Depuis le début de la pandémie de coronavirus, la question du télétravail et de sa mise en oeuvre a été approfondie par la plupart des entreprises et des salariés qui ont pu (ou dû) le mettre en oeuvre. L’un des points essentiels du télétravail concerne la prise en charge des frais professionnels engagés par les télétravailleurs. Cette prise en charge est autorisée et encouragée avec un système d’exonération de charges sociales. Toute la question est de savoir quelles sont les limites fixées par l’Urssaf.
L’Urssaf s’est justement saisi de cette question à la toute fin de l’année 2019 pour simplifier la prise en charge, par l’entreprise, des frais professionnels engagés par ses salariés en télétravail. Loin d’anticiper les confinements à venir en 2020, l’Urssaf entendait simplement permettre à n’importe quelle entreprise (notamment une TPE) de recourir sereinement au télétravail en proposant une allocation forfaitaire exonérée de charges sociales à ses salariés concernés. Elle a ainsi mis en place un forfait simple en euros, dépendant du nombre de jours passés en télétravail par le salarié.
Cette mesure ne remplace pas pour autant le bon vieux barème fixant les modalités d’évaluation des frais engagés par le salarié en télétravail. Ce barème est bien plus complexe et obscur à mettre en oeuvre. Seules les grandes entreprises paraissent équipées pour l’appliquer.
Le forfait simplifié dédié au télétravail est limité à 50 € par mois
En proposant un forfait simplifié de prise en charge des frais professionnels, les Urssaf ont créé une cote mal taillée censée répondre aux situations de télétravail les plus courantes. Ainsi, l’employeur est autorisé à verser une allocation forfaitaire dédiée à la mise en télétravail de 10 € par mois pour un salarié qui passerait 1 jour par semaine en télétravail. Cela veut dire que pour un salarié entièrement en télétravail, 5 jours par semaine, l’allocation forfaitaire mensuelle versée par l’employeur atteint 50 €. Cette somme est alors intégralement exonérée de charges sociales.
Cette simplification est clairement bienvenue quand on sait que le télétravail est devenu la norme, lorsqu’il est possible, depuis le mois de mars 2020. Bon nombre de micro, petites et moyennes entreprises ont dû utiliser ce nouveau forfait pour mettre en place le télétravail en leur sein.
Mais les modalités de calcul des frais professionnels engagés par le salarié ne sont pas pour autant supprimées. Effectivement, l’entreprise peut verser plus que le plafond de 50 € par mois pour un salarié intégralement en télétravail. Mais si elle veut que cette somme soit exonérée de charges sociales, elle doit répondre à une réalité comptable particulièrement complexe.
La prise en charge des frais réellement engagés par le salarié : un casse-tête toujours d’actualité
Les entreprises ayant des salariés en télétravail qui veulent dépasser le forfait simplifié proposé par l’Urssaf doivent se rattacher à un tableau censé permettre d’évaluer les frais engagés par le salarié en télétravail (à voir ici). Ce tableau donne, pour 7 types de frais engagés par un salarié en télétravail, les modalités de calcul des sommes pouvant être versées par l’employeur en bénéficiant de l’exonération de charges sociales.
L’Urssaf distingue ainsi les 7 types de frais suivants : les frais fixes (loyer, taxes liées au logement, assurance habitation…), les frais variables (chauffage, électricité, climatisation), les dépenses d’acquisition du mobilier de bureau, les frais d’adaptation du local dédié au télétravail, le matériel informatique de travail (ordinateur, imprimante, modem), les consommables (papier, cartouches d’encre…) et enfin, les frais de connexion (internet, téléphone).
Pour certains de ces frais, les modalités de calcul sont plutôt simples. Ainsi pour les travaux d’adaptation du local, les consommables et les frais de connexion, le remboursement des frais par l’employeur est entièrement exonéré de cotisations sociales sur simple justificatif des dépenses engagées.
Cela se complique pour l’acquisition de mobilier ou de matériel informatique. L’achat spécifique par le salarié pour le télétravail peut être pris en charge et exclu de l’assiette de cotisations sociales dans la limite de 50% de la dépense réelle. Bien entendu, l’entreprise doit réclamer les justificatifs au salarié concerné.
Puis, cela se corse sévèrement pour tous les frais fixes et variables. S’agissant des frais fixes, l’Urssaf donne la formule de calcul qui s’accompagne d’un exemple concret : les frais pouvant être pris en charge par l’employeur correspondent à la quote-part de l’ensemble des frais fixes réellement supportés au titre du local affecté à un usage professionnel au prorata de la superficie totale de l’habitation principale. Autrement dit, l’employeur doit demander à son salarié l’ensemble des caractéristiques de son logement et de son local dédié au télétravail pour calculer les frais qu’il peut prendre en charge tout en restant exonéré de charges sociales. Puis concernant les frais variables, c’est également une quote-part des frais supportés au titre du local affecté à un usage professionnel qui peut être versée par l’entreprise à son salarié en télétravail. Mais là, aucune trace d’un quelconque exemple de calcul. Les rédacteurs du tableau ont dû se dire qu’ils avaient suffisamment mâché le travail aux chefs d’entreprises qui doivent, une fois de plus, se démener pour rester dans le cadre fixé par l’Urssaf.
Au vu des deux solutions proposées aux entreprises, il est clair que la grande majorité d’entre elles devrait se rabattre sur le forfait simplifié. Il s’agit pourtant d’un forfait au rabais qui pourrait parfois ne pas correspondre à la réalité des dépenses effectuées par les salariés dans le cadre du télétravail. Mais les entreprises n’ont pas non plus le loisir de s’échiner à comprendre comment calculer les frais qu’ils peuvent prendre en charge sans dépasser le plafond d’exonération. La complexité de ce calcul pourrait finalement avoir pour conséquence directe de faire bénéficier aux salariés en télétravail du forfait simplifié moins-disant.