Après une première journée de mobilisation sociale relativement réussie, les syndicats de salariés avaient appelé à une nouvelle journée de grèves et de manifestations hier.

Si ce second appel à la mobilisation n’a pas rencontré le même succès que le premier, Matignon n’apparaît pourtant en position d’en tirer réellement profit.
Un essoufflement de la mobilisation sociale
La journée de mobilisation intersyndicale du jeudi 2 octobre 2025 a connu une participation significativement plus faible que celle du 18 septembre. Les chiffres communiqués par les autorités et les organisations syndicales, ainsi que le suivi des grèves dans les secteurs clés, témoignent d’un essoufflement du mouvement.
Selon le ministère de l’Intérieur, 195 000 personnes ont manifesté dans toute la France le 2 octobre. La CGT a de son côté annoncé 600 000 manifestants. Ces chiffres sont en net recul par rapport à la journée du 18 septembre, où la même source policière avait recensé un peu plus de 500 000 manifestants, tandis que la CGT en revendiquait plus d’un million. À Paris, la préfecture de police a comptabilisé 24 000 participants le 2 octobre, soit moins de la moitié des 55 000 manifestants recensés le 18 septembre. Le taux de grévistes a également marqué une baisse sensible. Dans l’Éducation nationale, le ministère a fait état de 6 % d’enseignants grévistes dans le primaire et le secondaire, contre 17 % lors de la précédente journée d’action. Les perturbations dans les transports en commun, notamment à la RATP et à la SNCF, ont été nettement moins importantes que le 18 septembre, où le trafic avait été affecté.
La mobilisation du 18 septembre avait été qualifiée de “grande réussite” par les syndicats, constituant la plus forte participation à un mouvement social depuis la réforme des retraites de 2023. Les appels à une mobilisation “encore plus nombreuse” pour la journée du 2 octobre, afin de faire pression sur le gouvernement, n’ont donc pas été suivis d’une amplification du mouvement.
Sébastien Lecornu toujours dans l’ornière
Constatant cet étiolement de la mobilisation, le Premier ministre Sébastien Lecornu s’en est, certes, très probablement félicité. L’essoufflement de la contestation de rue lui offre en effet un répit sur ce front potentiellement inflammable, tout en affaiblissant le front commun de ses opposants syndicaux. Il pourrait alors tenter d’en profiter pour mieux se concentrer sur les négociations parlementaires. Dans ce domaine, il insistera sans doute sur le constat de l’affaiblissement de la contestation sociale pour rechercher une dissociation entre opposition syndicale et opposition parlementaire à son action et, par là même, légitimer la recherche d’une solution parlementaire destinée à éviter la paralysie du pays. En affirmant, ce matin, sa volonté de ne pas recourir au 49.3 afin d’obtenir la validation de ses projets de budget, le Premier ministre a d’ailleurs donné des gages aux oppositions quant au fait qu’il s’inscrit dans une démarche de compromis politique.
Cet espace d’action stratégique étant dégagé pour Matignon, encore faut-il préciser que les obstacles structurels à sa progression en son sein demeurent pour le moins importants. Ne pouvant pas compter sur une majorité absolue à l’Assemblée Nationale, le Premier ministre doit nécessairement trouver des voix en dehors de son camp pour construire une majorité sur son projet de budget. Or, les oppositions les plus déterminées à son action, notamment le Rassemblement National (RN) et La France Insoumise (LFI) ne semblent pas déterminer leur agenda en fonction de l’ampleur des journées de mobilisation syndicale. Sans inflexion notable de ses orientations budgétaires, il est ainsi tout à fait envisageable que Sébastien Lecornu en vienne à faire les frais d’une motion de censure majoritairement adoptée. Pour Matignon, l’accalmie sociale n’a que peu de chances de contribuer à un éclaircissement de son horizon politique.