Cette publication provient du site du syndicat de salariés CFDT.
Par un arrêt du 2 février 2022, la Cour de cassation vient préciser les modalités d’appréciation du critère de transparence financière auquel doivent satisfaire les organisations syndicales. Cass.soc. 02.02.2022, n°21-60046
La transparence financière en question. Cette affaire fait suite à la désignation par l’Union des syndicats anti-précarité d’une salariée en qualité de représentante de la section syndicale, désignation contestée en justice par l’employeur. Le débat s’est porté sur la question de savoir si le syndicat remplissait les conditions pour pouvoir procéder à cette désignation, et plus précisément s’il satisfaisait à l’obligation de transparence financière.
Rappel des règles
Critères de représentativité d’une organisation syndicale
En son article L. 2121-1, le Code du travail fixe la liste des critères cumulatifs que doivent satisfaire les organisations syndicales pour pouvoir être qualifiées de représentatives. Parmi ces critères figure celui relatif à la transparence financière.
La représentativité permet aux organisations syndicales d’exercer un nombre significatif de prérogatives, comme celle de désigner des délégués syndicaux (sous conditions), ou encore celle de négocier et de signer les accords collectifs.
La désignation du RSS possible pour les organisations syndicales non représentatives
Un syndicat qui n’est pas représentatif dans une entreprise ou un établissement a néanmoins la possibilité, lorsqu’une section est constituée au sein de cette entreprise ou de cet établissement d’au moins 50 salariés, de désigner un représentant de la section syndicale (RSS) pour le représenter.
Ce RSS bénéficie des mêmes prérogatives que le délégué syndical, à l’exception du pouvoir de négocier des accords collectifs (1).
La question s’est posée de savoir si le syndicat non représentatif dans l’entreprise ou l’établissement qui procède à une telle désignation se devait de remplir les critères relatifs à la représentativité visés à l’article L. 2121-1 du Code du travail. Dans un arrêt du 22 février 2017 (n°16-60123), la Cour de cassation retient que « tout syndicat doit, pour pouvoir exercer des prérogatives dans l’entreprise, satisfaire au critère de transparence financière ».
Rappel des faits
Comme indiqué, à la suite de la désignation d’un RSS par un syndicat non représentatif dans l’entreprise, l’employeur décide de saisir la justice pour en obtenir l’annulation au motif du non-respect par ce syndicat de l’obligation de transparence financière.
Le tribunal judiciaire a fait droit à sa demande : pour lui, à défaut d’approbation des comptes 2019 au jour de l’audience de plaidoirie du 10 novembre 2020, le critère de transparence financière n’était pas satisfait !
La Cour de cassation, saisie d’un pourvoi, a du se poser les questions suivantes :
- à quel moment la condition de la transparence financière doit-elle être appréciée ?
- à quel moment les comptes doivent-il avoir été approuvés ?
Appréciation de la transparence financière : quand et comment ?
La Cour de cassation pose deux éléments permettant de préciser ce critère de la transparence financière.
Elle rappelle tout d’abord que c’est « à la date de l’exercice de la prérogative syndicale » que la condition de la transparence financière doit être appréciée(2).
Et surtout, chose nouvelle à notre connaissance, elle précise que « l’approbation des comptes d’un syndicat pour un exercice clos doit avoir lieu au plus tard à la clôture de l’exercice suivant ».
Cette nouvelle précision est à lire avec celle apportée par un arrêt du 10 février 2021 (n°19-18040), selon lequel le respect de l’obligation de transparence financière s’apprécie sur le « dernier exercice clos précédant l’année au cours de laquelle a été exercée la prérogative syndicale ».
Dans cette affaire, la désignation litigieuse ayant eu lieu le 22 juillet 2020, c’est donc l’exercice de 2019 qu’il convenait de prendre en compte pour vérifier le respect du critère de transparence financière, exercice devant être approuvé au plus tard, comme vient de le préciser la Cour de cassation, lors de la clôture de l’exercice de 2020.
Cette décision invite l’ensemble des syndicats CFDT a la plus grande vigilance quant au moment de l’approbation de leurs comptes tant les conséquences, nous l’avons vu, peuvent être lourdes !
(1) Art. L.2142-1-1 C.trav
(2) Voir aussi Cass.soc. 17.10.18, n°18-60030