L’allocution d’Emmanuel Macron du 27 novembre a fait réagir à la fois les organisations patronales et syndicales. Petit florilège des parutions officielles :
U2P :
Même si le Président de la République a bien pris soin d’exprimer sa compréhension à l’égard de la colère des « Gilets jaunes ». Même s’il a annoncé une grande concertation de terrain sur la transition écologique et sociale. Même si l’U2P partage une partie des objectifs de long terme fixés par Emmanuel Macron. Force est de constater qu’aucune réponse immédiate et concrète n’a été apportée aux Français qui ont manifesté dans le cadre du mouvement des « Gilets jaunes ».
La situation est d’autant plus préoccupante, qu’au-delà de la hausse des prix des carburants, aucune mesure nouvelle n’est envisagée pour aider les Français dans la transition énergétique de leurs logements, ni pour encourager les professionnels dans l’évolution de leur flotte de véhicules utilitaires. A cela il faut ajouter les baisses de chiffre d’affaires substantielles qui ont été constatées à la suite des blocages et bientôt la collecte de l’impôt sur le revenu à la source qui va mettre en lumière le poids démesuré des prélèvements obligatoires dans notre pays. Au total, le risque d’emballement du mécontentement est important.
L’U2P constate avec regret que les pouvoirs publics ont laissé s’installer dans le pays une fracture territoriale et sociale. Ce ne sont pas des grands messes, fussent-elles régionales, qui permettront de rétablir la confiance.
C’est pourquoi l’U2P prendra prochainement une initiative visant à placer les entreprises de proximité, qui sont présentes en tous points du territoire, au centre d’une concertation avec tous les acteurs locaux (chefs d’entreprise, salariés, consommateurs, élus…), à l’instar de la démarche de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs qu’elle a engagée à l’occasion du salon des maires. L’objectif sera de proposer des solutions concrètes adaptées à chaque territoire au profit du tissu économique et social local.
CFTC :
Dans son allocution de ce 27 novembre, le président de la République a annoncé des mesures de long terme et de moyen terme, auxquelles la CFTC ne peut que souscrire ; elle regrette, en revanche, l’absence de réelles mesures de court terme aux difficultés de pouvoir d’achat des Français.
La CFTC ne peut, en effet, qu’approuver les engagements de long et moyen terme en faveur d’une transition écologique juste, et qui réponde aux objectifscontenus dans l’accord de Paris de contenir le réchauffement climatique en-dessous de 2 degrés et si possible d’essayer de limiter la hausse à 1,5 degré. Si on infléchit ce cap, ce sont nos concitoyens qui le payeront et demain nos enfants.
Elle demande néanmoins au gouvernement de veiller au reclassement et à la formation des salariés des centrales à charbon et nucléaires amenées à fermer, ainsi que de penser à la redynamisation des bassins d’emplois concernés.
La CFTC adhère également à la méthode proposée pour établir un dialogue social et environnemental au plus près du terrain, et avancer des solutions concrètes et pratiques, afin de construire le nouveau modèle économique, social et environnemental dont la France a besoin. L’actualité démontre aujourd’hui, si besoin était, le rôle prépondérant des corps intermédiaires dans la conception, la conduite et la pédagogie des réformes.
En 2015, lors de son congrès, la CFTC prônait la construction d’un nouveau contrat social destiné à réagir aux bouleversements en cours, notamment lechangement climatique. Elle avait, alors, des préconisations et proposait surtout d’y réfléchir à plusieurs, organisations syndicales et patronales,associations et ONG, élus de terrain et société civile !
En effet la CFTC agit là où elle le doit avec les moyens qui ont toujours été les siens – à savoir la réflexion et le dialogue-, en collaboration avec des associations de défense de la famille, des ONG environnementalistes et les partenaires sociaux de bonne volonté, mais aussi l’Etat, en défendant le fléchage des recettes issues de la taxe carbone dans un sens favorable à la transition écologique et solidaire. Sur le terrain, nos structures doivent également relayer ce type de collaboration et œuvrer de façon constructive à la préservation de la planète, notre maison commune.
Enfin la CFTC accueille favorablement la constitution d’un Haut-Conseil pour le climat, qui n’est pas une commission Théodule de plus, mais un organisme qui sera chargé de définir les bases scientifiques du dialogue environnemental. Elle y prendra toute sa place.
