Cette publication est issue du site du syndicat de salariés FO.
La déclaration est tombée le 28 février. Après deux années de débats au sein des institutions européennes, les négociatrices du Parlement européen, du Conseil de l’Europe et de la Commission sont parvenues à s’entendre sur les contours d’un éventuel accord sur la révision de la directive relative au détachement des travailleurs. « Éventuel », car ces « contours » doivent encore être validés par les trois institutions, notamment par les représentants des vingt-huit États membres le 14 mars 2018.
Le texte issu de ces négociations n’a pas été publié. Le travail détaché est un sujet hautement politique, qui divise les États membres. Ces « contours » peuvent donc encore bouger. On peut néanmoins esquisser les grandes lignes de la future directive. Le principe un même salaire, pour le même emploi dans la même entreprise, a largement été invoqué pour décrire les principaux points de la révision de la directive de 1996. Si le texte est adopté, les travailleurs détachés envoyés de leur pays d’origine vers un autre dans l’union devraient, à l’avenir, avoir les mêmes droits que les travailleurs locaux.
La loi et les conventions collectives de chaque pays
Les employeurs seront tenus d’appliquer toutes les règles en matière de rémunération fixées par la loi ou par les conventions collectives en vigueur dans le pays où se déroule l’activité professionnelle. Les frais d’hébergement et de transport ne pourront pas être déduits des salaires. Les primes de nuit, les heures supplémentaires ou le 13e mois de salaire, devront également être accordées au travailleur détaché. À la charge du pays d’origine de collecter les cotisations de sécurité sociale et l’impôt sur le revenu.
La durée d’un détachement sera réduite de deux ans maximums à dix-huit mois, soit un an avec la possibilité de demander une prolongation de six mois.
Enfin, comme le souhaitait le Parlement européen, les États auront deux ans et non pas quatre ans, pour transposer la nouvelle réglementation dans leur droit national, soit en 2020 si l’adoption a lieu en 2018.
Exclusion du transport
Une concession très importante que le Parlement a dû accepter : la révision ne s’appliquera pas aux transports, notamment au transport routier. Et c’est là que le bât blesse tant le dumping social fait rage dans ce secteur. L’Espagne et les pays de l’Est très chatouilleux sur la question auront obtenu gain de cause et le secteur continuera d’être réglementé par les anciennes dispositions jusqu’à ce que le paquet mobilité présenté par la Commission en mars 2017 soit conclu. L’exclusion de ce secteur limite la portée d’une révision qui se voulait ambitieuse, regrette FO.
Reste à savoir quelles dispositions de la nouvelle règlementation sera appliqué sur le transport routier une fois le paquet mobilité adopté ? Le transport international sera-t-il considéré comme du travail détaché ? Autant de questions qui restent pour le moment en suspens. D’autant qu’il n’est pas sûr que la directive transport soit adoptée avant les élections européennes de 2019 et le changement de Commission.
Quid du détachement en cascade
Autre point concédé par le Parlement : il concerne le fondement juridique de la directive qui ne devait plus reposer que sur la liberté de prestation de service mais également sur les droits des travailleurs. Cette extension de base légale n’a pas survécu même si une mention du droit des travailleurs figurerait dans le champ d’application du texte.
D’autres points restent encore à éclaircir comme celui du sort réservé au détachement en cascade. Une pratique qui permet à un employeur d’un pays A, de faire travailler un salarié d’un pays B via une agence d’intérim installée dans un pays C.
Selon la ministre bulgare du Travail, Zornitsa Roussinova, si de nombreux détails doivent encore être clarifiés, le projet définitif de la loi sur les travailleurs détachés devrait être adopté en juin 2018.