L’Assemblée Nationale vient d’adopter un amendement qui fera chaud au coeur des travailleurs non-salariés (TNS): l’obligation de déclarer leur conjoint(e) sous un statut ou sous un autre, lorsque l’intéressé(e) participe à la vie de l’entreprise. Cette mesure est protectrice pour bon nombre de femmes qui n’avaient pas de statut jusqu’ici tout en assistant leur mari. Mais elle a un coût: outre qu’elle augmentera le risque de qualification de “travail dissimulé”, elle augmentera mécaniquement les cotisations à payer…
L’an dernier, nous nous étions indigné, dans nos colonnes, du sort particulièrement discriminatoire réservé aux femmes par feu le RSI. A l’époque, nous avions, pointé du doigt les congés maternité et le statut des conjointes collaboratrices, particulièrement défavorable. Dans un de ces mouvements à la française, typique de la sécurité sociale au demeurant, la majorité parlementaire vient d’apporter un mal pour un bien, en obligeant à l’avenir de déclarer systématiquement la conjointe collaboratrice.
Les femmes de TNS désormais mieux protégées
Malgré la diversité des situations (des conjoints ou conjointes qui aident ponctuellement le travailleur non-salarié jusqu’aux époux ou épouses à temps plein), le législateur a désormais inscrit l’obligation de déclarer systématiquement le conjoint collaborateur. Cette mesure apportera une protection importante aux femmes qui se dévouent toute leur vie à l’entreprise ou à l’activité de leur mari, et qui n’ouvrent aucun droit à retraites.
Pour les femmes à temps plein, cette mesure a donc du sens et apporte une amélioration majeure.
Les TNS face à une nouvelle charge sociale à payer
Le revers de la médaille sera particulièrement douloureux pour ceux qui bénéficient d’un coup de main de leur conjoint ou de leur conjointe pour quelques heures seulement. L’obligation de déclaration va les contraindre à acquitter des cotisations sociales pour couvrir la situation de l’intéressée, en application de l’un des trois statuts existants: conjoint-collaborateur, conjoint-associé ou conjoint-salarié.
Compte tenu des prestations servies aujourd’hui par le SSI (ex-RSI) en contrepartie des cotisations, surtout celles liées à un faible nombre d’heures de présence, l’addition risque d’être très salée. On s’étonnera ici d’entendre, à droite comme à gauche, des déclarations célébrant cette mesure protectrice quand, pour le travailleur non-salarié qui sollicite les services du conjoint de manière sporadique, l’amendement qui vient de passer sera forcément vécu comme une difficulté supplémentaire dans l’exercice d’un métier déjà difficile.
Manifestement, personne, au Parlement, n’a mené la moindre étude d’impact sur la situation financière que cette mesure mal préparée va créer.
La menace de travail dissimulé plus forte que jamais
Mais l’inconvénient porte plutôt sur le risque juridique que crée cet amendement pour tous les travailleurs non-salariés. A l’avenir, la moindre intervention du conjoint dans leur activité (par exemple le boulanger qui sollicite exceptionnellement sa femme pour tenir la boutique le jour où la vendeuse habituelle est malade) les exposera définitivement au risque d’être redressé pour travail dissimulé. L’amendemennt va en effet créer une présomption de collaboration régulière du conjoint. Le travailleur indépendant aura toutes les peines du monde à s’en dépétrer.
Ainsi, même si, pour des travaux ponctuels, le conjoint-collaborateur apporte une participation bénévole à la vie de l’entreprise familiale, il faudra désormais payer des charges sur ce travail gratuit.
La promotion de l’entreprise, leit-motiv du “très libéral” Bruno Le Maire, vient de franchir une nouvelle étape majeure en France.