Toutefois, au-delà de ces considérations écologiques, la CFTC regrette que les maux profonds révélés par les mécontentements exprimés ces dernières semaines n’aient pas donné lieu à des annonces susceptibles de rééquilibrer les efforts demandés aux français.
Medef :
Le Medef prend acte des annonces du Président de la République d’ouvrir une large concertation sur la mise en œuvre de la transition et de la fiscalité écologique même s’il regrette l’absence de représentants des entreprises dans le Haut conseil pour le climat. Conscientes de leur responsabilité vis-à-vis des générations futures, les entreprises seront au rendez-vous et participeront de façon constructive à ces échanges sur l’ensemble du territoire.
Ce cycle de concertation doit être l’occasion de revoir l’ensemble de la fiscalité écologique pesant sur les entreprises et sur les ménages en France et en Europe. Pour que la hausse de la fiscalité écologique soit compréhensible et acceptée elle doit se traduire par une baisse proportionnelle des autresprélèvements pesant sur les mêmes contribuables. Le Président de la République a rappelé l’importance du consentement à l’impôt : le Medef rappelle que pour ce consentement soit possible, il faut que le niveau de la fiscalité soit acceptable, ce qui n’est plus le cas dans notre pays avec 45% de prélèvements obligatoires. Il est donc urgent d’initier une baisse des dépenses publiques pour permettre la baisse des impôts.
En ce qui concerne la Programmation pluriannuelle de l’énergie, le Medef rappelle que notre système énergétique est un atout majeur pour l’économiefrançaise. La transition énergétique doit permettre de le conforter en matière de climat, de sécurité d’approvisionnement et de compétitivité, notamment deprix de l’énergie.
Parmi les orientations annoncées, le Medef souligne la priorité donnée à la réduction de nos émissions de CO2, l’accent mis sur l’efficacité énergétiquedans l’industrie, le transport et le bâtiment, le développement des énergies renouvelables, la confirmation du report à 2035 de l’objectif de 50% denucléaire qui est un atout pour une électricité décarbonée et compétitive, et une approche « pragmatique et adaptative » afin d’ajuster la transition en fonction de la situation de la France.
Enfin, le Medef rappelle qu’il est favorable au principe de la taxe carbone et accueille positivement la modulation de celle-ci en fonction du prix des matières premières. Il rappelle que les entreprises sont actuellement doublement pénalisées car elles sont touchées de plein fouet par les différents blocages auxquels il faut mettre fin et doivent dans le même temps assumer les hausses des prix des carburants.
CPME :
A l’occasion de la présentation de la politique énergétique pour les années à venir, le Président de la République a annoncé le lancement d’une “grandeconcertation de terrain sur la transition écologique et sociale afin, notamment… d’éviter que la transition écologique n’accentue l’inégalité entre les territoires“.
Cette démarche est à saluer car elle montre enfin, du moins peut-on l’espérer, une prise de conscience sur l’absolue nécessité de tenir compte des réalités territoriales. La CPME prendra naturellement part à ces réflexions pour faire entendre la voix de ceux qui, partout en France, prennent des risques pour faire vivre et développer leur entreprise et ont aujourd’hui l’impression de ne pas même être pris en considération.
Autre point positif “la hausse des taxes sur les carburants sera adaptée à l’évolution des cours du pétrole“, ce qui, en théorie, devrait limiter la hausse.
Pour autant de très nombreuses questions pratiques restent en suspens.
Que va-t-il se passer au 1er janvier 2019 pour le prix du carburant ; quid des augmentations de charges sociales dans les territoires ultramarins ; le crédit impôt sur la transition énergétique (CITE) sera-t-il effectivement maintenu dans les prochaines années pour le secteur du bâtiment ?
Le cap énergétique réaffirmé ce matin est une chose. Le cap fiscal en est visiblement une autre. Force est de constater que, sur ce point, le flou absolu reste de rigueur. Pas sûr donc que cela suffise à calmer les esprits.
La CPME continuera quant à elle plus que jamais de militer pour la mise en place d’un bouclier fiscal pour les artisans, TPE et PME en y incluant la fiscalité locale… et la fiscalité écologique.