La Cour de cassation a rendu une décision intéressante relative à l’application dans le temps d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) à l’égard d’un salarié protégé par un mandat de représentation du personnel durant l’application du plan. L’employeur a tenté une mise à la retraite illégale pour évincer le salarié des bénéfices établis dans le PSE. Cette décision n° 13-27.763 du 19 mai 2015 a été rendu par la chambre sociale en audience publique.
Les faits de l’espèce
En l’espèce, M. X a été engagé dans la société DBA en qualité d’agent technique depuis 1965. Comme il a exercé plusieurs mandats de représentation du personnel, ces mandats lui ont conféré une protection contre une éventuelle rupture du contrat de travail jusqu’au 9 juin 2007. Cependant, au cours de l’été 2005, il s’est avèré que l’employeur souhaitait réorganiser l’entreprise et notamment fermer le site ou travail M. X. Par suite, un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) d’une durée d’un an a été mis en oeuvre à compter du mois de juillet 2005. Le licenciement économique de M. X a, en revanche, été refusé par l’administration du travail, décision réitérée par le juge administratif. Le salarié a alors été mis à la retraite par la société le 22 juin 2007. Contestant cette décision, M. X a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir la requalification de cette décision en licenciement économique dépourvu de cause réelle et sérieuse et les indemnités conventionnelles résultant du PSE.
Débouté de ses demandes, la Cour d’appel motive sa décision en considérant d’une part que la requalification de la mise à la retraite en un licenciement, alors même qu’une cause économique est reconnue, n’entraine pas automatiquement l’application du PSE. Ainsi, les indemnités prévues dans ce plan ne peuvent lui être allouées car la procédure de licenciement prévu dans le plan n’a pu aboutir à son égard en raison du refus de la juridiction administrative. D’autre part, la durée du plan étant expirée à la date de la décision de la mise à la retraire, il n’était donc plus possible de l’appliquer. Cependant, cette manœuvre de la part de l’employeur, qui consiste à évincer le salarié des bénéfices du PSE en essayant de le mettre à la retraite, est-elle légale ?
La solution de la Cour de cassation
La réponse est négative, c’est pourquoi cet arrêt d’appel est cassé par la Cour suprême au motif que la cour d’appel a violé les articles du code du travail encadrant le licenciement économique (article L. 1233-3 & L. 1233-61) et la mise à la retraite dont les conditions ne sont pas réunies (article L. 1237-8). Par conséquent, selon la solution donnée par les juges de cassation, la rupture du contrat de travail du salarié voulu par l’employeur depuis l’établissement du PSE s’inscrivait dans le cadre d’un licenciement collectif. De plus, le site de l’entreprise était fermé à compter du mois de décembre 2005. L’application du plan est alors différée pour ce salarié, à compter de l’expiration de la période de protection de ces derniers. En effet, les conditions de la mise à la retraite n’étaient pas réunies, l’employeur ne pouvait pas échapper à l’application de ce PSE dont il voulait initialement bien lui accorder les bénéfices. Il avait d’ailleurs effectué un entretien préalable avec le salarié.
La Cour de cassation rend ici une décision permettant de contrer les manoeuvres de l’employeur en différant l’application du PSE dans le temps. C’est un arrêt favorable au salarié mais cela ne remet pas en cause le depart à la retraite légale d’un salarié corrélativement à l’existence d’un PSE dans sa structure.