvement considère qu’en cas de réunion d’une AGE, le comité de soutien de Carole Couvert n’obtiendra pas les 2/3 des voix nécessaires à la révision des statuts : “Toutes les fédérations n’ont pas signé la motion [ndlr : la métallurgie, en particulier]. Et même parmi les signataires, certaines n’accepteront pas d’être liées à cette procédure. Résultat : on va réunir inutilement et illégitimement une assemblée générale fort coûteuse pour la confédération. Ca n’est pas un mode de fonctionnement sain et démocratique”. Dans ces conditions, l’opération de sauvetage du soldat Couvert pourrait bien capoter en place publique. La suite au prochain épisode.