Travail dissimulé : les URSSAF en panne de pédagogie

L’ACOSS a présenté avec fierté les résultats de la lutte contre le travail dissimulé mené par les URSSAF en 2017. Ainsi, ce sont 541 millions d’euros de cotisations et contributions sociales qui ont été réclamés et obtenus auprès des entreprises cette année-là. 

Les nombres donnés par la publication ont de quoi impressionner : 57 734 actions de lutte contre le travail dissimulé, 51 539 actions de prévention, 896 actions ciblées sur les travailleurs indépendants et 4 350 sur le régime général. On en oublierait presque que derrière tout ça, il y a des personnes, des entrepreneurs qui, avec un peu plus de pédagogie, arriveraient probablement à être conformes aux exigences légales et réglementaires. 

 

Travail dissimulé : la course au chiffre des URSSAF au détriment des entreprises

Dans sa publication, l’ACOSS se réjouit que l’objectif de redressement fixé par la convention signée entre les URSSAF et l’Etat ait été dépassé de 55% en 2017. Sur cinq ans, ce sont près de 2,3 milliards d’euros qui ont été redressés, bingo ! Le montant des redressements est passé de 320 millions d’euros en 2013 à 541 millions en 2017, une belle performance… 

Ce constat ne signifie pourtant pas que les entreprises sont de plus en plus nombreuses à recourir à du travail dissimulé. En revanche, cela montre que la notion de travail dissimulé est entendue très largement par tous les agents chargés d’effectuer un contrôle au nom des URSSAF. En effet, le travail dissimulé est défini comme étant “une dissimulation d’activité ou une dissimulation d’emploi salarié” : plutôt large comme définition. A ce titre, la moindre micro-incartade aux formalités administratives, économiques, comptables, peut amener un contrôleur URSSAF à identifier du travail dissimulé. 

Comme le souligne le think tank Cercle Lafay dans une publication, un dirigeant qui se tromperait dans une formalité administrative pourrait se voir accusé de recourir à du travail dissimulé : en effet, le fait de ne pas faire de déclaration préalable à l’embauche dans les temps peut être analysé comme du travail dissimulé alors qu’il s’agit d’une formalité parmi tant d’autres… 

Il existe forcément des entreprises et des personnes qui recourent volontairement à du travail dissimulé et ont toute légitimité à faire l’objet d’un redressement. Mais il ressort de la publication de l’ACOSS que l’objectif des URSSAF est de poursuivre jusqu’à la moindre petite erreur involontaire afin de montrer que les redressements augmentent. D’ailleurs, le but affiché est d’aller encore plus loin dans les redressements avec un objectif de 3,5 milliards d’euros sur la période 2018-2022, soit 1,2 milliards d’euros de plus que sur la période 2013-2017. 

Pour arriver à leurs fins, les URSSAF exploiteront les données fournies par la déclaration sociale nominative (DSN) et vont mettre en place des missions spécialisées en Big Data. Ces mesures semblent surtout destinées à sanctionner les entreprises qui auraient surtout besoin de plus de pédagogie : ce n’est donc pas un hasard si le nombre d’actions de prévention était encore inférieur à celui des actions de lutte contre le travail dissimulé en 2017. 

Quand on lit cette publication, on se dit que les relations entre URSSAF et entreprises ne sont pas prêtes de s’améliorer… 

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